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Nous sommes tous des radicaux de 1848 !

 

Commentaire publié dans GHI - Mercredi 17.05.23

 

La Suisse moderne a 175 ans. Elle les fêtera le 12 septembre prochain, date de l’entrée en vigueur de la Constitution fédérale. Cette Suisse-là, qui se fonde quelques mois après la guerre civile du Sonderbund (novembre 1847), c’est celle des radicaux, dont les idées commencent à triompher, 50 ans après la République helvétique (1798), soixante après la Révolution française. Ils occuperont pendant 43 ans, au Conseil fédéral, la totalité des sept sièges, jusqu’à l’arrivée du Lucernois Josef Zemp, le premier catholique-conservateur (ancêtre du PDC, aujourd’hui Centre), en 1891. Le pouvoir entier, à eux tout seuls ! Quatre décennies d’une incroyable fertilité, tant au niveau des institutions qu’à celui de l’économie : industrie, exportations, Hautes Ecoles, Universités, réseau ferroviaire : on pense évidemment au Zurichois Alfred Escher, et à l’aventure incroyable du tunnel du Gothard. Cette période de pouvoir radical est la plus époustouflante accélération d’inventivité dans l’Histoire de notre pays, depuis 1291.

 

Il faut absolument enseigner, longuement, en profondeur, et avec passion, l’Histoire de la Suisse de 1848 dans nos écoles. C’est la Suisse moderne, dans laquelle nous sommes encore. Il faut, avec la même ferveur, mettre en contexte, pour les élèves, l’effervescence de toute l’Europe, autour de notre pays, en cette année de Printemps des peuples. La France renverse Louis-Philippe, l’Autriche prend congé de Metternich, et ne parlons pas des Allemagnes, ni de Richard Wagner sur les barricades de Dresde. La Suisse, en ce temps-là, est tout sauf une île : les idées nouvelles qui la secouent, profondément libératrices, sont celles qui embrasent le continent. Tout comme elle avait été marquée, trois siècles plus tôt, par la Réforme. Eh oui, nous sommes un pays d’Europe comme un autre, nous en parlons quatre langues, nous en avons les religions, les grands courants politiques et philosophiques. Cela aussi, il faut le dire aux élèves.

 

Je suis un radical de 1848. Dans ce mouvement de libération des peuples, je me reconnais. Dans cette passion institutionnelle, cet appel à développer l’entreprise, l’industrie, aussi. Sans compter la valorisation des connaissances, la place accordée à l’Ecole, la nécessité d’élévation pour la jeunesse. Les principes des Lumières, un siècle plus tard ? Oui, mais pas seulement. Le génie de la Suisse radicale, dès la réconciliation de 1891 avec les catholiques, c’est d’intégrer aussi la Vieille Suisse, six siècles après les fondements du treizième. La ville qui dialogue avec la campagne, la plaine avec la montagne, la Raison dialectique (Vernunft) qui n’écrase pas la Suisse de la piété, attachée au Patrimoine, aux paysages, à la conservation des sites, aux liturgies locales. Quoi de plus bouleversant qu’une chapelle de montagne, avec sa Madone ? Notre pays est sublime de complexité. Il est un appel à cheminer vers l’autre. Nous sommes tous des radicaux de 1848.

 

Pascal Décaillet

Commentaires

  • Monsieur Décaillet,
    Merci our cet hymne à la gloire de notre beau pays, à notre histoire malheureusement oubliée par la majorité de nos concitoyens.

  • Merci pour ce beau billet. Oui effectivement, s'il y a un sujet qu fait bien défaut dans nos écoles c'est l'apprentissage de l'histoire de la Suisse de la 2e moitié du 19e siècle. Je me rappelle de notre professeure d'histoire en 1ère année du CO qui nous disait : "On vous fait croire que la Suisse est née en 1291 alors que ce n'est pas vrai. La Suisse d'aujourd'hui est née beaucoup plus tard en 1848 !". Plus tard, au Collège, nous pûmes apprendre l'histoire du radicalisme en se focalisant avant tout sur James Fazy.

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