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Liberté - Page 1464

  • Brice Hortefeux serait plus heureux au Front national

     

    Sur le vif - Lundi 26.04.10 - 11.15h

     

    Le 2 avril, à Nantes, une femme a été verbalisée pour avoir porté, au volant, un niqab (masque couvrant le visage, sauf les yeux, porté dans certains pays musulmans). Dont acte. Il y a sans doute un article du Code de la route qui exige un minimum de vision latérale quand on conduit. En soi, l’affaire est totalement mineure, et ne présente d’intérêt que pour l’étude du champ ophtalmologique en Loire-Atlantique.

    C’était compter sans Brice Hortefeux. Ministre de l’Intérieur, obsédé par l’idée des récupérer les thèmes sécuritaires – et surtout identitaires – du Front national, ce proche de Nicolas Sarkozy est en train d’instrumentaliser allégrement cette infraction routière pour réécrire l’histoire de Charles Martel et de Poitiers.

    Il est vrai qu’en creusant un peu le pédigrée de l’infortunée conductrice, les choses ne s’arrangent pas : elle serait l’une des épouses d’un polygame, appartenant à une mouvance radicale, et fraudant l’aide sociale. Toutes choses devant à coup sûr être sanctionnées. Il existe, pour cela, des lois. Nul n’en disconvient.

    Mais l’aubaine était trop belle. Dans une lettre aux autorités, et aussitôt remise à la presse, donc adressée en fait à l’opinion publique, le ministre écrit ceci : « Je vous serais très reconnaissant, en outre, de bien vouloir faire étudier les conditions dans lesquelles, si les faits étaient confirmés, l’intéressé pourrait être déchu de la nationalité française ».

    Déchoir un Français de sa nationalité. Oh, je sais, plein de lecteurs trouveront cela très bien, un excellent exemple. Mais savent-ils seulement quels démons historiques la seule évocation de cette mesure vient convoquer ? Ont-ils entendu parler de Vichy ? Des lois d’octobre 1940 ? Je ne doute pas que le polygame fraudeur soit un individu peu recommandable, mais la construction, en l’espèce, d’un bouc émissaire pour faire passer le principe d’une mesure scélérate, est trop évidente pour ne pas être relevée.

    Entre un ministre de l’Intérieur qui serait sans doute mieux dans ses bottes au Front national et un président de la République à bout de souffle, on se dit que notre grand voisin et ami, ce pays qui nous a tant nourris par son Histoire et ses étincelles de Lumières, mériterait mieux. Qui, quoi, je n’en sais rien. Mais mieux, à coup sûr. Parce que 2012, c’est encore très loin.

     

    Pascal Décaillet

     

     

     

     

     

  • Helder, Kenza

     

    Chronique publiée dans la Tribune de Genève - Lundi 26.04.10

     

    Ils étaient là, devant nous, vendredi matin, 7h, en radio, un Alceste portugais, une Célimène voilée. Helder et Kenza. Collégiens de Rousseau, ou d’André-Chavanne, élèves de Marie-Christine Epiney, qui se bat depuis tant d’années pour le théâtre à l’école. Acte IV, scène 3, scène de jalousie, c’est Molière dans la zone industrielle de Carouge, la métrique alexandrine sur fond de marteau-piqueur.

     

    Ils étaient là, et je pensais à Jean Piat, Comédie de Genève, 1973, l’homme grâce à qui je suis tombé amoureux d’Alceste. Bougon, solitaire, franc, sale caractère, jaloux, détestant les mondanités, adorant la poésie. Et, les syllabes d’Helder allant s’évaporant, je pensais à cette pièce qui, à quinze ans, m’avait tant ébloui.

    Helder, Kenza, Clara, Nathalia, et plein d’autres joueront le Misanthrope, dès demain soir, à l’aula du Collège Rousseau. Sans Marie-Christine Epiney, sans les profs d’atelier-théâtre, sans la volonté politique d’encourager les arts chez les jeunes, les vers de Molière leur seraient peut-être restés éternellement étrangers.

    Il y aura aussi Segen au piano, Pierre au chant. Il y aura la sincère Eliante, la prude Arsinoé, il y aura l’envie de faire vivre le verbe. Il y aura des ponts entre les générations, le miracle d’une transmission, et des disciples que le maître invite à s’élever. Cela porte un très beau nom : cela s’appelle l’école.

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Michel Halpérin face à la fille du vent

     

    Sur le vif - Dimanche 25.04.10 - 09.10h

     

    Il aura donc fallu le libéral Michel Halpérin, hier à Berne, pour rappeler, menaçant, que la fusion des libéraux avec les radicaux n’avait rien d’acquis ni d’éternel. Pomme de discorde : l’Argent, celui qui saigne et qui corrompt, cet Argent de Péguy, de Bloy, ces secrets de famille dans l'univers bordelais de Mauriac, cet Argent qui est la vraie ligne de démarcation, au fond, entre un certain radicalisme républicain, redistributeur, industriel, et un certain libéralisme plus financier, plus privé. Plus pudiquement, on dira que les mariés se sont disputés, hier à Berne, sur des questions de politique fiscale. Réduite aux acquêts.

     

    Au moins, Michel Halpérin est clair. Ce brillant avocat défend le secret bancaire, bec et ongles, avec constance et panache. Il est cohérent. Face à lui, je te propose, ami lecteur, de reprendre l’ensemble des déclarations de Fulvio Pelli sur cette question, depuis dix-huit mois. On y verra au mieux de l’adaptation tactique, au pire la métamorphose de cet éminent florentin en fille du vent. Ce qui, jusqu’ici, apparaissait plutôt comme la marque de fabrique de ses anciens adversaires du Sonderbund, qui naviguent aujourd’hui entre nuits blanches et listes noires.

     

    Bref, Pelli est-il encore l’homme de la situation ? De plus en plus critiqué à l’interne, est-il celui à qui les jeunes mariés doivent confier leur destin pour le grand combat d’octobre 2011 ? La question, et pas seulement ici, se pose. Quand on a construit toute sa survie sur les équations de feu d’une mathématique d’ombre, enfanté tant d’inconnues sans jamais les reconnaître, il faudra bien, peut-être, se retrouver un jour devant le principe de calcul le plus largement répandu dans le grand public : l’addition.

     

    Quant à l’avenir du PLR, pour peu qu’il demeure dans une forme non-divorcée, un hasard de mise en page, dans le Matin dimanche d’aujourd’hui, nous en esquisse une solution claire et droite, rafraîchissante, dynamisante. Une solution parmi d’autres, oh juste une idée en passant. Disons une hypothèse, une machine à dissoudre les calculs qui font mal. Une médication qui porterait un nom : Pierre Maudet.

     

    Pascal Décaillet