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Commentaires GHI - Page 71

  • Mort de Napoléon ? Le climat, bien sûr !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 08.06.22

     

    Sexe des anges ? Vie après la mort ? Causes de la Grande Guerre ? Affaire du Courrier de Lyon ? Innocence ou culpabilité du Capitaine Dreyfus ? Empoisonnement ou mort naturelle de Napoléon ? Hitler s’est-il enfui en Argentine, dans un U-Boot, fin avril 45, et il aurait vécu encore trente ans comme épicier bio dans un faubourg de Buenos-Aires ? Vous pouvez les lancer sur n’importe quel sujet, les Verts détiennent l’universelle clef d’explication : la transition énergétique. Ces deux mots, ou encore, « urgence climatique », sont l’alpha et l’oméga de tout leur discours. Le « topos », entendez le passage obligé, incontournable. On doit accepter le rite initiatique, accéder par lui à la connaissance. Que nul n’entre ici, s’il n’est géomètre du climat.

     

    Une belle détermination ? C’est une manière de voir les choses. L’opiniâtreté, en politique, est certes une vertu. Mais la focalisation monomaniaque sur un seul thème, dans un domaine éminemment pluriel, peut tout autant se retourner méchamment contre ses auteurs, et finir par détourner une bonne partie de l’électorat. Par effet de fatigue. De saturation. D’exaspération. Or justement, de premiers signaux commencent à poindre, montrant une amorce de lassitude du public. L’ineffable affaire de la consommation de viande interdite aux élus Verts, lorsqu’ils mangent en public (chez eux, à l’abri des regards, ils peuvent baffrer à souhait du Chateaubriand, sauce persillée à la crème), en a été le révélateur le plus éclatant, à la fois tragique et croquignol, désespérant et bouffon. Il a fait hurler de rire la République. Ça fait du bien.

     

    Mais une partie des gens commencent à en avoir marre. Y compris des sympathisants des Verts, partageant le légitime combat de cette famille politique pour le respect de l’environnement. Mais ne supportant plus cette liturgie, ce martèlement répété à l’infini, cette application systématique d’une grille de lecture, une seule, à l’ensemble des politiques publiques. Il n’est pas exclu, dans les dix-huit mois qui viennent, que les Verts reçoivent du peuple l’addition pour ce rapport obsessionnel à certains outils de langage, toujours les mêmes. En termes électoraux, cela pourrait être une soustraction.

     

    Prenez l’Histoire politique, depuis 1848. Il y en a eu, en Suisse, en France, des éruptions monothématiques : le Général Boulanger dans les années 1880, la percée poujadiste aux législatives de 1956, les Ligues de vertu. Nulle d’entre elles n’a duré. Dans la Suisse de 2022, les citoyennes et citoyens sont exigeants. Ils attendent d’un parti politique, pour peu que ces derniers soient nécessaires, une orientation généraliste, ouverte, sur l’ensemble des problèmes de la Cité. Et un catalogue de réponses nuancé, en fonction des objectifs. Le parti des Verts est capable de cet universalisme de pensée, il l’a montré ces dernières années, avec des élus compétents. S’il veut éviter de se voir plumer aux prochaines échéances électorales, il a intérêt à revenir à cet humanisme. Et laisser au vestiaire, ou dans la sacristie, les invocations liturgiques. Laissons-les aux clercs. Soyons dans la Cité, laissons à d’autres les mots du Temple.

     

    Pascal Décaillet

  • La générosité suspecte de quinze roitelets

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 01.06.22

     

    L’argent de l’Etat, c’est l’argent du peuple. Notre argent. Ceux d’entre nous, tout au moins, qui sont soumis à l’impôt : on sait que plus d’un tiers des résidents genevois n’en payent pas, étant sous le seuil pour y être astreints. Oui, c’est notre argent, à commencer par celui des classes moyennes, vous savez ces gens qui se lèvent le matin pour aller bosser, n’ont droit à aucune subvention, sont littéralement pompés par la machine fiscale, triment toute leur vie pour aboutir à une retraite souvent chétive. C’est cela, le lot de dizaines de milliers de personnes à Genève. Cela, dont la gauche ne parle jamais : à la précarité des nôtres, elle préfère le discours sur l’altérité, les modes sociétales, la consommation de viande, la fin du monde.

     

    Donc, nous payons l’impôt. Plus que partout ailleurs en Suisse. Pour nourrir un Etat cantonal dont la dépense publique est la plus haute du pays, par habitant. Cette dépense est régie par un document capital, voté chaque année en décembre (pour l’année suivante) par le Grand Conseil, qui s’appelle un Budget. Tout responsable familial, tout petit entrepreneur, même d’une micro-boîte, sait ce qu’est un budget : on détermine les postes de dépenses, en fonction de ce qu’on possède. A l’Etat, c’est autre chose. On n’a pas les fonds ? Pas de problème ! On en réclame, et on en réclame encore.

     

    En décembre de l’an dernier, le Grand Conseil a refusé de donner un Budget à Genève. La droite a délivré un signal d’économies et de rigueur. L’Etat doit fonctionner, en 2022, avec les « douzièmes provisoires », qui imposent une gestion prudente, respectueuse des deniers publics.

     

    Et c’est là qu’intervient le scandale des quinze roitelets. Qui sont-ils ? Les membres de la Commission des finances du Grand Conseil. Oh, individuellement, des gens très bien, respectables. Mais disposant d’un hallucinant pouvoir, peu connu du grand public : celui d’octroyer (eux, les quinze, sans passer par le plénum, encore moins par le peuple) les ineffables « crédits supplémentaires » que ne manquent pas de leur mendier, à longueur d’année, les sept Départements d’un exécutif d’une gourmandise financière inimaginable, le moindre de leurs appétits n’étant pas celui de la revanche, après le refus du Budget en décembre.

     

    La Commission des finances a un mérite : celui d’informer. Chaque acceptation de crédit supplémentaire fait l’objet d’un communiqué. C’est bien. Mais le fond est souvent écœurant, vu par un simple citoyen-contribuable : à quoi sert le refus du Budget, acte politique majeur, si c’est pour que l’Etat vienne incessamment se servir, par derrière, tout au long de l’année ? Et nos braves roitelets, les quinze, dans l’écrasante majorité des cas, les acceptent, ces crédits ! Le système de la barbichette : si tu refuses les sous pour le magistrat de mon parti, la prochaine fois je refuserai pour le tien. Et la grande hypocrisie perdure : la décision souveraine, en plénum, du refus du budget, est régulièrement court-circuitée, a posteriori, par un procédé opaque et consanguin. Cette pantalonnade ne peut plus durer. Le système soit être réformé. La démocratie, la transparence, doivent s’imposer.

     

    Pascal Décaillet

  • Le roi du zoom

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 01.06.22

     

    Vous organisez un Festival international de cinéma, à Cannes ? Vous présidez un colloque planétaire d’initiés, à Davos ? Pour votre cérémonie d’ouverture, un passage, incontournable : le Président ukrainien. En direct de Kiev, par zoom, dans sa tenue d’assaut version ville, toujours prêt à venir égayer vos hôtes. Qui l’écouteront, ravis, coupe de champagne en main, entre caviar (iranien, surtout pas russe !) et petits fours.

     

    Prenons Cannes. Il est de notoriété publique que l’homme de Kiev est une référence mondiale, en matière de cinéma. Et qu’il a toute autorité pour apparaître sur un écran (il adore les écrans) en introduction de la plus célèbre compétition de films sur la planète. Il connaît tout du traveling, il est le roi du zoom. Robes longues, smokings, décolletés vertigineux, gratin universel : tout s’éclipse lorsqu’apparaît, dans la grande tradition des rituels d’Orient, l’icône. La parole du Maître est oraculaire. On ne se souvient pas trop de ce qu’il a dit, mais foi de coureur de cocktails, il y a de la Pythie delphique dans cet homme-là.

     

    Les chairs dénudées en frissonnent d’extase : je l’ai vu, j’étais à deux doigts de l’écran, tout près de lui. A ce stade, Fatima et Lourdes peineront bientôt à régater : il est celui qui apparaît, délivre quelques mots irrévocables, s’éclipse, laissant l’assistance dans la béatitude. Nous arrivons à juin, c’est le mois du printemps. Vous organisez un mariage ? Vous avez besoin d’un major de table ? Le roi du zoom est disponible. Mais dépêchez-vous, le King est très pris. Il faut réserver, sans tarder.

     

    Pascal Décaillet