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Liberté - Page 1062

  • Populistes ! Et alors ?

     

    Chronique publiée dans le Nouvelliste - Vendredi 27.09.13


     
    « Populisme » : le mot magique. Le mot qui rassure le notable, dans la quiétude de ses certitudes. Le mot qui donne bonne conscience. Celui qui permet de jeter dans la marge les individus, les écoles de pensée, les partis qui vous gênent. Vous demeurez présentable, eux ce sont les Gueux. Vous restez « parti républicain », eux pas. Vous seriez, vous, « gouvernemental » pour l’éternité, eux jamais. Au fond, aujourd’hui, dès qu’un mouvement surgit, sachant parler aux gens le langage qui est le leur, ne censurant ni leurs vrais problèmes ni leurs souffrances, au lieu de tenter de comprendre le succès de ce parti, on se rétracte, on plisse le front, on fronce le sourcil, on prend de grands airs, graves et pénétrés, et on déclare : « Je ne discute pas avec ces gens-là, ce sont des populistes ».


     
    Eh bien je dis qu’on a tort. On ne résoudra jamais rien avec des étiquettes, celle-là n’ayant au demeurant rien d’offensant : ce mot-là, étymologiquement, vient du peuple, il indique une proximité, une clarté, parfois en effet un langage un peu cru, mais enfin il n’est écrit nulle part que la politique ne doive être qu’une affaire de clercs ou de notables, de mandarins pérorant dans un salon, à l’heure du thé et des petits biscuits. Prenez le parti radical : il fut un temps où il avait ce délicieux parfum de cassoulet, d’ail et de vin blanc, quelque chose de mijoté et de fraternel, je crains qu’avec ses nouveaux amis libéraux il ne se soit un peu perdu dans les salons, il le paiera un jour.


     
    Alors, il se défend, le bourgeois raisonnable. Il nous fait toute une leçon sur la différence entre populaire et populiste, une autre sur les vertus cardinales de la démocratie représentative, une troisième sur le droit supérieur, et plus il parle, plus il donne l’impression, non de défendre une vérité, mais un pré-carré, le sien, celui de ses semblables, l’univers des convenables, surtout pas les Gueux. Là aussi, ils ont tort. Parce que le peuple n’est pas dupe. Il est largement assez mûr pour juger si tel parti lui convient ou non, dépasse ou non les bornes, s’inscrit ou non dans un dialogue républicain, mérite ou non de siéger dans un Parlement ou dans un gouvernement. Il n’a pas besoin, le peuple, que les partis concurrents s’époumonent en publicités négatives, diabolisations, ostracisme de tel ou tel mouvement, candidat comme eux aux suffrages des électeurs, nous rabâchant à longueur de journées qu’il s’agit de populistes.


     
    Au fond, ce mot, populiste, est régulièrement sécrété comme une incantation par ceux qui, ayant mal géré la Cité, ayant perdu le pouls de la population, sentent poindre la défaite. Alors, au lieu de se battre dans la campagne, nous parler d’eux-mêmes, de leurs valeurs, ils ne parlent plus que de leurs adversaires. Les noircissant, pourtant, ils les propulsent. Rien ne vaut un mauvais garçon pour distraire le bourgeois. Ne parlons pas de la bourgeoise, les enfants ici nous lisent.


     
    Pascal Décaillet

     

  • Par pitié, du sang neuf !

     

    Sur le vif - Lundi 23.09.13 - 09.37h

     

    L'enjeu des élections, dans treize jours à Genève, est beaucoup plus simple que tous les enfumages que tentent de nous prodiguer les sortants.

     

    Il y a, justement, un pouvoir sortant. Une alliance. Qui fonctionne depuis trois quarts de siècle, et souhaiterait se maintenir quelques millénaires encore, dans la moiteur des cousinages, le partage des postes et prébendes. Alors, pour se maintenir (et sans doute se maintiendra-t-elle, d'ailleurs, tant ses moyens, notamment financiers, ses liens avec un patronat qui stipendie sa campagne, sont considérables), elle nous sort de grands discours, non sur la politique, mais sur la morale, utilisée comme paravent.

     

    Arborant de grands airs sombres et sourcilleux, elle nous balance : "Nous sommes les partis gouvernementaux! ". Ben oui, c'est juste une tautologie, puisqu'ils sont encore, ce lundi 23 septembre, au gouvernement. Comme si on était "gouvernemental" par onction divine, par essence, et non par mandats du peuple, régulièrement renouvelés ! Ils nous disent: "Les autres sont des populistes". Je veux bien. Mais pourquoi eux, sans rien sacrifier à leurs idées, ne sont-ils pas davantage, ces dernières années, allés vers le peuple, justement, avec un langage clair, compréhensible par tous, et non leur jargon de clercs et de juristes ? Cette arrogance de leur communication, parler aux gens d'en haut, comme prêtres en chaire à l'époque du latin, se retournera tôt ou tard contre eux. Les citoyens veulent être représentés par des pairs, non pas une cléricature de mandarins.

     

    La vérité de cette campagne, c'est qu'il y a des sortants qui sont là depuis la nuit des temps, et entendent prolonger à l'infini ce délice nocturne de leur domination, et, comme dans toute démocratie du monde, des gens qui, du dehors, aspirent à entrer. Verts libéraux, par exemple, qui apportent beaucoup de fraîcheur et d'idées concrètes dans la campagne. Mais plein d'autres, aussi. MCG, bien sûr: on vient de passer deux législatures à les traiter de Gueux, on aurait peut-être mieux fait de prêter l'oreille à certaines de leurs revendications, notamment sur la protection de l'emploi local. Ou encore UDC. Ou encore Ensemble à Gauche. Ou encore Pirates. Ou encore PBD. Et jusqu'à M. Jenni, qui sur la mobilité tient un discours autrement solide que celui de la ministre sortante.

     

    Moi je dis que dans les postulants de l'extérieur, soit pour le Parlement, soit pour le Conseil d'Etat, existe dès aujourd'hui une vraie relève. A chacun de faire ses choix, nous verrons bien le 6 octobre. Mais une chose est sûre; continuer comme ce gouvernement calamiteux de la législature 2009-2013, c'est foncer dans le mur.

     

     Pascal Décaillet

     

  • Les bétonneurs et le signal de Bernex

     

    Sur le vif - Dimanche 22.09.13 - 16.14h

     

    Nous nous garderons bien sûr de projeter sur l’ensemble du canton une simple décision du corps électoral de Bernex. Mais tout de même. A peine les députés ayant accepté, en toute fin de législature et pour donner un accessit au conglomérat des sortants, un Plan directeur cantonal qui nous fait miroiter des milliers de logement à l’horizon 2030, voilà que Bernex refuse 178 nouveaux logements à Lully, sur le territoire de la commune. Il s’agissait d’ériger des immeubles sur un terrain occupé par des maraîchers et des villas mitoyennes. PDC, PLR et MCG étaient favorables au projet. L’Alternative bernésienne et l’UDC, pour le référendum. Le peuple a tranché.

     

    Et s’il tranchait un peu plus souvent, le peuple ? Les premiers concernés par la qualité d’un paysage, l’ambition d’un urbanisme, la densité de population, ce sont bien les habitants de nos différentes communes. Parce que ce paysage, ce sont eux, à vie, qui l’auront dans le regard. Cet urbanisme, c’est pour eux et autour de leurs besoins qu’il doit être conçu. La densité de constructions, puis de population, ce sont eux qui vont en apprécier les délices ou en supporter les outrances. En cela, la majorité qui sort des urnes ce dimanche à Bernex, et qui va contre pas mal de notables du lieu, a valeur d’exemple.

     

    Parce que le Plan directeur que nous laissent en héritage les autorités cantonales sortantes, c’est avant tout une pure projection intellectuelle, une pure prospection sur la croissance, et c’est surtout fait pour accorder beaucoup de jouissance et de bonheur aux corporations de la construction et de l’immobilier. Il serait intéressant de demander aux habitants de l’ensemble du canton, ou alors des 45 communes, à l’issue d’un vaste débat populaire, ce qu’ils pensent du Grand Genève de l’horizon 2030, bétonné à l’extrême, juste parce qu’il faudrait accepter comme une fatalité le principe d’explosion démographique. Messieurs les bétonneurs, Bernex nous a donné ce dimanche un signal.

     

    Le Signal, n'est-ce pas une spécialité bernésienne ?

     

    Pascal Décaillet