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Liberté - Page 1056

  • Darbellay, l'éclat de vie du pays

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    Sur le vif - Jeudi 24.04.14 - 09.54h

     

    Dans le Temps de ce matin, énième cogitation sur le putatif isolement de Christophe Darbellay au sommet de son parti. Tout cela, parce qu'à deux reprises, il a été désavoué en Assemblée des délégués. Il y a, dans la presse, une envie de tourner la page Darbellay. Pour quelle autre figure ? Je me le demande bien.



    De tous les partis suisses, le PDC est le plus difficile à diriger. Complexe. Passionnant. Marqué par les Histoires cantonales, leur diversité, leurs 26 singularités. Habité par plusieurs courants, les mêmes depuis plus d'un siècle, jaunes ou noirs, chrétiens sociaux ou conservateurs, urbains ou campagnards, voire montagnards. Paralysé par les hésitations d'alliances, l'obsession de demeurer dans les majorités de pouvoir. Accroché à des thèmes, comme la famille, que d'autres lui ravissent, comme on a dérobé aux Verts l'environnement.



    Et puis, Dieu sait si je suis attaché à la famille, mais désolé, on ne construit pas une politique nationale sur ce seul thème. La famille, même moderne, recomposée, homoparentale, homosexuelle, tout ce qu'on voudra, est certes un passionnant sujet de société, un témoin des mouvements lents de son évolution. Mais elle ne saurait tenir lieu de réflexion nationale prioritaire.



    Il manque au PDC - il lui a toujours manqué - une armature républicaine. Une dimension régalienne, celle des radicaux et des socialistes. Il est trop habité par les sujets de société. Or, si la politique ne doit pas évacuer ces derniers (il faut bien légiférer sur les évolutions), elle ne saurait en aucun cas s'y réduire. Et justement, sur les autres sujets, comme la sécurité, les finances, la fiscalité, la clarté de ligne du PDC, sous la Coupole comme dans les cantons, fait défaut. Il manque à ce parti une dimension d'Etat.



    J'en reviens à Darbellay. Face aux carences structurelles de sa famille politique, son incroyable diversité en fonction des Histoires cantonales, son défaut d'unité, ce diable d'homme a justement été, depuis huit ans, l'homme de la situation. Pour fédérer. Incarner. Représenter. Porter la parole. A part Doris Leuthard, qui l'avait immédiatement précédé, et l'excellent Carlo Schmid, cet Appenzellois intrépide et indivisible, vous seriez capable de m'en citer beaucoup, des présidents du PDC suisse depuis 1971 ?



    Bien sûr, Darbellay n'est pas éternel. Et n'a pas prétention à l'être. Bien sûr, il lorgne sur le Valais et n'en fait nul secret. Bien sûr, les deux désaveux en Assemblée n'ont pas facilité sa tâche. Mais l'homme est là, debout. Il le sera jusqu'à l'ultime minute de sa fonction. Et lorsqu'il l'aura quittée et qu'il sera temps de dresser un bilan, ce parti pourra être très fier de ce président qui aura existé si fort, porté si haut les couleurs, comme on brandit la bannière dans un festival de fanfares, endimanché par le soleil. Dans le commun bonheur d'être ensemble. Quelque part, dans l'éclat de vie du pays.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Magnifique emmerdeur

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    Chronique publiée dans Lausanne Cités - Mercredi 23.04.14

     

    Rien ne m’énerve plus que Jean Ziegler, si ce n’est les gens qui passent leur temps à dire du mal de Jean Ziegler. Cet homme, que je connais et que j’interviewe depuis plus de trente ans, je dis qu’il est un salutaire emmerdeur, un dérangeur nécessaire, l’éruption de nos mauvaises consciences, avec des tonnes de lave et l’incandescence du volcan.

     

    Bien sûr, il est insupportable. Il en fait trop, théâtralise à outrance, exagère le propos, cherche à nous faire oublier ses amitiés avec des dictateurs. Mais voilà, c’est Ziegler, il vient de fêter ses 80 ans, et c’est sans doute un peu tard pour le refaire. D’ailleurs, on ne refait jamais les gens : ils sont ce qu’ils sont, à prendre intégralement, avec leurs qualités, leurs défauts.

     

    Ziegler m’a toujours fait penser à Franz Weber. L’homme des saintes colères, mais l’homme d’une foi entière, bouillante, émue, profondément amoureuse du monde. Chez l’un, c’est le combat pour la justice. Chez l’autre, le combat pour la planète. Chez l’un et l’autre, l’adhésion bouleversée à l’immense chaleur du mystère du monde. Chez ces deux hommes, colériques et un peu cinglés, je perçois de splendides contemporains, de vrais compatriotes. Critiques, imprécateurs, fous de vivre et d’exister. Il en faudrait beaucoup plus, des hommes comme eux, dans le champ si raisonnable de notre petite Suisse.

     

     

    Pascal Décaillet

     

  • Couchepin, la Weltwoche, la lumière d'un journal

     

    Sur le vif - Jeudi 17.04.14 - 14.44h

     

    "Was die Schweiz ist" - Papier de Pascal Couchepin, en pages 13 et 14 de la Weltwoche d'aujourd'hui.

    Le contenu: une réflexion sur les langues en Suisse, leur coexistence.

    Mais l'important n'est pas l'objet du papier. L'essentiel, c'est que la Weltwoche ouvre ses colonnes à Pascal Couchepin, qui ne cesse de démolir au vitriol toute la philosophie politique qui sous-tend la ligne éditoriale de cet hebdomadaire.

    Déjà, la Weltwoche confie depuis longtemps une chronique à Peter Bodenmann, l'ancien président du parti socialiste suisse.

    La grandeur d'un journal, sa puissance, son rayonnement, c'est, en plus d'avoir une ligne éditoriale claire et assumée (de gauche, de droite, d'où il voudra), de s'ouvrir, en les invitant, à d'autres courants de pensée.

    La Weltwoche fait cela.

    La Frankfurter Allgemeine fait cela.

    La Neue Zürcher Zeitung (dans une moindre mesure) fait cela.

    Le Figaro fait cela.

    Je ne suis pas sûr, hélas, de trouver l'équivalent dans la presse de gauche.

     

    Ni même dans nos ineffables quotidiens consensuels de centre droit, en Suisse romande, attirés par le seul parfum du pouvoir en place. Quel qu'il soit, au fond.

     

     

    Pascal Décaillet