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Liberté - Page 1568

  • Burkhalter le conquérant



    Édito Lausanne FM – Lundi 14.01.08 – 07.50h



    Il s’appelle Didier Burkhalter, il est conseiller aux Etats du canton de Neuchâtel, radical, c’est un homme apprécié, compétent et courtois. Pourtant, il vient de commettre, vendredi, dans les pages Opinions du Temps, l’une de ces amphigouriques aberrations dont l’actuelle direction de sa formation semble raffoler. Il déclare : « Je suis de l’avis qu’un parti ne devrait pas avoir pour but premier de gagner des électeurs à tout prix ».

    Diable. Je commence à comprendre. La voilà donc, la subtile, la colossale finesse des éléphants du grand vieux parti. La quintessence des tortueux contours de la pensée fulvio-pellienne, densifiée en quelques syllabes par l’un des chouchous des journalistes parlementaires, des gens du sérail, de ceux qui hantent le Palais fédéral, depuis tant d’années, sans en trouver la sortie.

    La phrase de Monsieur Burkhalter me fait penser à ces responsables d’émissions que personne ne regarde ou n’écoute, et surtout dont personne ne parle, et qui nous disent : « Surtout pas de course à l’audience ! ». Sur le fond, ils n’ont peut-être pas tort. Mais est-ce à eux de le dire ? Ne seraient-ils pas plus crédibles s’ils avaient, au moins, donné la preuve par l’acte qu’ils savent parler aux gens, conquérir quelques auditeurs ou spectateurs ?

    Venir d’un parti qui n’a pas franchement brillé dans ces élections fédérales, qui a totalement raté sa communication (alors qu’il aurait de vitales idées d’avenir à faire passer), et venir prôner la relative importance de la conquête des électeurs, voilà qui est assez plaisant. Monsieur Burkhalter est certes un homme de valeur, il m’arrive souvent de l’écouter sur les ondes. Et, tout aussi souvent, de ne saisir qu’à moitié la clarté de son message. C’est sans doute sa recette très secrète pour gagner.

    Gagner devant qui ? La seule ambition, apparemment, de Monsieur Burkhlater, c’est de s’imposer un jour, sans trop tarder, devant ses 245 collègues de l’Assemblée fédérale. Entre initiés, devenir un jour l’élu. Pour cela, en effet, point trop besoin de l’appétit de conquête des cœurs et des âmes du grand public. On fait de la politique entre soi, dans le sérail, comme sous la Quatrième République, dans le seul enclos parlementaire, qui est à la fois chambre d’échos, galerie des glaces et antichambre des ambitions. Avec de tels meneurs, je souhaite bonne chance à ce grand vieux parti qui, faute d’être encore grand, ne semble plus compter que sur quelques zestes de prudente vieillesse pour nous conquérir et nous séduire.


  • La pub ou les birkenstocks



    Édito Lausanne FM – Vendredi 11.01.08 – 07.50h



    Une télévision publique sans pub. C’est l’idée lancée cette semaine, pour la France, par Nicolas Sarkozy. Une idée vraiment très étrange, illustrant soit la totale méconnaissance des vrais mécanismes de l’audiovisuel par le président français, ce qui serait étonnant, soit quelque sourde volonté, de sa part, de se reconstituer un bon vieux fief de sons et de lumières bien à lui, ressusciter l’ORTF.

    Mais laissons la France. Et donnons raison à Gilles Marchand, le directeur de la TSR, lorsqu’il défend avec virulence, ce matin, la présence de publicité dans l’espace public suisse. Il la justifie, notamment, par les appétits des grands groupes étrangers sur un gâteau qui, de toute manière, existera toujours, et Dieu merci, tant qu’il y aura des entreprises désireuses de faire savoir qu’elles existent, et ayant encore un budget pour cela.

    Imaginer, une seule seconde, qu’une télévision serait meilleure sous prétexte qu’elle serait sans pub, c’est vivre dans un autre monde. Le monde d’une télé d’Etat, vivant de l’impôt, donc sous perfusion, toute corrélation entre son inventivité, sa puissance créatrice et ses revenus ayant été coupée. C’est la négation même de l’entreprise, la négation du risque, c’est le retour aux sandales et aux birkenstocks, dans les bureaux.

    Surtout, il faut en finir avec cette idée que la publicité serait le diable. Les annonceurs sont loin d’être des rêveurs. Ils n’ont aucun intérêt à investir en faisant jouxter leurs pubs avec des programmes de mauvaise qualité. Et puis, une chaîne télé, comme un journal, comme devrait l’être aussi une chaîne radio, c’est une entreprise commerciale. L’équipe qui la compose, tous niveaux confondus, doit en être consciente. Elle doit savoir que la vie est un combat, que rien, jamais, n’est acquis. Qu’on peut mourir à tout moment. Elle doit, aussi, connaître et analyser la concurrence, l’affronter, apprendre à gagner.

    Vous connaissez mes positions sur l’existence même, à terme, d’un mammouth de service public en Suisse, faisant financer par la redevance, par exemple, des séries américaines, ce qui m’échappe un peu. Je sais que cette option, pour l’heure, n’est pas majoritaire. Alors, tant qu’existent encore des télévisions publiques, de grâce, donnons leur les moyens d’exister vraiment. En attendant le jour, pas nécessairement si lointain, où une vraie concurrence, rompant avec les décennies régaliennes, permettra à l’audiovisuel suisse de faire émerger les meilleurs, dans la vérité des coûts, la vérité des mérites, la vérité des talents.


  • Parquets et glissades

     

    Chronique parue dans la Tribune de Genève du jeudi 10.01.08

     

    Ca pourrait sonner comme une chanson de Jean Nohain : quand un procureur attaque un autre procureur, que se jettent-ils, d’une hermine l’autre : des histoires de procureurs, of course !

     

    Mais quand ledit procureur, dans toute la perversité du système genevois, se trouve issu d’un parti, les missiles deviennent évidemment politiques. Ca n’est plus une compétence contre une autre, mais une conception de la justice, une vision du parquet. Hier, dans les colonnes du Temps, c’est bel et bien le socialiste Bertossa qui assassine le radical Zappelli. Au fait, on prend combien, pour meurtre avec préméditation ?

     

    J’ai une idée de verdict, pour Monsieur Bertossa : juste un rappel, amical. Que sont certaines affaires russes devenues, qui devaient, nous disait-on, révolutionner le rapport de la justice à l’argent sale ? Cette croisade incantatoire contre les crimes en col blanc, qu’en reste-t-il, aujourd’hui, en termes de résultats concrets ?

     

    Oh, je ne prétends pas que Monsieur Zappelli soit parfait, le parquet est chose trop glissante pour y laisser s’aventurer la perfection du monde. Mais son recentrage sur une criminalité plus prosaïque, certes moins prestigieuse à pourchasser, moins sonore à claironner, a pu rencontrer çà-et-là, quelque succès.

     

    Enfin, la gauche ayant un candidat officiel contre Daniel Zappelli, peut-on espérer que ce dernier prenne le droit de ferrailler lui-même, sans tirs de couverture de la part du Commandeur ?

     

    Pascal Décaillet