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Liberté - Page 4

  • Par pitié, soyons clairs !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 13.03.24

     

    Oui, le langage politique, en Suisse, doit être impérativement clarifié. Nous sommes une démocratie, c’est magnifique, le peuple décide. Mais tout le monde n’a pas un doctorat en droit constitutionnel, et n’a pas à se farcir le sabir des textes législatifs. Dans tous nos Parlements, cantonaux ou fédéral, nous avons beaucoup trop de juristes, qui confondent l’élaboration d’une loi avec la rédaction d’une thèse.

     

    Alors oui, simplifions ! Lorsque le peuple reçoit la brochure d’informations, elle doit être parfaitement claire, sans le moindre mot-barrage, sans ce charabia qui amène tant d’électeurs à dire « Oh, et puis tant pis, je n’y comprends rien », et jeter leur bulletin à la poubelle.

     

    Regardez les initiatives. Elles sont claires ! La 13ème rente, c’était limpide, compréhensible d’un coup, on accepte ce supplément pour nos personnes âgées, ou non. Le peuple a compris l’enjeu, la participation fut remarquable.

     

    Ce qui pêche par opacité, ce sont certains textes de lois. Surtout, la manière alambiquée dont certaines questions sont posées au peuple. Au point que ce dernier doit lire trois fois, par un effet pervers de doubles négations, pour savoir s’il doit voter oui ou non. Enfin, tous ces mots appartenant à la technique parlementaire, « contre-projet indirect », etc., doivent disparaître de la brochure du peuple. On doit donner l’essentiel, et puis basta !

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Le peuple doit prendre le pouvoir !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 13.03.24

     

    Le dimanche 3 mars 2024 restera dans nos livres d’Histoire suisse. D’abord, pour le geste de solidarité aux aînés de ce pays. Mais aussi, par le succès extraordinaire, contre toute l’officialité bernoise, contre le grand patronat, de ce petit miracle qui s’appelle la démocratie directe. Le droit d’initiative, plus encore que le référendum, est le fleuron de notre système suisse. Le référendum se définit encore, certes en l’attaquant, par une loi parlementaire. L’initiative, au contraire, oublie le Parlement. Un tout petit groupe d’hommes et de femmes hyper-motivés, au départ, constituent un comité, rédigent un texte, le soumettent à la récolte d’au moins cent mille signatures dans le pays, puis font campagne. Enfin, un beau dimanche, le verdict du peuple et des cantons tombe. Le monde entier peut nous envier ce fonctionnement. Il permet au peuple de se lancer un défi à lui-même, en jouant à saute-moutons par-dessus les élus.

     

    Quand je dis « le peuple », il faut entendre ce que la langue grecque appelle le « démos » : ceux qui votent. Les citoyennes et citoyens qui constituent le cercle électoral. La langue grecque, plus riche que la nôtre, dispose d’autres mots pour définir le peuple quand il hurle dans la rue, par exemple. En Suisse, le peuple votant n’est pas une masse de rue : il est, au même titre que les Parlements, les exécutifs, une institution. Il est même l’arbitre suprême : par l’initiative, peuple et cantons donnent l’ordre aux autorité fédérales de mettre en œuvre une décision du souverain. Dans le cas de la 13ème rente, le Conseil fédéral et les Chambres ont sacrément intérêt à ne pas faire les malins, temporiser, dénaturer, comme ils l’ont fait pour l’initiative du 9 février 2014, sur l’immigration de masse. Toute tentative dans ce sens se heurterait à une levée immédiate de la Matze.

     

    En lançant une initiative claire, compréhensible par tous, répondant aux besoins criants d’une importante partie de notre population, la gauche et les syndicats ont réussi un coup de maître. D’innombrables voix de droite leur ont permis d’emporter la majorité, le thème était rassembleur, ce dimanche 3 mars fut joyeux, nous nous en souviendrons toutes nos vies. Contrairement à ce que vous serinent les acariâtres et les pisse-vinaigres des corps intermédiaires, sans compter les profs de droit qui prétendent encadrer le débat citoyen, je dis, moi, haut et fort, que les textes politiques doivent être simplifiés. Ils doivent être courts, clairs, parler à tous, concerner les vrais problèmes des gens, et vous verrez la participation grimper !

     

    Alors, nous tous, hommes et femmes de ce pays, soyons citoyens ! Sur les grands sujets, les lames de fond de notre Contrat social, lançons des initiatives. Depuis 1891, nous avons ce droit, il ne s’use que si l’on ne s’en sert pas. Et, si le peuple les accepte, exigeons férocement une mise en œuvre de la volonté suprême. Sinon, on s’énerve. Excellente semaine !

     

    Pascal Décaillet 

  • Philippe de Gaulle, admirable fils d'un Géant

     
    Sur le vif - Mercredi 13.03.24 - 10.11h
     
     
    Je n'ai jamais interviewé Hésiode, et pour cause ce contemporain des textes homériques a vécu il y a 28 siècles. Il nous lègue, avec les Travaux et les Jours, un texte magnifique, la Théogonie, que j'ai eu l'honneur de lire avec Olivier Reverdin, à l'automne 1976.
     
    Le Théogonie, ce sont les combats entre les premiers dieux, entre les Titans et les Géants. Les pères tuent leurs fils, les dévorent. C'est terrible, saisissant, tout cela dans une langue et une versification hexamétrique qui rappellent celles d'Homère.
     
    Il doit être terriblement difficile, pour un mortel, d'être le fils d'un Géant, surtout quand on lui ressemble aussi intensément. On nous dit que la Grand Dauphin, fils aîné de Louis XIV, aurait fait un roi magnifique, mais l'homme eut la décence de mourir avant son père, et son fils à lui aussi, avant son grand-père. On pouvait laisser Hésiode dormir dans les bibliothèques, ce fut l'enfant Louis XV, arrière-petit-fils du Roi-Soleil, qui lui succéda, à l'âge de cinq ans, en 1715.
     
    Oui, Charles de Gaulle eut trois enfants, Philippe, Elisabeth et la petite Anne, qu'il perdit en 1948. Parmi eux, un fils, l'Amiral Philippe de Gaulle, né en 1921, et qui vient de nous quitter, à l'âge de 102 ans. J'ai une bibliothèque entière sur Charles de Gaulle. Elle contient les livres de Philippe sur son père. Autant le dire tout de suite : ils sont remarquables.
     
    Comment se frayer un chemin dans la vie, quand l'ombre du père risque à ce point de nous étouffer ? L'Amiral a non seulement réussi, mais je veux dire ici qu'il y est parvenu au-delà de tout. Il ressemble à son père, il en a le côté militaire, la simplicité, l'austérité, le sens du devoir. Mais il n'est pas Charles, il est Philippe. Il n'est pas Général, mais Amiral, et le devient sans rien devoir à son père. Un grand serviteur de la Royale, simple et silencieux, habité par la mission à accomplir, et cela dès les années de guerre, où il sert sur les navires de la France libre.
     
    Un jour, un journaliste lui demande (je cite de mémoire) : "C'est utile, dans la vie, de s'appeler Philippe de Gaulle ?". L'Amiral : "Dans une réunion mondaine, ça peut aider. Mais pour apponter, dans la tempête, un navire ennemi, c'est d'une utilité très moyenne". Tout l'homme est dans cette réponse : il aime son père, c'est sûr, l'admire infiniment, mais il n'est pas son père, ne se prend pas pour lui. Il est le même et il est l'autre. Il procède de lui, mais fait sa vie. Son existence, il la construit dans l'ombre terrifiante de cette filiation, mais passe sa vie à s'en affranchir. Il est le fils du Géant, il mène sa vie, il a sa famille, ses enfants, son admirable carrière dans la Marine. Il a sa mémoire, ses souffrances, ses cicatrices, son rapport avec son père, au plus profond de cette intimité tue qui ne regarde que lui.
     
    J'admire Philippe de Gaulle, depuis toujours. Dans ses interviews sur son père, la douceur de sa voix. Son humour. Cette distance face au Géant, peut-être pour masquer l'inextricable de la proximité. Le lien familial n'est pas la plus simple des choses humaines.
     
    La France perd un témoin de la vie de l'une des plus grandes figures de son Histoire. Mais elle perd aussi un homme d'une rare dignité. Un marin fidèle. Un destin, jetè là, dans la foulée d'un Géant. Et qui a su, lui, par sa sagesse et sa distance, sa pudeur, survivre comme humain, remarquable. Au milieu des humains.
     
     
    Pascal Décaillet