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Liberté - Page 1063

  • Oui avec le coeur, non avec la tête

     

    Sur le vif - Lundi 27.01.14 - 10.16h

     

    Oui, la Suisse a largement sous-estimé la vague migratoire de ces dernières années, oui il y a problème, mais surtout n’en profitez pas, bande de garnements, pour voter oui le 9 février : voilà ce qu’à sa manière – un rien plus ampoulée – nous dit ce matin le Temps, le journal dont la survie est défendue par toute l’officialité libérale suisse ainsi que les traditionnelles cigales hallucinées des cocktails. Le journal des patrons. Le journal « de l’économie ». Le journal des gens convenables.

     

    Cette rhétorique des opposants, je la décortique ici depuis des semaines : donner (presque) entièrement raison aux initiants sur le diagnostic, mais surtout ne pas leur en donner acte le 9 février. Puisqu’ils sont le diable. Cet argumentaire de sophistes, la quintessence nous en est offerte par mon confère Sylvain Besson, dans l’éditorial du Temps, ce matin : « L’immigration européenne se poursuivra. Dans un pays aussi exigu que la Suisse, les limites de cette croissance se feront sentir tôt ou tard. Le problème n’est pas de la stopper, mais de l’encadrer pour que ceux qui habitent la Suisse aujourd’hui continuent de s’y sentir bien. »

     

    « Le problème n’est pas de la stopper, mais de l’encadrer ». Mais, Cher Confère, c’est EXACTEMENT, LITTÉRALEMENT ce que propose l’initiative. Lisons-en le texte : il n’est pas écrit une seule seconde qu’il s’agisse de fermeture des frontières, mais de régulation des flux migratoires. RE-GU-LA-TION. Tout pays en a le droit. Nos voisins, d’ailleurs, ne s’en privent pas. Les opposants sont comme le Cancre de Prévert : ils disent non avec la tête, mais ils disent oui avec le cœur.

     

    Alors, puisqu’il s’agit « d’encadrer » les flux migratoires (80'000 personnes par an) « pour que ceux qui habitent la Suisse d’aujourd’hui continuent de s’y sentir bien », il existe le 9 février une solution plus droite, plus claire, plus simple et infiniment moins contorsionnée que les postures rhétoriques des opposants : voter oui.

     

     

    Pascal Décaillet

     

  • L'ouest, toujours l'ouest

     

    Chronique publiée dans le Nouvelliste - Vendredi 24.01.14


     
    De mon lointain ouest, j’ignore tout de ce qui se trame en Valais. Oui, je commence par déclarer ici mon incompétence. Mon absence totale de renseignements, et de tout ce qui pourrait ressembler à un réseau, sur les affaires du Vieux Pays. Qu’on veuille bien me considérer comme un insecte infirme, aux ailes et aux antennes arrachées. Le type, dans le vaudeville, qui arrive toujours trop tard, ne saisit rien à l’enjeu, fait rire les acteurs principaux. Un personnage qui n’a même pas de nom : on dit juste de lui qu’il est à l’ouest.


     
    N’ayant plus de sens que pour accéder à l’essentiel, je vois juste deux hommes, l’un d’Orsières, l’autre de Savièse, et contre eux la curée. Deux hommes à abattre. Il se trouve, par hasard, que ces deux magistrats, sous des étiquettes différentes, sont les derniers à incarner ce qu’on appellera, pour faire court, la droite conservatrice. L’un, par son sens de la famille et de la tradition, attaches qui à ma connaissance ne relèvent pas encore du Code pénal. L’autre, parce qu’il appartient à un parti maudit.


     
    Ces deux hommes,  sous la mitraille. Un président de commune qui surgit comme un diable, brandit le droit et la morale. Pour atteindre qui ? Un chef de service, ou son patron ? Un service public audiovisuel qui lance une affaire d’indemnités à rembourser, alors qu’elles ne sont pas dues. On le signifie au public, l’affaire devrait être close, mais non, le média vengeur continue de trouver que moralement, ça pose problème. Vous avez remarqué, le nombre de dossiers, ces temps, où s’invite la morale ?
     


    Chez l’autre magistrat, celui d’un peu plus haut dans la montagne, le périssable observateur que je suis ne peut s’empêcher de se demander à qui profite l’acharnement. Le réflexe premier pourrait être de se tourner vers un vieux, un grand parti, provisoirement en vacance de la République, tout heureux de son nouveau costume d’opposant. Mais bien entendu, cette hypothèse émanant d’un esprit tellement à l’ouest,  il convient de l’écarter. Considérez donc ici que je n’ai rien dit, rien écrit. Je n’ai parlé ni de Catacombes, ni de cagoules comploteuses. Je n’ai pas tenté de chercher à qui ce bruit et cette fureur pouvaient bien profiter. Je suis, pour cela, bien trop éloigné. Bien trop déconnecté. Bien trop à l’ouest. Toujours l’ouest.


     
    Pascal Décaillet

     

  • 9 février : ils disent tous la même chose !

     

    Sur le vif - Lundi 20.01.14 - 10.40h

     

    Dans le Matin, dans le Temps, dans la Tribune de Genève, exactement la même rhétorique. Trois journaux, une seule ligne: celle du Conseil fédéral, du PLR et du patronat. La similitude des arguments est tellement hallucinante qu'elle devrait constituer un cas d'école, à étudier dans les cours de journalisme.


    Dans ces trois journaux, dont deux sont aux mains des mêmes maîtres, et le troisième un peu aussi, que nous dit-on ? Qu'il ne faut surtout pas voter l'initiative de l'UDC, mais qu'elle soulève les bonnes questions. Il ne faut surtout pas la voter, mais il est vrai que la Suisse a un problème avec son immigration. Surtout pas la voter, mais le problème désigné par l'UDC est réel. Surtout pas la voter, mais le Conseil fédéral a tardé à prendre des mesures de compensation en faveur des résidents sur le marché du travail. Surtout pas la voter, mais nos autorités devront aller encore beaucoup plus loin.



    Trois journaux, une seule et même vision. Trois journaux, la même doxa. Trois journaux au service des mêmes milieux. Trois journaux qui n'osent surtout pas s'en prendre au Conseil fédéral, ni au grand patronat. Trois journaux qui nous disent exactement la même chose. Et Nicolas Dufour, dans le Temps, qui se permet, d'une chiquenaude, de traiter de "mesquinerie" la position des partisans. Ils ont raison, mon bon Monsieur, mais ils ne faut surtout pas voter pour eux, car ils sont fondamentalement mesquins. Mais nous, qui sommes des esprits supérieurs, que rien ne peut ravaler à la mesquinerie, nous devons comprendre ce qu'il y a de bon chez ces brutes, sans pour autant leur donner raison.



    Eh bien moi je dis qu'il y en a marre. Marre de cette grisâtre uniformité de la presse en Suisse romande. Et, tandis qu'une formidable Nickellerie Pédestre, emmenée par un ancien conseiller d'Etat genevois, nous promet de sauver le Temps (traduisez, le maintenir en mains bien obédientes, bien patronales et bien libérales), l'heure sonne, au contraire, à la genèse en Suisse romande d'un journal traduisant d'autres valeurs que celle de l'alignement, d'autres postures que celle de la génuflexion, d'autres modèles que celui de l'argent facile et de la spéculation. Et, pourquoi pas, se mettre un peu à l'écoute - la vraie, pas la simulée, M. Dufour - des Gueux et des Mesquins, des Oubliés et des Laissés pour compte.

     

    Allez, disons-le: un journal à la fois conservateur et profondément social, aimant les gens, fuyant les mondanités, joyeux et populaire, où la plume serait reine, l'audace encouragée. Un condensé de noires solitudes et de désespérances, avec entre les auteurs un seul lien: celui du regard assumé, et de l'écriture souveraine.

     

    Pascal Décaillet