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Liberté - Page 578

  • Thuringe : les leçons d'un scrutin

     

    Sur le vif - Lundi 28.10.19 - 05.33h

     

    Avec quelque 24% des voix pour l'AfD et plus de 29% pour Die Linke (gauche radicale), le Land de Thuringe écrit une nouvelle page dans l'Histoire politique de l'Allemagne. La CDU, parti de la Chancelière Merkel, est complètement larguée. Et devient une formation de second plan.

    J'expliquais ici même, avant-hier, les raisons de l'immense colère sociale, confinant parfois au désespoir, dans ce Land de l'ex-DDR, riche d'une culture et d'une Histoire incomparables, que j'ai la chance de bien connaître. Nous sommes sur les terres de Martin Luther, de Jean-Sébastien Bach, des mille feux de Weimar.

    À chaque élection régionale, c'est le même scénario : les deux partis qui ont fait l'Allemagne de l'après-guerre, CDU/CSU (le parti de Konrad Adenauer) et SPD (le parti de Willy Brandt), disparaissent un peu plus dans le paysage politique. Au contraire, une droite plus nationale et une gauche plus radicale émergent, chaque fois plus haut.

    La nouvelle donne politique des Allemagnes, c'est cela. Cette montée inexorable de fronts plus tranchés nous ramène dans une situation beaucoup plus proche de 1919 que des années de quiétude politique de l'après-guerre, lorsqu'il fallait filer doux.

    À partir de là, rien de plus spécieux, rien de plus ridicule, que de crier au populisme, brandir les années trente, prendre les Allemands de haut parce qu'ils voteraient mal. Les habitants du Land de Thuringe n'ont de leçons à recevoir de personne. Ce sont eux qui souffrent de la politique de Mme Merkel, eux qui n'ont ni emploi, ni avenir, ni la protection sociale des années DDR, dont les aînés ont la nostalgie. Ce sont eux qui ont subi de plein fouet les effets de la politique migratoire de l'automne 2015. Eux qui n'arrivent pas à joindre les deux bouts.

    Mais ces gens de la Thuringe, je les connais. Même chez les plus déshérités, demeure un trésor, intime et partagé : l'appartenance à la communauté allemande, la Gemeinschaft. Il leur reste la patrie. Et cela, nulle politique ultra-libérale, nul capitalisme brutalement importé de l'Ouest, nulle déchirure de la cohésion sociale ne pourra le leur ôter.

    Au pays de Luther et de Bach, il existe d'autres valeurs que celles du marché. Il existe la puissance du verbe, et celle de l'esprit. Les Allemagnes ont connu la Guerre des Paysans, le Sac du Palatinat, la destruction totale du pays en 1648 (Guerre de Trente Ans), puis celle de 1945. Mais dans l'ordre du verbe et celui de l'esprit, elles n'ont jamais capitulé.

    Cette nouvelle donne, à chaque élection régionale, tentons de la comprendre en profondeur, plutôt que la juger à l'emporte-pièce. Pour cela, il faut lire et se renseigner. Cela prend des années, des décennies. Cela occupe une vie. Les enjeux de la connaissance passent par le sacrifice du temps et l'énergie de l'esprit.

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Mathias et les huîtres

     

    Sur le vif - Dimanche 27.10.19 - 10.19h

     

    Mathias Reynard : je ne suis quasiment d'accord avec aucune de ses idées. Mais comment ne pas reconnaître chez cet homme, encore si jeune, un tempérament politique de premier plan ? Du courage. De la clarté. De la lucidité dans le combat. Il aurait totalement sa place aux États.

    En cela, même si ses propos récents relèvent d'une atavique fureur à affaiblir l'ennemi "majoritaire", vieille tactique tellement lisible et prévisible, mon illustre homonyme de Martigny n'a, sur le fond, pas tort.

    En politique, aux États plus que partout ailleurs, il faut de puissantes personnalités. Le jeune Saviésan en est une. Taillée dans le roc. Ça nous change du charisme des huîtres. A Genève, nous pouvons envier le Valais d'avoir encore, dans la course à la Chambre des Cantons, des candidats dotés d'une telle ardeur combative.

    Je ne suis quasiment d'accord avec aucune des idées de Mathias Reynard. Mais il fait partie, par son courage et son aptitude au combat, de ceux qui me donnent encore envie d'aimer la politique.

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Seuls, les Verts ne peuvent rien !

     

    Sur le vif - Samedi 26.10.19 - 15.55h

     

    Que nous soyons, dans les quatre ans qui viennent, écrasés de taxes idéologiques, ou non, ne dépend absolument pas des seuls Verts. Aux élections de dimanche dernier, ils ont certes progressé. Mais 28 sièges sur 200, à ma connaissance, ne représentent pas une majorité.

    Donc, notre avenir fiscal, enfer ou non, dépend de qui ? Non des Verts, dont on connaît la chanson. Mais des autres partis du Parlement fédéral, principalement le PLR et le PDC.

    On peut imaginer que l'UDC ne les votera pas, ces taxes. Et puis, on peut supputer que le reste de la gauche, le PS notamment, les votera. Les Verts libéraux, ça dépendra. Bref, le PLR et le PDC, la bonne vieille droite classique, traditionnelle, bien sage et bien présentable, la droite des notables convenables, en costumes et cravates, aura à jouer beaucoup plus qu'un rôle d'arbitre : elle portera la responsabilité des votes.

    Sans ces partis, les Verts, au Parlement, ne sont rien. Sans eux, les taxes sont mortes. Seulement voilà, ces deux partis sont rongés, notamment le PLR, par l'idée de mimer à tout prix le climatisme ambiant. J'ai maintes fois souligné ici, pendant la campagne, à quel point ce petit jeu était perdant, l'électeur préférant l'original à la copie.

    Mais ils sont tombés dans le panneau : plus Verts que les Verts, plus climatiques que le plus apocalyptique des prophètes, ils ont passé leur temps à brasser les thèmes de leurs adversaires, au lieu de traiter en priorité les leurs.

    S'ils continuent, pendant quatre ans, à se laisser tétaniser par ce qui n'aura été que la mode d'un moment, au lieu de se concentrer sur les fondamentaux de leurs propres idéologies politiques, alors non seulement nous aurons les taxes. Mais eux, partis qui ont fait la Suisse, se perdront eux-mêmes. Est-ce là leur dessein ? La balle est dans leur camp.

     

    Pascal Décaillet