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Sur le vif - Page 102

  • Contre vents et marées !

     
    Sur le vif - Lundi 27.02.23 - 07.31h
     
     
    Coûts de la santé, retraites, mouvements migratoires, approvisionnement énergétique : les quatre thèmes en tête des préoccupations de nos compatriotes, selon le grand sondage national Tamedia, sont exactement ceux que je traite, infatigablement, contre vents et marées, depuis tant d’années, dans mes débats, éditos et commentaires.
     
    Contre vents et marées, oui. Contre la mode sociétale. Contre le délire wokiste. Contre le Temps. Contre la RTS. Contre les chercheurs en sciences sociales de l’Université de Lausanne. Contre la promotion de l’ignorance. Contre la relecture, et surtout la réécriture de l’Histoire, par les anachronismes et les moralistes. Contre les bobos.
     
    Contre vents et marées, je continuerai, partout où je serai, à serrer au plus près les vraies préoccupations des gens. À commencer par les plus précaires d’entre eux. Je ne plierai pas. Je ne dévierai pas. Je ne capitulerai pas.
     
     
    Pascal Décaillet

  • Ukraine : la lucidité, pas la morale !

     
    Sur le vif - Vendredi 24.02.23 - 10.03h
     
     
    De deux choses, l'une.
     
    Ou bien on parle humanitaire, et alors il est évident qu'il faut aider les victimes de la guerre, de toute guerre. C'est l'une des cartes maîtresses de la Suisse, pôle de compétence mondial en la matière.
     
    Ou bien on parle politique. Dans ce second cas, on s'abstiendra de tout jugement moral. On tentera, comme l'historien grec Thucydide dans sa Guerre du Péloponnèse, écrite il y a 25 siècles, d'établir avec rigueur et exactitude les chaînes de causes et de conséquences. Pourquoi tel groupe humain, tel pays, telle nation, fait-il la guerre à un autre ?
     
    Pourquoi cette guerre en Ukraine ? Bien sûr, il y a ce contentieux millénaire entre l'influence russe et le tropisme européen de la partie occidentale du pays. En fonction des époques, les uns dominent, puis les autres. Le flux, le reflux. Ainsi, l'influence germanique sur les pays slaves, proches de la Baltique, depuis mille ans.
     
    Toujours, on tombera sur des intérêts économiques et commerciaux. Maîtrise des matières premières, sidérurgie, sont à considérer, depuis l'Antiquité, comme des clefs de lecture autrement plus performantes que se rallier à la propagande de tel ou tel camp.
     
    Que nous raconte Thucydide ? En soi, l'objet de son discours est austère, lointain, dénué de tout intérêt concernant pour un lecteur d'aujourd'hui, deux millénaires et demi plus tard : il nous raconte la lutte des Cités grecques, les unes affiliées à Sparte, les autres à Athènes. Son style est sobre et dense, il ne joue sur un aucun effet, il examine, il décortique.
     
    Pourquoi son oeuvre est-elle géniale ? Il prend chaque événement, y compris infinitésimal, et le reporte sur un projet d'ensemble : impérialisme économique d'Athènes, ou de Sparte. Il nous décrit comment les séditions sont montées froidement, on se croirait presque à la CIA ou chez M. Kissinger, en septembre 1973, quand ces Messieurs s'occupent du Chili de Salvador Allende.
     
    Ainsi procède Thucydide. Un jeu exceptionnel de dévoilement des apparences, des discours de propagande, des idéologies, pour mettre à nu la vérité crue de la domination économique. C'est en cela qu'il est immense, par sa méthode.
     
    Dans l'affaire ukrainienne, ou plutôt dans le cheminement en influence des Etats-Unis en Europe centrale et orientale, depuis la chute du Mur, nous avons tous besoin du regard de Thucydide. Oublions les discours de propagande, ils en font tous, les gentils comme les méchants, tout belligérant en use, depuis la nuit des temps. Regardons les faits. Ces dizaines de milliards d'armement massés en Ukraine, quelle autre guerre nous préparent-ils ? Quel impérialisme mondial, implanté depuis 80 ans (Sicile, puis Italie, 1943) sur territoire européen, sert-il ? De quelle politique d'expansion à l'Est, depuis 1989, sont-ils l'accomplissement ? Comment cette puissance mondiale, extra-continentale, utilise-t-elle ses "alliés", France et Allemagne, pour une future guerre qui n'est absolument pas la leur, mais la sienne ? Comment les amène-t-elle à la financer, eux, cette future guerre ?
     
    Une partie de l'Europe, notre continent, est en guerre. Compassion pour les victimes, certes. Mais lucidité intellectuelle. Froideur absolue, dès qu'il s'agit de politique. Évacuation de la morale, toujours teintée de la propagande d'un camp, au profit de l'analyse, de la mise en perspective historique, de la recherche des causes économiques, commerciales et financières.
     
    Nous avons besoin d'esprits cultivés, passionnés par les langues et l'Histoire des peuples, analystes, lucides. Pas de donneurs de leçons. Encore moins, de moralistes.
     
     
    Pascal Décaillet
     

  • Pour l'ultralibéralisme, allez voir chez la ministre Verte !

     
    Sur le vif - Jeudi 23.02.23 - 10.52h
     
     
    "Une bonne nouvelle" : les propos tenus ce matin, dans la TG, par la ministre genevoise de l’Économie, pour qualifier l'explosion (les chiffres sont là) du nombre de frontaliers, sont proprement hallucinants.
     
    On croirait lire les paroles d'un ultra-libéral des grandes années, 1995 à 2008, celles du profit à tout prix, et peu importent les peuples, les identités nationales, les frontières.
     
    Il ne s'agit pas ici de nier la nécessité du recours genevois aux travailleurs transfrontaliers. Ni de nourrir la moindre animosité à leur égard. Il ne s'agit pas des personnes. Non. Il s'agit de tenter de comprendre la manière dont cette ministre envisage l'économie, le rôle de l'argent. Il s'agit de cerner son rapport, comme femme politique, au monde du profit.
     
    Où place-t-elle les limites ? En pose-t-elle, seulement ? Autant son collègue Vert a pu, cette législature, surprendre en bien par ses mises en cause de l'expansion à tout prix, de la croissance illimitée, autant la ministre donne l'impression de s'embarquer, avec les ultra-libéraux, dans un voyage sans retour. 2001, l'Odyssée de l'Espace . Le pouvoir aux robots. L'homme ne contrôle plus la machine.
     
    Il faut que cette ministre s'inscrive d'urgence au parti libéral. Dans ses composantes zurichoises, entendez ultra, les gens du Livre Blanc, la croissance sans entraves, les frontières à la poubelle, et tant pis pour les souffrances des résidents genevois, ceux qui chôment, ceux qu'on assiste, les grands oubliés de l'expansion sans limites.
     
    La notion de préférence cantonale, d'abord méprisée par les fatigues patriciennes, certains entrepreneurs trop pressés, et une gauche inculte sur la dimension nationale et patriotique de la citoyenneté, a pourtant progressé, ces quinze dernières années. Et voilà, après ces louables efforts, qu'une ministre Verte vient en bafouer le principe, au nom de l'opportunité d'enrichissement général, par un ruissellement cher au théoriciens de la gauche.
     
    En matière de mobilité, Genève étouffe. Les mouvements transfrontaliers y sont pour beaucoup. On pensait qu'une ministre Verte aurait pu, peut-être, s'en émouvoir. On peine à trouver chez elle la moindre compassion pour le résident genevois, celui de la Ville par exemple, qui a besoin de son véhicule pour ses déplacements au sein de la ceinture urbaine, et que le délire de l'actuel ministre des Transports veut pousser dans le flux périphérique pour aller d'un point à l'autre de la Ville, sans le moindre traitement préférentiel pour son statut de citoyen, de contribuable de la Ville et du Canton, juste là pour la saignée fiscale, engraisser un Etat tentaculaire. C'est cela, la conception de gauche du "ruissellement", à Genève.
     
    Ce que je viens d'écrire, vous le trouverez sous ma plume, et nulle part ailleurs, chez mes confrères. La TG analyse bien les situations, mais demeure toujours d'une effrayante timidité lorsqu'elle signe des commentaires politiques. Le Temps est devenu le catastrophique vecteur des bobos nantis, atlantistes, européistes. La RTS est inexistante sur le plan du commentaire politique. Les journalistes, dans leur écrasante majorité, sont devenus des auxiliaires du pouvoir. Ils ne l'ont pas toujours été. Il s'est donc passé quelque chose, depuis la chute du Mur de Berlin, pour que la situation prenne cette tournure. Une monstrueuse uniformisation de esprits. L'Oncle Sam est passé par là. La paresse intellectuelle, aussi.
     
    Ce que vous venez de lire ici, sous ma plume, s'appelle un commentaire politique. Avec une prise de parti. Un risque éditorial. L'engagement d'un homme, dans la Cité. Chacun de nous en a le droit. Toutes les citoyennes, tous les citoyens. C'est cela, la liberté d'expression. C'est cela, la démocratie.
     
     
    Pascal Décaillet