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Commentaires GHI - Page 57

  • Marx, Thucydide

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 24.05.23

     

    La première session du nouveau Grand Conseil, mais aussi les premiers débats télévisés que j’ai pu mener en ce tout début de nouvelle législature parlementaire (sur les finances, mais aussi le logement), prouvent une chose, avec éclat : la droite, la gauche, ça existe. Plus que jamais. Et les éternels « rénovateurs », qui depuis quarante ans nous promettent « la politique autrement » et veulent jeter aux orties le vieil antagonisme, en sont pour leurs frais.

     

    Il y a un auteur qu’il faut encore lire, même si plus personne, ou presque, ne prend la peine d’ouvrir ses ouvrages. Il s’appelle Karl Marx. Si « Le Capital » vous semble trop austère, trop théorique, alors lisez au moins « Le Manifeste du Parti communiste », ancré dans l’Histoire des luttes sociales au milieu du dix-neuvième siècle. Ce qui frappe, chez Marx, comme chez l’historien grec Thucydide, qui le précède de 24 siècles, c’est la méthode. Pas d’anecdotes, mais des structures lourdes. Une analyse brillante des causes économiques, avec leurs effets.

     

    Je ne vous appelle pas à « être marxiste », bien sûr. Mais à lire Marx. Ceux qui l’ont fait comprendront parfaitement les enjeux de la politique genevoise, pour les cinq ans qui viennent : une lutte d’intérêts féroce, le frottement des contraires, comme des silex provoquant des étincelles, pour parvenir, peut-être, à un accord. Bref, tout sauf cette détestable position du départ consistant à dire « Je suis au centre ». Traduisez : « Selon le sens du vent, je m’adapte ». Lisez Marx, et surtout lisez Thucydide, « La Guerre du Péloponnèse ». Un chef d’œuvre, datant d’il y a 25 siècles.

     

    Pascal Décaillet

     

  • L'Autre droite

      

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 17.05.23

     

    Pas mal du tout, ce nouveau Parlement ! Les 11 et 12 mai, il a tenu sa première séance, à part la session constitutive, et il valait la peine de la suivre. Ce qu’on en retient au premier chef, c’est un nouveau ton. Une petite musique, dans laquelle les gains de sièges au sein de l’Autre droite se font sentir.

     

    L’Autre droite ? Ça n’est pas la droite libérale, en tout cas pas dans la détestable acception « ultra » de ce mot, cette dévotion aux marchés financiers, au mondialisme, depuis trente ans. Cette droite-là, Dieu merci, est en perte de vitesse. Après trois décennies, voici doucement la montée en puissance de l’Autre droite.

     

    L’Autre droite est patriote. Attachée au Canton comme au Pays, avec les liens du cœur. Elle est populaire, on dira tendance cassoulet. Elle est profondément attachée à la cohésion sociale à l’interne du pays, elle la reconnaît comme la clef de survie du Pacte suisse. L’Autre droite refuse toute arrogance, elle traite les Suisses sur pied d’égalité, quel que soit leur revenu, leur fortune. Elle n’est pas l’instrument d’une caste, elle est au service de l’unité nationale.

     

    L’Autre droite traite la gauche sociétale comme elle le mérite. Elle respecte infiniment la gauche sociale, celle qui se bat pour la justice. L’Autre droite veut réguler les flux migratoires. Et protéger l’emploi des Suisses. Elle ne se prosterne ni devant la finance mondialisée, ni d’ailleurs devant personne. L’Autre droite vous adresse son salut. Et ses amitiés.

     

    Pascal Décaillet

  • Nous sommes tous des radicaux de 1848 !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 17.05.23

     

    La Suisse moderne a 175 ans. Elle les fêtera le 12 septembre prochain, date de l’entrée en vigueur de la Constitution fédérale. Cette Suisse-là, qui se fonde quelques mois après la guerre civile du Sonderbund (novembre 1847), c’est celle des radicaux, dont les idées commencent à triompher, 50 ans après la République helvétique (1798), soixante après la Révolution française. Ils occuperont pendant 43 ans, au Conseil fédéral, la totalité des sept sièges, jusqu’à l’arrivée du Lucernois Josef Zemp, le premier catholique-conservateur (ancêtre du PDC, aujourd’hui Centre), en 1891. Le pouvoir entier, à eux tout seuls ! Quatre décennies d’une incroyable fertilité, tant au niveau des institutions qu’à celui de l’économie : industrie, exportations, Hautes Ecoles, Universités, réseau ferroviaire : on pense évidemment au Zurichois Alfred Escher, et à l’aventure incroyable du tunnel du Gothard. Cette période de pouvoir radical est la plus époustouflante accélération d’inventivité dans l’Histoire de notre pays, depuis 1291.

     

    Il faut absolument enseigner, longuement, en profondeur, et avec passion, l’Histoire de la Suisse de 1848 dans nos écoles. C’est la Suisse moderne, dans laquelle nous sommes encore. Il faut, avec la même ferveur, mettre en contexte, pour les élèves, l’effervescence de toute l’Europe, autour de notre pays, en cette année de Printemps des peuples. La France renverse Louis-Philippe, l’Autriche prend congé de Metternich, et ne parlons pas des Allemagnes, ni de Richard Wagner sur les barricades de Dresde. La Suisse, en ce temps-là, est tout sauf une île : les idées nouvelles qui la secouent, profondément libératrices, sont celles qui embrasent le continent. Tout comme elle avait été marquée, trois siècles plus tôt, par la Réforme. Eh oui, nous sommes un pays d’Europe comme un autre, nous en parlons quatre langues, nous en avons les religions, les grands courants politiques et philosophiques. Cela aussi, il faut le dire aux élèves.

     

    Je suis un radical de 1848. Dans ce mouvement de libération des peuples, je me reconnais. Dans cette passion institutionnelle, cet appel à développer l’entreprise, l’industrie, aussi. Sans compter la valorisation des connaissances, la place accordée à l’Ecole, la nécessité d’élévation pour la jeunesse. Les principes des Lumières, un siècle plus tard ? Oui, mais pas seulement. Le génie de la Suisse radicale, dès la réconciliation de 1891 avec les catholiques, c’est d’intégrer aussi la Vieille Suisse, six siècles après les fondements du treizième. La ville qui dialogue avec la campagne, la plaine avec la montagne, la Raison dialectique (Vernunft) qui n’écrase pas la Suisse de la piété, attachée au Patrimoine, aux paysages, à la conservation des sites, aux liturgies locales. Quoi de plus bouleversant qu’une chapelle de montagne, avec sa Madone ? Notre pays est sublime de complexité. Il est un appel à cheminer vers l’autre. Nous sommes tous des radicaux de 1848.

     

    Pascal Décaillet