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Liberté - Page 1578

  • Madame Meier-Schatz doit tirer les leçons



    Édito Lausanne FM – Jeudi 29.11.07 – 07.50h



    Ils étaient venus rencontrer la presse, il y a quelques semaines, avec de noirs regards de procureurs. La démocrate-chrétienne saint-galloise Lucrezia Meier-Schatz en tête, ils allaient faire tomber Christoph Blocher. Une affaire incroyablement mise en scène, en pleine campagne électorale, relayée à grand fracas par certains médias d’un certain groupe. Sur le plateau télé d’une certaine émission, en Suisse romande, un rédacteur en chef, transmué en procurateur de Judée, annonçait à Christoph Blocher qu’on allait voir ce qu’on allait voir. Le pays entier avait l’impression que les justiciers arrivaient. Zorro était à Berne.

    Aujourd’hui, tout s’écroule. Et cette fameuse sous-commission du National, chargée de faire la lumière sur les prétendus rapports du ministre de la Justice avec le banquier Oskar Holenweger, à Berne, rase les murs. Hier, elle a reconnu des « erreurs de communication ». Elle admet que ce qui a été dit à la presse, ce fameux 5 septembre, n’aurait pas dû donner prise à des spéculations. La présidente de cette sous-commission, Lucrezia Meier-Schatz, aurait dû « communiquer avec plus de réserve ».

    « Communiquer avec plus de réserve » ! Dieu qu’en termes galants, et indulgents envers soi-même, ces choses-là sont dites. Je vois encore l’immense majorité de mes chers confrères embrayer comme au quart de tour sur le thème de Blocher scélérat, de Blocher anti-démocrate, de Blocher traître à la patrie. Et il fallait voir la gravité de leurs visages. Et il fallait lire ces éditos de Pères-la-Morale et de redresseurs de torts. Et un conseiller fédéral, pourtant parmi les meilleurs, allait jusqu’à parler de « Duce » et de « fascisme ». Tout cela parce que la sous-commission de Madame Meier-Schatz n’avait pas « communiqué avec assez de réserve ».

    Oui, dans cette affaire, il y a eu dérapage. Oui, il y a eu instrumentalisation de conclusions erronées et précipitées de la sous-commission, à des fins politiques. Que les ennemis de Christoph Blocher fassent tout pour le faire tomber, c’est la règle du jeu, en politique. Mais qu’autant d’éditorialistes aient pu, à ce point, foncer dans le panneau, c’est un peu inquiétant. Reste qu’aujourd’hui, la présidente de la sous-commission de gestion doit tirer les conséquences politiques de cette affaire. La crédibilité de Madame Meier-Schatz ne lui permet plus de conserver son poste, dans les années qui viennent.



  • Et une gaffe du Conseil fédéral, une!


    Le Conseil fédéral fait très fort, ce matin, dans le texte de la concession qu’il renouvelle, pour dix ans, à la SSR. Il fixe à cette dernière des contraintes en matière de qualité, « afin de garantir qu’elle se distingue clairement des offres commerciales ».

     

    Autrement dit, le gouvernement suisse estime, noir sur blanc, que les radios et télévisions privées produisent, jour après jour, une offre de qualité inférieure.

     

    Les radios et télévisions privées, qui luttent jour après jour pour survivre, faire vivre la culture et le débat citoyen dans leurs régions, apprécieront.

  • Premier automne, premiers nuages



    Édito Lausanne FM – Mercredi 28.11.07 – 07.50h



    D’abord, il y a eu le soleil. Le Roi Soleil. Il est arrivé ce printemps, on n’a plus vu que lui. Tout, alentour, n’était qu’ombre, obscurité, oubli, relégation. Il avait mené campagne pour l’Elysée, l’avait génialement remportée, avait semé ses adversaires comme Federico Bahamontes, l’Aigle de Tolède, ce grimpeur ailé à la triste figure, laissait gésir ses concurrents, épuisés de terrestre pesanteur, loin derrière, dans le mirage des cols alpins ou pyrénéens.

    Oui, Nicolas Sarkozy, ce printemps, s’était senti pousser des ailes. Et, comme dans les grandes batailles, les mythiques, comme à Austerlitz, chaque geste de victoire en enfantait un autre. Et l’armée ennemie qui s’effondrait, et le génie de l’élu pour semer, en face, discorde et trahison. Tant de petits marquis, Kouchner en tête, prêts à la défection, pour une médaille, un titre, le parfum d’un maroquin. Les socialistes ? Sarkozy n’avait plus besoin de les tuer : il se contentait de les engager, à son service. Oui, nulle nécessité de meurtre sur ceux qui ont déjà, entre eux, dans une sorte de grand transfert collectif, mis fin à leurs jours. Sarkozy est un tueur ; mais pas question d’attenter à la paix des morts.

    Et puis, vint l’automne. Et le soleil commença à se voiler. Entre reine et favorites, il y eut comme un mouvement. Mais la disgrâce, comme dans les plus riches heures de Versailles, qui frappe-t-elle le plus durement, qui rend-elle, au fond, le plus malheureux ? Le roi ou la favorite, la légitime exilée, celui qui reste, celle qui s’en va ? Et puis, il y eut ces grèves, et le Soleil, dans son silence, sut reconquérir quelques parcelles de majesté.

    Dans l’immense galerie des Rois, il n’y eut pas que le Soleil. Il y eut, par exemple, son arrière-petit-fils. Quant on commence trop bien un règne, à la Giscard, Il faut, toujours, penser à Louis XV, ce très grand roi en dépit de la noire et tenace légende qui ne veut voir en lui qu’un coureur de jupons. Louis XV, oui, longtemps le Bien Aimé, mais qu’au soir de sa mort, en 1774, on dut conduire clandestinement en sa dernière demeure de Saint-Denis, tant le peuple qui l’avait adulé, s’était mis à le rejeter.

    Et puis, reviennent des mots, soudain, que la grande illusion de ce printemps avait réussi à nous faire oublier : le mot « banlieues », par exemple. Non, Sire, face la réalité des choses, nul souverain n’est épargné. Diable, murmure la plèbe, celle-là même qui t’a fait roi : le vernis de ce printemps commencerait-il – déjà – à fondre ? Oh, il vous reste encore de beaux jours, Monsieur le Président. Il est bien prématuré, bien mal placé d’évoquer déjà le temps de la disgrâce. Mais souvenez-vous, simplement, de Louis XV : le Bien Aimé, le Tout Aimé, et son dernier voyage vers son dernier caveau, la nuit, à la sauvette, vers Saint-Denis.