Sur le vif - Vendredi 10.10.25 - 13.06h
Entre la profanation d'une tombe, qui est immonde, et l'insupportable unanimisme, il aurait pu, tout de même, exister hier le seul espace qui vaille : celui du respect, certes, pour un homme, encore plus pour un mort, mais n'empêchant en aucune manière l'exercice de la lucidité critique sur son oeuvre, son legs à la Place Vendôme.
Hélas, cela ne fut pas le cas, ou beaucoup trop peu. Liturgie présidentielle comme paravent d'une perdition. Obédience, génuflexion, de la Macronie médiatique. Sanctification béate, là où aurait dû s'appliquer la nuance. Bref, à peu d'exceptions près, tous derrière l’instrumentalisation de Macron.
S'il doit exister un Panthéon, alors il est immensément malsain que le grand-prêtre en soit le chef d'Etat en exercice. Au moins, en 64, pour Jean Moulin, Charles de Gaulle "menhir dans sa longue capote battue par le vent glacé", avait laissé parler Malraux. Mais le Président à la fois maître de cérémonie, metteur en scène, hagiographie officiel, moraliste en chef, récupérateur, il y a quelque chose de l'ordre d'une dérive.
Quelle dérive ? Celle de Macron ? Oui. Mais la dérive de tout pouvoir, d'où qu'il vienne, lorsqu'il prétend, en plus de régir la Cité, organiser et orienter la mémoire.
L'exercice de la fonction critique, si chère à Robert Badinter, ne lui a paradoxalement pas été appliqué. On l'a juste sanctifié, non pour lui, mais pour accorder un sursis de crédit à un pouvoir prêt à tout pour ne pas voir sa propre fin.
Pascal Décaillet