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Commentaires GHI - Page 92

  • Le DIP socialiste : pour l'éternité ?

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 08.12.21

     

    Nous avons, à Genève, cinq partis gouvernementaux. Nous en avons cinq, en moyenne, depuis 1961.

    Le DIP a été, depuis 1961, aux mains des socialistes pendant 42 ans : 24 ans sous André Chavanne (1961-1985), dix ans sous Charles Beer (2003-2013), huit ans sous Anne Emery-Torracinta.

    Dans deux ans, à la fin de la législature, le DIP aura été socialiste pendant 44 ans, sur 62.

    44 ans sur 62 ans, cela signifie le DIP socialiste pendant 71% du temps, depuis 1961. L'année de la construction du Mur de Berlin. Alors que nous avons à Genève, depuis cette période, où l’Algérie était encore française, une moyenne de cinq partis gouvernementaux.

    Pendant toutes ces années, de bonnes choses ont été accomplies, et puis d'autres, beaucoup moins bonnes. Dans cette seconde catégorie, il y a le poids croissant de l'Appareil, les affinités électives dans le choix des personnes, une passion démesurée pour la structure. Un pouvoir exorbitant donné aux pédagogues, aux théoriciens. L’idée excessive de faire de l’enseignement une « science », au détriment de toute la part d’instinct, de charisme personnel, qui fait la sève, le crédit, la grandeur du magistère. La confiance aveugle accordée à un institut de recherches interne, qui nous balance des chiffres comme un grimoire nous brandit des formules. Plus récemment, la peur de l’opinion publique. La crainte pour l’image. La loi du silence, dès qu’une affaire éclate. Une trouille verte face à d’éventuelles actions juridiques. Un conformisme hallucinant aux modes de pensée du moment : climatisme, féminisme. Une génuflexion permanente devant tout ce qui ressemble à une doxa de la gauche morale, bienpensante, celle qui édicte le Bien et le Mal, règle l’orthodoxie, instruit le procès des hérétiques.

    Je n’ai donné ici que quelques exemples. Il y en a tant d’autres. L’école est pourtant une invention merveilleuse. La transmission du savoir, entre le maître et l’élève, est un parcours initiatique bouleversant, fondateur. Ceux qui règnent sur le DIP sont donc investis du pouvoir sur un univers fascinant, où doivent régner la joie d’enseigner, celle d’apprendre, la liberté des âmes, la créativité, l’invention, l’innovation. La prise de risque, aussi, d’une parole solitaire face à la puissance d’une majorité. L’école doit être tout, sauf une citadelle de la peur. Hélas, trop souvent, elle l’est devenue. Non à cause des profs ! Non à cause des élèves ! Non à cause des parents ! Mais à cause de la structure ! Sa pesanteur. Son immobilisme. Son conformisme. Sa servilité face aux modes. Son usage de la peur, comme moyen de pouvoir. Sa langue de bois, face au constat du moindre dysfonctionnement.

    44 ans sur 62, soit 71% du temps, aux mains du même parti depuis 1961 : il y a là l’une des clefs d’explication de cet esprit de forteresse, où seule règne la stratégie défensive. L’attaque, la surprise, le mouvement, tout cela dort au fond des innombrables tiroirs de la bureaucratie au pouvoir. On ne règne pas par la peur. Ni par la contrainte. Ni par l’immobilisme. On règne par l’exemple. Par le charisme, Par l’enthousiasme. Désolé, mais aujourd’hui, on en est très loin.

     

    Pascal Décaillet

  • L'Histoire suisse, vite !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 01.12.21

     

    Au-delà de la genèse de nos assurances sociales (lire commentaire précédent), c’est l’Histoire suisse dans son ensemble qui doit être d’urgence mise en avant à l’école. Certains profs le font, hommage à eux. D’autres moins, hélas.

     

    J’ai mis du temps à me passionner pour l’Histoire suisse. Mes passions dévorantes, dès l’enfance, ce sont l’Histoire de l’Allemagne, et celle de la France. Et puis, pendant mes longues années à la Radio Suisse Romande, j’ai eu l’occasion, pour des séries, de me plonger dans le détail de nos 26 Histoires cantonales, d’aller sur place, partout en Suisse, faire des émissions, et surtout de m’immerger dans l’Histoire de la Suisse fédérale. Ainsi, en 1998, pour le 150ème anniversaire du Printemps des peuples, avec quelques collègues, nous avons sillonné le pays, pendant toute une année, avec des émissions en direct, pour établir le lien entre 1798 (la Révolution helvétique) et 1848.

     

    J’invite les profs d’Histoire à passionner leurs élèves pour la grande aventure de la Suisse moderne. L’Etat fédéral. L’industrialisation. Les transports ferroviaires. Les grandes confrontations entre radicaux et conservateurs. Puis, les socialistes, le PAI (ancêtre de l’UDC), les Verts, et le génie de chaque génération qui imprime sa marque, en fonction des défis nouveaux. En vérité je vous le dis : il n’y a strictement rien d’ennuyeux dans l’Histoire suisse. Il suffit d’en dégager les enjeux profonds. Avec des textes, des témoignages. Et les élèves seront passionnés ! Profs, je vous en supplie : enseignez l’Histoire de la Suisse moderne !

     

    Pascal Décaillet

     

  • Profs, enseignez l'Histoire de l'AVS !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 01.12.21

     

    Il faut tenter de s’imaginer la Suisse de 1947. Deux ans après la guerre. L’Europe, tout autour, marquée au fer rouge. L’Allemagne, détruite. La France, sortant de la déchirure des années d’Occupation, puis de l’Épuration, au moment de la Libération. Cette même France, à vrai dire, jamais remise de la défaite de juin 1940, la plus cruelle de son Histoire. L’Italie, en pleine misère. Libérée du fascisme, certes, mais lacérée par une guerre terrible, entre Allemands et Alliés, sur son territoire. L’Italie de l’après-guerre, immortalisée par le génie du cinéma, celui du néo-réalisme, est un pays qui a faim, une terre d’émigration, sans espoir, avant de commencer à renaître dans les années cinquante.

     

    Au milieu de tout cela, la Suisse. Notre pays, certes, n’a pas participé à la guerre. Mais chez nous aussi, les années sont difficiles. Pour une grande partie de la population, la précarité règne. La protection sociale, en comparaison d’aujourd’hui, n’existe quasiment pas. Les personnes âgées rencontrent d’immenses difficultés. Sur le continent, la paix est revenue, mais pas la prospérité. Pas encore ! C’est dans ce contexte sombre que la classe politique arrive enfin à se mettre d’accord sur l’instauration de ce qui deviendra le fleuron de notre protection sociale en Suisse : l’AVS. Il faut bien se rendre compte d’une chose : avant l’acceptation par le peuple (80% de oui) de la loi fédérale sur l’assurance vieillesse et survivants, le 6 juillet 1947, d’innombrables aînés tombaient dans le trou d’un filet social beaucoup trop large. Bien sûr, les retraites existaient déjà, par métiers, par corporations, par conventions d’entreprises, mais tout cela était disparate : un siècle après le lancement de la Suisse fédérale, il fallait un régime national de protection des plus âgés. C’est cela, la grande aventure de l’AVS.

     

    Depuis plus de trente ans, à vrai dire depuis mon arrivée à Berne comme correspondant parlementaire, l’Histoire de l’AVS me passionne. J’ai rencontré d’innombrables témoins de l’époque, à commencer par mes parents, nés en 1920. Mais surtout, je n’oublierai jamais mon émotion, lorsque je suis allé interviewer chez lui à Bâle, avec mon Nagra RSR, en 1993, pour ses 80 ans, l’ancien Conseiller fédéral Hans-Peter Tschudi (1913-2002), immense figure de la Suisse au vingtième siècle, père de trois révisions complètes de l’AVS entre 1959 et 1973. Un socialiste qui s’intéressait encore au peuple ! Cette Histoire de nos assurances sociales, depuis les débuts, dans les années 1848-1914, jusqu’à nos jours, en passant par la Grève générale de novembre 1918, la Paix du Travail (1937), les combats de l’après-guerre sur l’assurance-maternité, et tant d’autres encore, j’encourage nos enseignants à les étudier en profondeur avec leurs élèves, de tous âges. Car cette Histoire de la Suisse moderne, de 1848 à aujourd’hui, est la nôtre. Elle fut celle de nos parents, nos grands-parents. Elle nous concerne, au plus haut point. Parler de l’AVS aux élèves, c’est parler du pays, de ses combats pour la dignité des plus faibles. Ce que notre Suisse, au fond, a de plus grand. Excellente semaine à tous.

     

    Pascal Décaillet