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Commentaires GHI - Page 70

  • La folle étreinte avec le macadam

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 02.11.22

     

    Depuis des années, ici même, je dénonce la mode « sociétale » qui envahit le débat public. Et je propose de revenir aux fondements de la politique : l’action sociale, populaire, concrète, au service de tous, et notamment des plus démunis parmi nos compatriotes. Malades, infirmes, personnes âgées aux retraites insuffisantes, jeunes sans emploi, sans avenir, travailleurs pauvres, oubliés de la vie. Je suis pourtant un homme de droite, attaché à la patrie, et justement pour cela je tiens la cohésion sociale pour essentielle : à l’intérieur de notre communauté nationale, on ne laisse personne sur le bord du chemin.

     

    Le « sociétal » : pas question de nier les souffrances de toute une série de minorités dans notre société. Nous devons nous montrer ouverts, égalitaires, fraternels. Vous ne trouverez pas en moi un homme tenant un autre discours que celui de l’égalité entre les humains. J’adresse la même parole, sur le même ton, au plus modeste de nos contemporains qu’à un ministre. Je ne supporte pas l’arrogance sociale, sous prétexte qu’on est mieux nanti qu’un autre, ou qu’on occupe une position plus enviable.

     

    Mais désolé, l’obsession sociétale, en politique, doit être condamnée. Il y a d’autres choses à considérer, dans le domaine public, que cette focalisation abusive sur les questions liées au genre, au sexe, à la couleur de la peau. Non que ces dernières soient inutiles. Mais chez certains, elles ont dévoré toute la place. Plusieurs facteurs y ont contribué. D’abord, la faiblesse de caractère, l’incapacité à la résistance intellectuelle et spirituelle de pas mal de politiques : face à la pression de minorités agissantes, ils ont préféré céder. Pour s’éviter des ennuis, ils ont choisi le sens du vent. De ces gens-là, tous partis confondus, nous n’avons rien à attendre. Ils manquent de solitude. Ils manquent de caractère. Ils sont les montres molles, sur les toiles de Salvador Dali.

     

    Mais l’Empire du Sociétal n’aurait jamais atteint un tel pouvoir sans la responsabilité écrasante des médias. A la RTS, mais aussi dans certains quotidiens, le moindre « activiste », saisi par la lumineuse idée de se coller au bitume, a immédiatement droit à une couverture en direct de son étreinte avec le macadam, suivie de l’interview d’un chercheur en sciences sociales de l’Université de Lausanne, puis d’un commentaire de la rédaction en chef pour peser le pour et le contre de sa folle aventure sur la chaussée. On ne parle même plus des chiens, on tient la chronique des humains écrasés.

     

    Pendant ce temps, le social, on le tait. Solitude de tant d’aînés, modestie de leurs rentes. Manque de formation de nos jeunes. Mépris pour l’apprentissage, pourtant essentiel. Classes moyennes passées à l’essorage. Taux d’analphabétisme, entendez ceux qui lisent laborieusement, syllabe par syllabe, saisissant pour une société moderne. Primes maladie. Fiscalité dévorante. Prix de l’énergie. Prix des médicaments. Mais non, on préfère braquer les projecteurs sur le premier « activiste venu », venu prouver à la rue l’intensité de son adhésion. Pour ma part, fidèle à mes valeurs, je dis : « Le social oui, le sociétal, non ! ». Et vous adresse mon salut.

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Bravo Youniss !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 26 octobre 2022

     

    Il s’appelle Youniss Mussa, il a 25 ans, il veut devenir avocat, il est député socialiste. Et il vient, avec la plus civile des courtoisies, de lancer un amour de petite bombe à fragmentation dans l’univers des camarades. Dans le Temps, puis aux Yeux dans les Yeux, il jette aux orties le socialisme de la morale, de la pensée grisâtre des catéchistes, des interdits, et de la continuelle leçon donnée sur les vertus du Bien.

     

    La Fan Zone Qatar? Youniss n’a rien contre ! Les jeunes ont besoin de se rassembler, de vivre ensemble des moments fédérateurs, de boire un verre. « C’est aussi cela, la cohésion sociale ». La course de motos de Verbois ? Ca pétarade quelques heures, mais ça n’a rien à voir avec le problème structurel du bruit en ville. C’est un moment populaire, pourquoi diable le PS, dressé en Savonarole, devrait-il stupidement se couper du peuple ?

     

    Et puis, il y a le poids des Verts, ces chers alliés, qui thématisent une interdiction possible de la viande, comme si c’était le rôle d’un parti politique. Tout cela, à sa manière, Youniss le dit. Il est pourtant socialiste, jusqu’au bout des ongles, veut justement défendre les fondamentaux historiques du parti. Il cite Chavanne et Grobet, les deux grands socialistes de l’après-guerre à l’exécutif genevois, et il a mille fois raison.

     

    Et ceux de ses camarades qui n’ont jamais entendu parler d’André Chavanne (1961-1985) ni de Christian Grobet (1981-1993), eh bien qu’ils ouvrent des livres d’Histoire, plutôt que de faire la morale à la terre entière ! Cela, ça n’est pas Youniss qui le dit, mais Pascal. Qui vous adresse ses amitiés.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Conseil d'Etat : la dérive autoritaire

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 26.10.22

     

    Pourquoi diable s’embêter à affronter le Parlement, alors qu’on peut gouverner par ordonnances ? Cette question centrale, rêve inavoué de tous les exécutifs du monde, le Conseil d’Etat genevois l’a résolue à sa manière. Par la grâce d’un ministre, celui des Transports, M. Dal Busco. Sur le sujet hypersensible des zones à 30 km/h, le magistrat ne s’est pas embarrassé d’un texte à ratifier par les élus du peuple, il y est allé par la voie d’un arrêté de son Département, et vogue la galère ! En France, cela s’appelle le 49.3 : dans ce pays où le Parlement a toujours été malmené par l’exécutif (sauf sous les Troisième et Quatrième Républiques), c’est l’article qu’on brandit lorsque les discutailleries des députés nous fatiguent. Alors, on promulgue. Certes, on risque la Motion de censure, mais on a préparé ses arrières : on sait que l’Assemblée n’ira pas jusqu’à provoquer la chute du gouvernement. Michel Rocard, entre 1988 et 1991, avait excellé dans cette partie de saute-moutons sur le dos des élus du peuple.

     

    Dans notre démocratie suisse, les choses ne se passent pas comme cela. Le Parlement, à Genève, est le premier pouvoir. C’est lui qui contrôle l’activité du gouvernement et de l’administration. Il peut leur taper sur les doigts, les remettre à l’ordre, notamment dans la Commission de Contrôle de gestion du Grand Conseil. Dans les cas graves, on crée même une Commission d’enquête parlementaire. Malgré ce statut historique du législatif, M, Dal Busco n’a pas craint de gouverner par ordonnance. Ça passe mal. La droite fulmine, notamment le PLR, hors de lui. Sympathique ambiance au sein de l’Entente (existe-t-elle encore ?), à quelques mois des élections !

     

    Le ministre des Transports, au demeurant le meilleur des hommes, n’est pas le seul à se raidir dans l’exercice du pouvoir. La crise du Covid est passée par là, l’exécutif a pris des habitudes, il a exercé un pouvoir d’exception, certains y ont manifestement pris goût. Dire que le Parlement a été mis de côté pendant ces longs mois de pandémie, c’est soulever une évidence. Le plus étonnant n’étant pas, d’ailleurs, les habitudes autoritaires du pouvoir, mais la résignation des députés, semblant trouver normal que la vie politique du Canton, pendant toute cette période, se fût déroulée sans eux. Face à une telle léthargie des élus du peuple, pourquoi les ministres se seraient-ils gênés, après tout ?

     

    Il y a pire. Au Grand Conseil, il arrive de plus en plus souvent que des Conseillers d’Etat se permettent de faire la leçon aux députés, quand ils ne leur passent pas franchement une bordée. C’est totalement inadmissible. Au Parlement, un magistrat n’est pas chez lui. Il est face à la représentation populaire, il lui doit des comptes, il n’est en rien autorisé à la sermonner. Mais le plus surréaliste, c’est lorsque des députés, par groupes entiers, se mettent à applaudir la leçon de morale d’un ministre qui se croit dans son bureau, face à ses subordonnés ! Avec de tels godillots, tout juste bons à servir de groupie à « leur » magistrat, l’arrogance du pouvoir exécutif, à Genève, a encore de magnifiques jours devant elle.

     

    Pascal Décaillet