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Liberté - Page 561

  • L'intangible noirceur du pouvoir

     

    Sur le vif - Mercredi 27.11.19 - 16.25h

     

    Rien, ni personne, ne "fait de la politique autrement".

    Les femmes ne font pas de la politique autrement.

    La gauche ne fait pas de la politique autrement.

    Les jeunes ne font pas de la politique autrement.

    "Faire de la politique autrement", c'est la promesse électorale de ceux qui veulent le pouvoir.

    Dès qu'ils l'ont obtenu, ils se mettent à faire de la politique exactement comme les autres. Comme eux, ils s'endurcissent. Comme eux, ils s'isolent. Comme eux, ils fonctionnent avec des gardes rapprochées, des commis aux basses oeuvres. Comme eux, ils s'accrochent. Comme eux, ils font tout pour demeurer au pouvoir.

    Rien, ni personne, n'échappe à cela.

    La grande saloperie du monde, c'est le pouvoir. D'où qu'il vienne, il vous corrode, il vous corrompt, il fait de vous un prédateur, il vous salit, il vous marque à jamais.

    Tant que les postes politiques seront des postes de pouvoir, avec capacité de choisir les gens, jouer de leurs ambitions, actionner des sommes d'argent, donner aux uns plutôt qu'aux autres, valoriser Jean pour humilier Paul, il n'y aura aucun changement.

    Adolescent, très tôt, j'ai eu l'immense privilège de lire en grec Thucydide (La Guerre du Péloponnèse) ou le génial biographe Plutarque, parmi beaucoup d'autres. Et puis, les grands tragiques. Et puis, tout le reste, Brecht évidemment. L'impression qui domine, au-delà des sublimes vertus littéraires, est celle de la permanence et de l'immanence d'une infinie noirceur humaine, dès que se trouve en jeu le principe même du pouvoir.

    Je ne crois pas au progrès. Je crois à l'éternité d'ébène des ambitions. Et au fond, bien qu'admirant tant de grands hommes dans l'Histoire, de Charles de Gaulle à Willy Brandt, de Nasser à Mendès France, je crois nourrir en moi une immense détestation du pouvoir.

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Putain, trois ans !

     

     Commentaire publié dans GHI - Mercredi 27.11.19

     

    Le problème no 1 du Conseil d’Etat genevois, ce ne sont pas les affaires. Même si, bien sûr, ces dernières n’arrangent rien ! Non, le véritable problème, c’est l’incapacité de l’attelage actuel (2018-2023) à constituer une véritable équipe, avec des stratégies d’ensemble, claires et lisibles. On dirait qu’ils s’ennuient, entre eux !

     

    Ne pointer que les affaires, comme celles ayant concerné Pierre Maudet, c’est privilégier un narratif tellement facile : un homme très puissant a gravement fauté, alors il tombe, et on n’en finit plus de raconter l’histoire de sa chute.

     

    La maladie dont souffre l’actuelle équipe gouvernementale est, hélas, beaucoup plus grave que cela. Elle ne se ramène pas à un seul homme, mais à une véritable paralysie des institutions : Conseil d’Etat sourd et aveugle, incapable de sentir la souffrance des gens, coupé du Grand Conseil, fonctionnant en silos plutôt qu’en équipe.

     

    Les qualités personnelles des sept ministres ne sont pas en cause. Ni d’ailleurs leur travail individuel, chacun à la tête de son Département. C’est la sauce qui ne prend pas. Et ça n’est pas une question de présidence pour cinq ans, ou de retour à une présidence tournante. Non. Nous sommes face à une impossibilité mathématique, une impasse humaine. Jeter la pierre sur un seul des membres ne sert strictement à rien.

     

    A une telle équipe, le peuple, les dimanches de votation, dira de plus en plus non. Ou des oui, du bout des lèvres, de ceux qui exigent recomptage. C’est assez désespérant. Et il y en a encore pour plus de trois ans.

     

    Pascal Décaillet

     

     

     

     

  • Chicago sur Rhône : le peuple a dit non !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 27.11.19

     

    En acceptant clairement (56,3%), ce dimanche 24 novembre, l’initiative 163, « Pour un pilotage démocratique de l’aéroport », le peuple genevois a non seulement pris une décision sur un texte important, mais il a aussi donné un signal sans équivoque sur le modèle de croissance qui doit être celui de notre Canton, pour les décennies qui viennent. Le peuple n’a pas voté contre les avions, ni contre l’existence d’une plateforme aéroportuaire importante pour Genève et la région. Il n’a pas non plus voté la décroissance. Non, il a juste refusé la démesure et la spéculation, la croissance comme but en soi. Il a voulu une économie prospère et dynamique, mais centrée sur l’humain, avec le souci de sa santé, la volonté de combattre les nuisances. Au moment où notre aéroport, né au lendemain de la Grande Guerre, fête ses cent ans, les citoyennes et citoyens de Genève ont dit oui aux avions, mais au service de Genève et de ses habitants. Ils ont dit non à la folie d’un Chicago sur Rhône.

     

    Un vote important, donc. Une étape, dans l’Histoire économique de Genève. Il s’agit d’en prendre la mesure, et de redéfinir les priorités pour les temps futurs. Il faudra d’abord que les organisations qui défendent l’économie genevoise revoient, de fond en comble, leur stratégie. A commencer par la CCIG (Chambre de commerce, d’industrie et des services de Genève). De belles énergies, dans cette instance, à commencer par celles de son directeur général, Vincent Subilia, des compétences réelles, une sincère volonté de se battre pour le tissu genevois. Mais hélas, depuis quelques années, tant de signaux d’obédience aux multinationales, au gigantisme, et pas assez d’actions visibles au service de nos PME genevoises, qui constituent pourtant l’écrasante majorité de nos entreprises. On aimerait les voir davantage valorisées, jusqu’aux toutes petites unités, de quelques personnes, voire une seule, plutôt que tant de courbettes aux puissants.

     

    Car au fond, à quoi sert l’économie ? A quoi, si ce n’est contribuer au bien-être d’une collectivité humaine, permettre à cette dernière de s’épanouir, au milieu d’un cadre naturel aimé et respecté ? Celui de Genève, petit miracle d’équilibre et de géométrie pris entre Salève, Jura et Voirons, constitue un biotope d’exception, avec la richesse et la densité d’une ville marquée par l’Histoire, l’aménagement de périphéries où la qualité de vie doit l’emporter sur toute préoccupation, et puis la campagne, les terres agricoles, la vie dans nos cours d’eau, la faune et la flore. Point n’est besoin d’être inscrit au parti des Verts pour être sensible à tout cela ! Lisez par exemple les remarquables ouvrages de Philippe Roch, ancien Secrétaire d’Etat à l’environnement, ou les études de l’architecte et urbaniste Marcellin Barthassat, vous y trouverez de l’humanisme et de la vision. Tout comme chez le vigneron Willy Cretegny. Aimer Genève, oui. Mais la transformer en un Chicago sur Rhône, c’est définitivement non !

     

    Pascal Décaillet