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Commentaires GHI - Page 67

  • Vassal des Etats-Unis ? Pas question !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 14.09.22

     

    La Suisse serait-elle devenue une colonie américaine ? Ou le 51ème Etat des USA ? Ou un vassal de Washington ? Le PLR suisse, issu du grand parti historique qui a fait la Suisse moderne, le parti radical, et du parti libéral, considère-t-il notre pays comme un dominion de l’Oncle Sam ? Ce parti important, dans la politique suisse de 2022, le PLR, comment peut-il bafouer à ce point notre politique de neutralité, en prônant, comme il vient de le faire, un « rapprochement » avec l’Otan ? Où sont passés les radicaux de 1848 ? Où sont passé les patriotes ? Le PLR, grand parti la droite suisse, entend-il laisser à la seule UDC le monopole de l’indispensable intransigeance, sourcilleuse et ardente, sur notre neutralité, notre indépendance, notre souveraineté ? Le PLR entend-il devenir une succursale du libéralisme mondialisé, apatride, où seuls compteraient les marchés, où nulle frontière, nulle communauté de mémoire à l’intérieur d’un périmètre national, ne seraient plus respectées ? Entend-il devenir le parti de l’étranger ?

     

    Car il ne faut pas jouer sur les mots, comme le font les quelques caciques du PLR suisse, pas nécessairement majoritaires dans leur parti d’ailleurs : le mot « rapprochement » est une insoutenable duperie envers le peuple suisse. Il ne saurait exister de « rapprochement » entre un minuscule pays comme le nôtre, infiniment fragile, et la première puissance mondiale. Car l’Otan, ça n’est pas un club de gentils « Messieurs », toujours là pour rendre service. Non, l’Otan, c’est le club des affidés de Washington. De même que le Pacte de Varsovie fut celui de Moscou. Sauf que ce Pacte, après quarante ans d’existence, s’est auto-dissous après la chute du Mur de Berlin, alors que l’Otan a non seulement continué d’exister, mais n’a cessé de s’étendre en Europe centrale et orientale, jusqu’aux frontières de la Russie.

     

    Les mots du pronunciamiento de ténors (et sopranos) du PLR suisse impliqués dans cette tentative d’arrimage de la Suisse aux amis militaires de Washington sont révélateurs : il ne s’agirait que d’exercices communs, comme cela se fait déjà pour l’aviation, rien de plus. Mais vous voyez, vous, la petite Suisse « manœuvrer » gentiment avec la première puissance mondiale, y compris avec ses forces terrestres, sans donner au monde le signal dévastateur d’une obédience, d’un rattachement, et finalement d’une génuflexion devant le suzerain ? Alors, vous en pensez ce que vous en voulez, chers lecteurs, mais moi, de toute mon âme patriote, de tout mon amour pour ce petit pays, son Histoire complexe et passionnante, son fédéralisme, sa démocratie directe, je dis NON, NON et NON !

     

    La Suisse est une petite fleur fragile. Son existence, dans le concert des nations, est un miracle. Elle doit demeurer amie de tous les peuples du monde. Amie des Américains. Amie des Russes. Amie des Ukrainiens. Elle doit rester, sur la planète, ce lieu de rencontres et de dialogue, au service de la paix. A cela, une condition sine qua non : maintenir son inflexible neutralité. Ne jamais passer dans le camp d’un puissant. Fût-il le dominateur hégémonique et impérialiste du monde.

     

    Pascal Décaillet

  • L'Ecole ménagère

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 07.09.22

     

    Couvrez vos casseroles, vos petits pois chaufferont plus vite. Prenez des douches, et non des bains, vous êtes des citoyens, que diable, et pas des satrapes ramollis. Eteignez les lumières, bande de gaspilleurs, là où elles ne sont pas nécessaires. Ces conseils puissants, qu’un chercheur en sciences sociales de l’Université de Lausanne qualifierait volontiers « d’injonctions », le mot à la mode pour faire le beau au milieu des ploucs, ne viennent pas d’un dialoguiste de la Revue, mais… du Conseil fédéral ! Les sept lumières qui gouvernent notre pays, et ne s’éteignent jamais.

     

    Le Conseil d’Etat genevois n’a pas grand-chose à envier à nos ministres fédéraux dans le registre du paternalisme énergétique. Quant au Conseil administratif de la Ville de Genève, le vieux fond de charité chrétienne qui persiste à gésir en moi depuis mes lointaines années de catéchisme me retient de vous livrer le fond de ma pensée. Vous me traiteriez d’homme cruel. Et vous auriez raison.

     

    Bref, face à la crise, nos gouvernants, que font-ils ? De la stratégie ? De l’anticipation ? De la Blitzkrieg ? De la Ligne Maginot ? Rien de tout cela ! En vérité, ils nous paternent. Ils nous maternent. Ils remplissent le vide de leur programme par des conseils avisés d’Ecole ménagère. Dans l’ombilic de leurs préoccupations, des histoires d’eau, de couvercles, d’interrupteurs. A quand un rapport du Conseil fédéral sur les temps de cuisson ? Je connais un magistrat qui pourrait le rédiger à merveille : les casseroles, il connaît.

     

    Pascal Décaillet

  • La prospérité oui, la surchauffe non !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 07.09.22

     

    Des poussins, derrière la vitre d’une couveuse, qui naissaient en direct, perçant l’œuf de leur bec, sous l’œil émerveillé des dizaines de milliers de passants. J’étais l’un d’entre eux, j’avais six ans. C’était en 1964, l’Expo Nationale de Lausanne. Par deux fois, avec ma famille, nous avions, de Genève, emprunté la toute nouvelle autoroute pour aller nous plonger dans cette Suisse de la croissance, sur les bords du lac, à Vidy. Par deux fois, j’avais adoré. Mon père était ingénieur, partisan du développement des sciences et des techniques. C’était une époque folle : moins de vingt ans après la guerre, la Suisse était prospère, les bébés n’en pouvaient plus de naître, les poussins de l’Expo en étaient évidemment l’allégorie. A six ans, je ne connaissais ni le mot croissance, ni le baby-boom, je n’avais aucune idée de la manière dont j’étais moi-même venu au monde, mais je contemplais l’éclosion des poussins, j’étais émerveillé. C’est mon souvenir le plus fascinant de cette Expo, celui qui a marqué ma conscience.

     

    Tout cela, pour vous parler d’Antonio Hodgers. Le ministre, au cœur de l’été, a eu des mots sur la nécessité, selon lui, de ralentir quelque peu la machine économique genevoise. Chez les libéraux, pas seulement ultras, mais aussi chez des libéraux humanistes, on lui est tombé dessus. Le patron des patrons, à la Rentrée des Entreprises, a rétabli la doxa de la croissance à tout prix. Je ne suis pas un homme de gauche, je suis même sacrément un homme de droite. Mais désolé, la surréaction du patronat en dit plus long sur la dimension dogmatique d’un certain libéralisme, celui qui depuis trente ans ne tolère aucun aménagement au libre-marché. Et, désolé encore, les propos du conseiller d’Etat chargé du Territoire, donc des équilibres et de la qualité humaine de la vie, méritaient autre chose qu’un tel tollé, en guise de chiquenaude.

     

    L’univers intellectuel et philosophique de la droite ne se résume de loin pas, Dieu merci, au libéralisme, comme je l’esquissais ici la semaine dernière. Il existe une droite non-libérale, fraternelle, populaire, patriote et nationale : j’en fais partie. Ses sources sont multiples, il y a une souche catholique (Léon XIII), mais il en est d’autres, du côté d’Emmanuel Mounier, de la Revue Esprit, et d’autres encore. Il ne s’agit pas, de mon point de vue en tout cas, de nier la nécessité de croissance, je suis moi-même un petit entrepreneur, partisan de la concurrence. Il s’agit de trouver des équilibres. Une Genève à un million d’habitants, c’est non. Une Genève surbétonnée, au détriment de la zone agricole, d’espaces de respiration, c’est non. Une Genève surdensifiée, c’est non. Une société humaine n’ayant pour seules valeurs que la croissance économique, oubliant le lien social, la cohésion des âmes, le sentiment d’appartenance à la patrie, c’est non. Ces idées-là, depuis l’adolescence, ont toujours été miennes, y compris il y a trente ans, lors de la folle Révolution néo-libérale. Je ne suis pas un partisan de M. Hodgers, mais désolé : ses propos d’été méritent d’être étudiés. Le débat qu’il a lancé est même passionnant.

     

    Pascal Décaillet