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Liberté - Page 942

  • Communes : maintenant, au boulot !

     

    Commentaire publié dans GHI - 06.05.15

     

    De longues semaines de campagne, interminables. Un système à deux tours, où la tension, nécessairement, se relâche entre les deux échéances, parce que les gens, en toute légitimité, commencent à en avoir marre. Pour les exécutifs, une élection majoritaire qui favorise les alliances, même saugrenues. Tout cela, dimanche 10 mai, en fin d’après-midi à Uni Mail, sera tranché, pour cinq ans. Depuis le 19 avril, nous connaissons déjà la composition des Conseils municipaux (délibératifs). Ce dimanche, nous aurons celle des Conseils administratifs (exécutifs). Enfin, l’'affaire sera bouclée ! Pendant cinq ans (nouvelle Constitution), plus de campagne pour les communes. Plus de stands. Les réseaux sociaux vont se dégonfler. Ce sera, pour prendre une comparaison qui parle ces jours aux Genevois, la fin de la grande crue : nous pourrons penser à autre chose. Et les élus, impérativement, devront se mettre au boulot.

     

    Car enfin, pourquoi élisons-nous des représentants, dans les communes ou ailleurs ? Pour qu’'ils passent leur temps à communiquer entre eux, comme dans un club, dans les apéros mondains ou sur les réseaux sociaux ? Non, bien sûr : nous les élisons pour qu’'ils travaillent. En fonction de la bannière sous laquelle ils sont été élus, en étant fidèles à leurs engagements, à leurs idées, et non en se précipitant, dès le départ, dans des alliances avec leurs adversaires. Le fameux consensus helvétique ne consiste pas, contrairement à l’'image que voudraient en donner certains, à faire immédiatement la paix avec l’'autre camp. Mais à défendre fermement ses positions, se battre pour sa vision, quitte, à la fin, à négocier des solutions de compromis. En clair, si on élit des gens sous une étiquette de parti, ça n’est pas pour qu’'ils se jettent, toutes affaires cessantes, dans les bras de ceux qu’'ils venaient de combattre pendant  la campagne. Le consensus suisse ne doit être synonyme ni de lâcheté, ni d'’illisibilité.

     

    Cinq ans de travail, donc, au service des communes. Nous l’'avons déjà dit ici : cet engagement est méritoire et force le respect, parce que les thèmes traités dans les Conseils municipaux sont souvent très concrets, prosaïques, et ne bénéficient pas d’'une grande publicité. On va s’'échiner sur des ronds-points, des canalisations, des plans directeurs, au mieux sur des projets de logements. Beaucoup, hélas perdront courage, démissionneront en cours de législature : la proportion de ces départs est impressionnante. Ils feront peut-être la joie des « viennent ensuite », mais l’'image donnée par ces désaffections n’'est pas bonne pour la chose publique.

     

    Quant à nous, citoyens, soutenons la Commune. Elle est le premier échelon de proximité avec la population. Et gardons un œœil très sévère sur la tendance de l’'actuel Conseil d’'État, où règne un esprit de géomètre, arpenteur de cadastre, à trop les régenter, sous prétexte que le Canton est « autorité de surveillance ». Corriger les abus, oui, mais remplacer le pouvoir des communes par un jacobinisme cantonal étriqué, avec des fonctionnaires en guise de préfets, c’'est ne rien comprendre à l’'affection des citoyens pour ce premier lieu de pouvoir, si proche d’'eux, si loin des parfums d'’arrogance, et des extases de géomètres, face à la mathématique révélation de la Lumière.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Le journalisme sera citoyen, ou ne sera pas

     

    Sur le vif - Mercredi 06.05.15 - 14.55h

     

    En trente ans de journalisme, je me suis toujours battu pour une certaine conception de ce métier, mettant en avant les sujets d’intérêt public : la politique, la culture, ceux dans lesquels je me suis spécialisé. Mais bien sûr aussi l’économie, les sciences, le sport, notamment. Les sujets qu’on appelle aujourd’hui « people » ne font pas partie de mon champ d’action. Ni les histoires de stars. Ni les plats préférés des politiques. Je veux parler aux gens de ce qui concerne nos grandes ambitions collectives.

     

    Rien de cela n’est allé tout seul. Toujours et partout, il a fallu livrer bataille, et il le faudra encore. Au Journal de Genève, il y a trente ans, je me battais déjà pour les pages suisses, la mise en valeur de la politique de notre pays, dans une rédaction où la rubrique internationale régnait encore en maître. Puis, pendant mes longues années à la RSR, ce fut un combat continu, soutenu, pour la politique suisse. A Berne, mais aussi dans les cantons. Combat qui fut partagé en haut lieu, ce qui nous permit de faire considérablement avancer ces domaines, rénover complètement des tranches d’informations (Matinales en janvier 1994, Forum en janvier 2001), placer le débat citoyen très haut dans les programmes.

     

    Depuis neuf ans, je livre exactement le même combat comme entrepreneur indépendant. Lorsque j’ai annoncé, à l’été 2006, que nous allions parler tous les soirs de politique, et aussi pas mal de culture, sur Léman Bleu, certains me disaient : « Tu es fou, ça va faire trop, les gens ont besoin de se distraire, la politique est trop ennuyeuse ». Là comme ailleurs, nous avons pris le pari contraire. Il a réussi.

     

    * Pari sur l'intelligence

     

    Cela prouve quoi ? Qu’il ne faut pas trop se demander ce que veulent voir ou écouter les gens, mais leur donner à partager ce qui nous semble utile et stimulant. Ils prendront ou non, seront d’accord ou non, nous aimeront ou non, mais au moins nous aurons pris un pari sur l’intelligence du public. Nous pouvons le gagner ou le perdre. Mais c’est une démarche qui vient de nous, de nos envies, nos conceptions de la citoyenneté et du métier, et non de tests d’audience, consistant à servir au public ce qu’il demanderait.

     

    Et c’est exactement pour cela que j’appelle mes concitoyens à revoir de fond en comble cette fameuse notion de « service public » dont se gargarisent tant M. de Weck et la SSR, comme s’ils en étaient les seuls dépositaires. La réalité est exactement contraire : la SSR multiplie les émissions ne relevant strictement en rien du « service public ». Et à l’inverse, les télévisions privées régionales (Canal 9, La Télé, Léman Bleu, par exemple), se concentrant à juste titre sur l’information et la vie citoyenne, en font beaucoup plus, au prorata de leurs forces, que la SSR.

     

    L’équation « SSR = service public, privé = futilités » est donc totalement fausse. Elle relève de la propagande M. de Weck et de ses affidés. Ils peuvent exercer toutes les pressions qu’ils veulent pour qu’on dise le contraire, pour ma part, dans toute la fierté de mon indépendance (accompagnée de solitude, d’inconfort), je continuerai de dire et d’écrire ma part de vérité. Elle vaut ce qu’elle vaut. Mais c’est la mienne. Et je ne pense être le dernier, en Suisse, à pouvoir avec légitimité, autorité sur la matière, expérience du métier, m’exprimer sur le sujet.

     

    * Un vide sidéral, qui fait mal

     

    J’ai parlé ici des télévisions régionales privées en Suisse romande. J’ai donné quelques noms, il y en a d’autres, notamment du côté de l'Arc jurassien, qui font aussi très bien leur boulot. Je n’ai pas parlé des programmes ahurissants de futilité de certaines radios privées. Nous étions quelques-uns, en 1993, à la RSR, à nous battre comme des fous pour installer l’information, sur la longueur (7h-9h), à la place du sympathique mais désuet système de « radio d’accompagnement ». Quand on écoute aujourd’hui certaines radios privées, dans des tranches amirales comme la Matinale, et qu’on tombe sur un vide aussi sidéral du sens et de la citoyenneté, alors oui, on se dit, avec Sisyphe, que tout est toujours à recommencer. C’est sans doute le sel de la vie. Mais à ce point, ça fait mal.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Bonaparte ou Pinay : il faut choisir !

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    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 06.05.15

     

    Un bon candidat devient-il un bon élu ? Non, bien sûr. Il y a des gens, dans la faune politique, comme Jacques Chirac, qui sont de véritables bêtes de campagne et qui, une fois parvenus au pouvoir, donnent l’impression de s’y ennuyer. Prodigieux Chirac, qui avait serré un million de mains dans la bataille des législatives de 1978, rattrapé Balladur avec génie lors des présidentielles de 1995, mais qui, deux ans après avoir réalisé le rêve de sa vie, l’Elysée, commettait l’incroyable erreur, en 1997, de dissoudre l’Assemblée. Assurément, dans l’art de la politique, Mitterrand lui était supérieur.

     

    A Genève aussi, en cet entre-deux-tours, il y a des candidats turbo. Rien ne peut les arrêter. Feront-ils pour autant de bons conseillers administratifs, dans nos 45 communes ? Certains oui, d’autres non. C’est parfaitement imprévisible. Car l’art de la campagne est une chose, celui du pouvoir en est une autre. Surtout au sein d’une Mairie ! La campagne, comme son nom l’indique, c’est la guerre. Il y faut de l’énergie, de la puissance combative, un sens aigu de la propagande, entendez la mise en valeur de la moindre de ses actions personnelles. Bref, Bonaparte, dans la Campagne d’Italie (1796-1797), qui non seulement remporte d’éclatantes victoires, mais prend soin, le bougre, de le faire immédiatement savoir, par les fameux « Bulletins de la Grande Armée ».

     

    La gestion, au jour le jour, d’une commune, exige d’autres qualités. Moins guerrières. Plus tactiques. Plus calmes. Plus constructives. A l’écoute des gens. Ne prenons peut-être pas comme modèle le gros Louis XVIII. Mais disons Antoine Pinay, l’inoubliable Maire de Saint-Chamond, père du franc fort. Un homme tranquille. Et pourtant, diablement efficace.

     

    Pascal Décaillet