Liberté
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Pas d'argent des contribuables pour la "Genève internationale" !
Sur le vif - Mercredi 12.02.25 - 14.24hEn aucun cas il n'appartient à l'Etat de Genève de voler au secours, avec l'argent des contribuables, de la "Genève internationale".La "Genève internationale" n'est pas un but en soi. Elle est un outil - un organon, au sens grec - de l'éventuelle volonté des nations du monde de collaborer. Certaines organisations ont leur utilité. D'autres, pas du tout. On a pu mesurer l'effrayante vanité de la SDN lorsque, dans les années trente, a commencé à poindre l'odeur de la poudre. Notre chorégraphie de beaux diplomates, dignes des lignes les plus puissantes de "Belle du Seigneur", s'est soudain évaporée dans le tragique de l'Histoire.Nous entrons - pour un temps - dans un nouvel ordre du monde, où tout ce réseau de relations "multilatérales" est appelé à se défaire. C'est ainsi. C'est la volonté des nations. Pas seulement celle de Trump. Le phénomène va beaucoup plus loin, il faut prendre la mesure de l'exaspération montante, dans les couches profondes des peuples, face à ces "machins" dont nul ne saisit l'utilité.Nous entrons dans un ordre où les nations reviennent, souveraines, exerçant de l'une à l'autre des relations bilatérales, sans besoin de se noyer dans la mélasse d'un mondialisme insipide, juste là pour flatter les égos, les diplomates, le personnel international, et les politiques genevois qui se prennent pour des ministres du monde.Le Conseil d'Etat genevois n'a pas à utiliser les deniers des contribuables pour entretenir un outil de plus en plus défaillant, correspondant à une illusion d'ordre mondial dont les esprits, Dieu merci, sont en train de revenir.Le Conseil d'Etat genevois ferait mieux de consacrer toute son énergie aux habitants de notre Canton, à la vivacité de son économie, à sa cohésion sociale. Un peu moins de cocktails internationaux, avec langue anglaise et ronds-de-jambes. Un peu plus de patriotisme économique, de soutien à nos PME, nos petits entrepreneurs, de vision pour relancer notre industrie, de solidarité avec nos agriculteurs.Pascal Décaillet -
Profs d'allemand, passionnez vos élèves !
Commentaire publié dans GHI - Mercredi 12.02.25
L’allemand : l’une des plus belles langues du monde. Par sa musicalité, quand elle est chantée, ou quand on en lit les poèmes à haute voix, en respectant la métrique (plus complexe qu’en français), en marquant chaque virgule, en respirant, en soulignant les silences, comme en musique, tout cela devrait s’apprendre dès le plus jeune âge. Mais si la langue allemande ravit les sens, elle séduit infiniment, aussi, les cerveaux. Comme le latin, comme le grec, elle exige, dès l’enfance, un effort intellectuel pour se plonger dans une syntaxe pas toujours simple. Prenez Thomas Mann, prenez Kafka, les deux plus grands narrateurs de langue allemande (avec Musil) du vingtième siècle, il faut entrer dans la structure de la phrase, c’est une ascèse, un chemin vers l’art, il y faut un effort cérébral. Il existe, chez Thomas Mann, dans la Mort à Venise comme dans de plus longs romans, des descriptions de maladie, par exemple, ou de symptômes, d’une époustouflante précision, qui passionne les médecins. Nous sommes dans un art du récit d’une finesse rarement atteinte.
Alors, comment un prof d’allemand peut-il passionner ses élèves, disons au niveau Collège (15 à 19 ans), encore que la dernière année du Cycle d’orientation, pour les meilleurs d’entre eux, puisse déjà donner accès à des textes littéraires ? Ma réponse : j’avance ici une piste que j’avais expérimentée, avec mes élèves, en ces temps très lointains où j’enseignais l’allemand, avant de me plonger, il y a quarante ans, dans le journalisme. Je dis qu’il faut prendre des poèmes, et les faire lire impérativement à haute voix par les élèves. En reprenant vingt fois, cent fois, la lecture, toutes voix confondues, jusqu’à la maîtrise acquise de la métrique (le iambe de Hölderlin, par exemple, d’inspiration grecque, s’impose plus vite que prévu à toute oreille un peu exigeante sur la musicalité). Exercice à faire ensemble, toute la classe, prof compris, dans la fraternité devant l’œuvre à conquérir ensemble, et surtout dans la bonne humeur ! On laisse aller les voix, on cherche ensemble, on rit, en s’énerve, on est solidaires dans la réussite ou l’échec de l’exercice. On restitue enfin à la poésie cette part d’oralité dont il n’aurait jamais fallu la dessaisir.
Je vais plus loin. J’invite les profs d’allemand à faire chanter leurs élèves. Tous ensemble, dans le même esprit de recherche solidaire et joyeuse. Chanter quoi ? Mais Brecht, bien sûr, dans ses incomparables parties du chœur (là aussi, inspirées de la tragédie grecque, Sophocle notamment), sur la musique exceptionnelle du Kurt Weill ! Et puis, emmenez-les au concert, écouter des Lieder, Schubert, Schumann, Brahms, Mahler, Hindemith, Richard Strauss, sur des poèmes que vous aurez précédemment lus à haute voix, en classe. Et là, chers profs d’allemand, vous qui avez choisi ce magnifique métier, je ne dis pas que vos élèves vont tous finir germanistes. Mais vous aurez dit la langue ensemble. Vous l’aurez respirée. Vous l’aurez chantée. Vous aurez semé, Un jour ou l’autre, vous récolterez,
Pascal Décaillet
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Soudain la vie
Sur le vif - Jeudi 06.02.25 - 22.55hMilieu de journée, autoroute de contournement. Stratus genevois, ce linceul de moiteur glauque, immuable depuis la Toussaint. France Musique. Sélection no 3 sur ma FM, vous savez ce vieux truc caduc dont plus personne ne veut. Émission sur le grand pianiste espagnol Ricardo Viñes, à l’occasion des 150 ans de sa naissance (5 février 1875). Et soudain, dans cette brume uniforme, humide et glaciale, les « Nuits dans les jardins d’Espagne », de Manuel de Falla. Puis, sa « Danse du feu ». Et des archives sonores de Ricardo Viñes, vieilles d’un siècle, intactes comme l’irruption d’une présence. Et soudain, l’Espagne. Et soudain, la chaleur, soudain la vie.Pascal Décaillet