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Liberté - Page 6

  • Israël-Palestine : communauté d'appartenance à l'espèce humaine

     
     
    Sur le vif - Jeudi 16.10.25 - 11.02h
     
     
    Par pitié, qu'on ne vienne pas parler de "paix" ! Il n'y a nulle paix au Proche-Orient, tout au plus un cessez-le-feu, dont certes personne ne se plaindra, mais qui n'a rien à voir avec la paix.
     
    Le cessez-le-feu est un arrêt sur images. Un moratoire. Une mise au congélateur. Dans les pires moments de la guerre à l'Est, entre le 22 juin 1941 et le 8 mai 1945, il y a eu, entre Soviétiques et Allemands, notamment l'hiver, des cessez-le-feu. Mais il n'y a jamais eu une seule seconde de paix.
     
    Même le 11 novembre 1918 n'est pas la paix. C'est un armistice. Les armes se taisent. La paix, c'est Versailles, sept mois plus tard, mauvais exemple d'ailleurs, traité totalement raté, arrogance de Clemenceau, conditions matérielles de vie hallucinantes imposées au peuple allemand, l'ardoise se paiera 22 ans plus tard.
     
    Sharm-El-Sheikh, ça n'a strictement rien à voir avec la paix. Un shérif matamore, gonflé d'orgueil et d'ego, débarque dans l'Orient compliqué avec sa vision de Far-West. Il "tord le bras" à Netanyahou avec de mirobolantes promesses financières. La Bourse de Tel-Aviv pulvérise ses records. Des chefs d'Etat inutiles font le voyage de la mer Rouge, juste pour se pavaner. On signe un papier. Et puis, piscine, brève plongée dans les eaux poissonneuses, et tout ce beau monde occidental, nourri de bonne conscience anglo-saxonne et de moraline yankee, reprend l'avion. C'était juste pour la photo. Juste pour le film. Juste pour la carte de visite. Juste pour le marketing.
     
    Dans ce cirque d'images, où est la paix ? Nulle part. Le chemin de paix, c'est un long, un patient, un discret, un silencieux pèlerinage des coeurs. Le mot "réconciliation", "Versöhnung" en allemand (où s'invite le mot "fils", et avec lui l'idée de filiation), exige un travail sur soi-même, puis une lente et pudique approche de l'autre, l'ennemi d'hier, pour qu'il devienne peut-être, si Dieu le veut, l'ami de demain. En écrivant ces lignes, je pense à Willy Brandt, Varsovie, 7 décembre 1970, premier voyage d'un Chancelier allemand en Pologne, génuflexion soudaine devant le Mémorial du Ghetto, public époustouflé, silence, immobilité, mémoire, recueillement.
     
    Pour le peuple palestinien, celui de Gaza comme celui de Cisjordanie, ou de Jérusalem-Est, rien n'est réglé. Aucune garantie politique n'a été donnée par Israël. Aucun projet de vie, de communauté d'existence, entre deux peuples séparés et pourtant mêlés, différents et néanmoins fondus dans la seule matrice qui vaille, qui devrait valoir : la communauté d'appartenance à l'espèce humaine.
     
     
    Pascal Décaillet

  • Elections : ça suffit !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 15.10.25

     

    Nicolas Walder, Lionel Dugerdil. Ce dimanche 19 octobre, dès le milieu de journée, nous serons fixés. Pour ma part, j’ai multiplié les débats entre ces deux hommes de valeur, mes collègues Laetitia Guinand et Jérémy Seydoux ont aussi organisé la confrontation, ainsi que la presse écrite, les radios, les associations. Bref, les Genevois sont informés. A eux de trancher.

     

    Mon souhait : que dès le lundi 20 octobre, et jusqu’aux élections cantonales du printemps 2028, nous n’ayons plus à voter, au niveau du Canton, sur le choix des hommes et des femmes. Et que, citoyennes et citoyens, nous puissions nous consacrer à l’essentiel : les votations sur le fond. Les initiatives. Les référendums. En Suisse, l’acteur principal n’est pas l’élu, mais le citoyen. Pas le parlement, encore moins le gouvernement, mais le peuple.

     

    Cette complémentaire aura certes été passionnante à animer. Comme journaliste et producteur d’une émission politique, je suis donc un homme heureux. Mais franchement, elle n’avait pas lieu d’être. Un ministre élu s’engage pour toute une législature, il ne devrait partir en cours que dans les cas graves,

     

    Surtout, dans notre démocratie suisse, le vote sur les sujets de fond est autrement plus important que le casting de telle équipe gouvernementale. On parle beaucoup trop des gens, pas assez des thèmes. Alors, de grâce, sur le plan cantonal, d’ici au printemps 2028, parole au peuple, mais sur l’essentiel !

     

    Pascal Décaillet

  • Osons la culture, osons la solitude, osons la vie !

     

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 15.10.25

     

    Genève est une ville de culture. Quelques noms d’humanistes traînent encore dans la Vieille-Ville, tels de saintes reliques, sans doute bientôt remplacés, pour des questions de genre, par d’illustres inconnues. C’est terrible. Ils étaient de géniaux imprimeurs au seizième siècle, dans la Genève des textes, de l’humanisme et de la Réforme. Brillants, courageux : ils osaient, pour l’époque, face aux risques encourus, des textes autrement transgressifs que tant de libelles de pacotille publiés aujourd’hui, qui se croient audacieux, mais ne font que reproduire les matrices de telle ou telle coterie, à gauche comme à droite.

     

    J’ai passé ma Maturité classique en avril 1976. J’allais sur mes dix-huit ans. Malgré ma passion pour les livres, la littérature allemande notamment,  je n’avais jamais entendu parler de ces immenses esprits de l’édition genevoise, il y a cinq siècles. Il m’a fallu la bienheureuse fréquentation d’un Oliver Reverdin, et d’un André Hurst, pour entendre, pour la première fois, ces quelques noms. Il s’agissait de textes grecs édités au seizième, mais tout autant de traités littéraires, philosophiques, théologiques, scientifiques, médicaux. Genève, dans ce qu’elle a de meilleur : les forces de l’esprit. Notre ville était, à l’époque, une plaque tournante de la diffusion du savoir, de l’émergence des idées nouvelles, comparable, deux siècles avant, à ce que sera l’Encyclopédie, dans le dix-huitième des Lumières.

     

    Voilà pour l’Histoire. Le legs, incomparable. Mais nous sommes hommes et femmes d’aujourd’hui, octobre 2025. Nous grandes querelles sont le Proche-Orient, l’Ukraine, la robotisation de la société, les inégalités entre riches et pauvres, le désespoir agricole, l’exode de nos industries, de nos sites de production. Et puis, cette violence, partout, ces chaînes privées françaises, TOUTES TENDANCES CONFONDUES, où ne règnent plus que l’aboiement, l’attaque personnelle, les règlements de comptes. Je dis « toutes tendances », parce que la chaîne de droite, qui a pu apparaître au début comme une fenêtre ouverte à des idées longtemps occultées par la presse bon genre, est à son tour devenue une cracheuse de matrices ne nécessitant plus ni courage, ni solitude : ces idées-là, aujourd’hui, sont quasiment majoritaires, dans le pays.

     

    Dans cet univers de tensions et de haines, je plaide pour l’ambition culturelle de Genève. Et, par exemple, je voterai oui à l’initiative voulant affecter 1% du budget cantonal à la culture. Pour peu, bien sûr, que cette dernière soit l’affaire de nous tous, citoyennes et citoyens de Genève, et surtout pas des seuls « milieux culturels », où règne parfois un entre-soi un peu pénible. Surtout, je plaide pour une culture vraiment transgressive, ce qui ne consiste absolument pas à mettre a priori des gens à poil sur scène lorsqu’on monte la Walkyrie. Non, la transgression, c’est autre chose. On la trouve dans des lieux de vie aux dimensions réduites, mais où règne la passion. Un exemple, parmi tant d’autres : le Théâtre des Amis, autour de Françoise Courvoisier, à Carouge. Alors oui, osons la culture, osons la solitude, osons la vie.

     

    Pascal Décaillet