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Commentaires GHI - Page 63

  • Nous tous, méfions-nous du pouvoir !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 09.11.22

     

    De longues décennies de journalisme politique, avec une passion intacte, comme au premier jour, m’ont appris à me méfier de toutes choses. Me méfier des apparences. Des sourires. Des confidences. Me méfier des mots utilisés par le pouvoir. Et justement, les décortiquer. Un analyste politique doit avoir fait de la linguistique, ou tout au moins se montrer sensible au choix des vocables. Tout pouvoir, quel qu’il soit, règne par les mots. Tel régime autoritaire impose sa terminologie. Tel communiqué annonçant à la population des désagréments choisira des mots doux, pour atténuer la douleur du public. Tel parti en lance comme des slogans : la « famille » pour le PDC, la « liberté » pour les libéraux, la « transition climatique » pour les Verts, les « prestations à la population » pour les socialistes. Ils les jettent au vent, les reprennent au vol, les répètent en incantation, c’est leur méthode, leur liturgie.

     

    Notre rôle à nous, celui de toute citoyenne, tout citoyen, c’est de décrypter les actes de langage du pouvoir. Dès l’école, on doit prendre des textes émanant de gens ayant une emprise sur les autres, ou aspirant à l’avoir. Et on doit, documents en mains (journaux, communiqués, archives audio, vidéos) se livrer avec les élèves à une analyse rigoureuse, impitoyable, des mécanismes de langage du pouvoir. Pas besoin d’aller jusqu’au discours d’un dictateur ! Non, prenons ceux qui exercent la puissance aujourd’hui, tout près de nous : politique, économique, financière, médiatique. Prenons leurs mots, tels qu’ils sont. Lisons-les, écoutons-les, repassons la bande, dix fois, vingt fois. Analysons le rythme, le souffle, les silences, les effets de voix. Dégageons l’intention réelle, sous le masque des apparences. Vous verrez à quel point les élèves sont intelligents, lucides, éveillés à l’idée de travailler avec le matériau du langage, ne pas être dupes. Cet exercice-là, c’est le chemin le plus direct vers la citoyenneté.

     

    Et puis, nous tous, méfions-nous du pouvoir ! De tout pouvoir, d’où qu’il vienne. Celui des hommes. Celui des femmes, qui s’exerce exactement selon les mêmes mécanismes. Celui de la droite. Celui de la gauche. Celui des méchants. Celui (sans doute plus dangereux) des gentils, des souriants, des aimables, des ronronnants. Méfions-nous, comme de la peste, de ces drôles de pendards qui prétendent, le monde ayant évidemment commencé avec eux, « faire de la politique autrement ». Comme s’ils détenaient, eux, la clef magique pour s’affranchir de l’immanente noirceur du pouvoir. Celle qui nous guette tous, dès qu’il nous est loisible d’exercer une emprise sur nos contemporains.

     

    Je vais vous dire : je préfère encore la rude franchise de l’autoritaire assumé à la menteuse bonhomie des gentils. La politique n’est en rien une affaire de morale. Elle est un rapport de forces. Autant le génial historien grec Thucydide, il y a vingt-cinq siècles, que Karl Marx, nous l’identifient ainsi. Lisez ces deux auteurs. Pénétrez-vous de réalisme, voire de cynisme. Soyez lucides : c’est notre seule voie, au milieu de l’universelle manipulation.

     

    Pascal Décaillet

  • La folle étreinte avec le macadam

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 02.11.22

     

    Depuis des années, ici même, je dénonce la mode « sociétale » qui envahit le débat public. Et je propose de revenir aux fondements de la politique : l’action sociale, populaire, concrète, au service de tous, et notamment des plus démunis parmi nos compatriotes. Malades, infirmes, personnes âgées aux retraites insuffisantes, jeunes sans emploi, sans avenir, travailleurs pauvres, oubliés de la vie. Je suis pourtant un homme de droite, attaché à la patrie, et justement pour cela je tiens la cohésion sociale pour essentielle : à l’intérieur de notre communauté nationale, on ne laisse personne sur le bord du chemin.

     

    Le « sociétal » : pas question de nier les souffrances de toute une série de minorités dans notre société. Nous devons nous montrer ouverts, égalitaires, fraternels. Vous ne trouverez pas en moi un homme tenant un autre discours que celui de l’égalité entre les humains. J’adresse la même parole, sur le même ton, au plus modeste de nos contemporains qu’à un ministre. Je ne supporte pas l’arrogance sociale, sous prétexte qu’on est mieux nanti qu’un autre, ou qu’on occupe une position plus enviable.

     

    Mais désolé, l’obsession sociétale, en politique, doit être condamnée. Il y a d’autres choses à considérer, dans le domaine public, que cette focalisation abusive sur les questions liées au genre, au sexe, à la couleur de la peau. Non que ces dernières soient inutiles. Mais chez certains, elles ont dévoré toute la place. Plusieurs facteurs y ont contribué. D’abord, la faiblesse de caractère, l’incapacité à la résistance intellectuelle et spirituelle de pas mal de politiques : face à la pression de minorités agissantes, ils ont préféré céder. Pour s’éviter des ennuis, ils ont choisi le sens du vent. De ces gens-là, tous partis confondus, nous n’avons rien à attendre. Ils manquent de solitude. Ils manquent de caractère. Ils sont les montres molles, sur les toiles de Salvador Dali.

     

    Mais l’Empire du Sociétal n’aurait jamais atteint un tel pouvoir sans la responsabilité écrasante des médias. A la RTS, mais aussi dans certains quotidiens, le moindre « activiste », saisi par la lumineuse idée de se coller au bitume, a immédiatement droit à une couverture en direct de son étreinte avec le macadam, suivie de l’interview d’un chercheur en sciences sociales de l’Université de Lausanne, puis d’un commentaire de la rédaction en chef pour peser le pour et le contre de sa folle aventure sur la chaussée. On ne parle même plus des chiens, on tient la chronique des humains écrasés.

     

    Pendant ce temps, le social, on le tait. Solitude de tant d’aînés, modestie de leurs rentes. Manque de formation de nos jeunes. Mépris pour l’apprentissage, pourtant essentiel. Classes moyennes passées à l’essorage. Taux d’analphabétisme, entendez ceux qui lisent laborieusement, syllabe par syllabe, saisissant pour une société moderne. Primes maladie. Fiscalité dévorante. Prix de l’énergie. Prix des médicaments. Mais non, on préfère braquer les projecteurs sur le premier « activiste venu », venu prouver à la rue l’intensité de son adhésion. Pour ma part, fidèle à mes valeurs, je dis : « Le social oui, le sociétal, non ! ». Et vous adresse mon salut.

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Bravo Youniss !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 26 octobre 2022

     

    Il s’appelle Youniss Mussa, il a 25 ans, il veut devenir avocat, il est député socialiste. Et il vient, avec la plus civile des courtoisies, de lancer un amour de petite bombe à fragmentation dans l’univers des camarades. Dans le Temps, puis aux Yeux dans les Yeux, il jette aux orties le socialisme de la morale, de la pensée grisâtre des catéchistes, des interdits, et de la continuelle leçon donnée sur les vertus du Bien.

     

    La Fan Zone Qatar? Youniss n’a rien contre ! Les jeunes ont besoin de se rassembler, de vivre ensemble des moments fédérateurs, de boire un verre. « C’est aussi cela, la cohésion sociale ». La course de motos de Verbois ? Ca pétarade quelques heures, mais ça n’a rien à voir avec le problème structurel du bruit en ville. C’est un moment populaire, pourquoi diable le PS, dressé en Savonarole, devrait-il stupidement se couper du peuple ?

     

    Et puis, il y a le poids des Verts, ces chers alliés, qui thématisent une interdiction possible de la viande, comme si c’était le rôle d’un parti politique. Tout cela, à sa manière, Youniss le dit. Il est pourtant socialiste, jusqu’au bout des ongles, veut justement défendre les fondamentaux historiques du parti. Il cite Chavanne et Grobet, les deux grands socialistes de l’après-guerre à l’exécutif genevois, et il a mille fois raison.

     

    Et ceux de ses camarades qui n’ont jamais entendu parler d’André Chavanne (1961-1985) ni de Christian Grobet (1981-1993), eh bien qu’ils ouvrent des livres d’Histoire, plutôt que de faire la morale à la terre entière ! Cela, ça n’est pas Youniss qui le dit, mais Pascal. Qui vous adresse ses amitiés.

     

    Pascal Décaillet