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Commentaires GHI - Page 94

  • Les Gueux sont devenus les suppôts du pouvoir

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 17.11.21

     

    C’est toujours comme ça, avec les mouvements populaires, ou populistes si ça vous plaît de les appeler ainsi : ils émergent, enflamment la République, atteignent des sommets, foutent une trouille d’enfer aux notables, ou aux patriciens fatigués, enfin à tous ceux qui ont pignon sur rue. Et puis, avec le temps, comme dans la sublime chanson de Ferré, va, tout s’en va. Elus au Parlement, ils participent au pouvoir, commencent à avoir leur lot dans les postes et prébendes, goûtent au statut d’officiels, se prennent au sérieux, se disent qu’eux aussi sont des notables, pourquoi pas des notaires, comme dans un autre chef d’œuvre, « Les Bourgeois », de Brel. Alors, ventripotents, ils appellent le Commissaire pour dénoncer les jeunes crétins qui font du chambard, en pleine nuit, sous leurs fenêtres.

     

    Ainsi, le MCG. Ce parti, né des effets pervers de la libre circulation des personnes, mais aussi d’une légitime révolte populaire contre la Genève de la barbichette, celle des libéraux principalement, mais aussi des apparatchiks socialistes, ou Verts, celle des tranquilles PDC, amateurs d’éternité, celle des radicaux logés aux enseignes de lumière, ce mouvement, cette fronde, cette jacquerie, a fait un bien fou à la République de Genève. Ces Gueux, méprisés à leur arrivée, ont secoué le cocotier, balancé la marmite, incendié la sérénité des consciences, plongé le doigt là où ça fait vraiment mal. Boulangistes après l’heure, poujadistes réincarnés, ils ont remué Genève, lui ont signalé de vrais problèmes que toute l’officialité feignait d’ignorer. Ils ont été des lanceurs d’alertes. Oui, le MCG fut salutaire, en ces premières années du troisième millénaire.

     

    En novembre 2021, que reste-t-il de tout cela, dites-le-moi, et là c’est notre troisième chanson, celle de Trenet. Que reste de tous ces Gueux ? Que reste-t-il de leurs folies, leurs manières de mauvais garçons, leurs verres d’eau jetés en plein visage ? Que reste-t-il de leurs imprécations, leurs mauvaises manières, leurs cris de cour d’école ? Que reste-t-il du temps d’Éric Stauffer, funambule de feu sur le fil des limites ? Que reste-t-il de ce temps des colères, sonores certes, mais tellement utiles au réveil de la République ? Le préférence cantonale, slogan méprisé en 2005, et même encore en 2009, par toute l’officialité suave du Canton, est maintenant inscrite dans les consciences. Rien que pour cela, cette prise en compte du périmètre de la communauté d’appartenance, ce parti méritait d’éclore. Hélas, aujourd’hui, le voilà devenu plus sage, plus convenable, plus gouvernemental que les plus ennuyeux des caciques PDC, avec barbichette et costume trois-pièces, dans la plus huppée des Communes. C’est dommage. A force de rentrer dans le rang, on se fond dans la masse, et puis, doucement, on disparaît. Ainsi mourut Vigilance. Ainsi furent submergés les boulangistes. Ainsi périssent les ennemis de la transgression. Ceux qui lui ont préféré le confort.

     

    Pascal Décaillet

  • Ni Suez, ni Panama ?

     

    Commentaire publié dans GHI - 10.11.21

     

    On nous promettait le Pérou, on en est hélas assez loin. Le CEVA, qu’on nous présentait il y a quinze ans comme la huitième merveille du monde, celle qui transfigure le quotidien et se rit des frontières, semble avoir encore quelques progrès à faire pour répondre aux espérances de ces années-folles.

     

    Quelques progrès ? Demandons des chiffres. Quels sont les taux exacts de fréquentation ? Combien de monde, en dehors des heures de pointe ? Nos amis frontaliers le prennent-ils vraiment, ce train-miracle, ou demeurent-ils accrochés au volant de leur voiture ? Quelle fréquentation, le week-end ? Les gares sont-elles des lieux de vie, le commerce y est-il florissant, a-t-on envie de s’y attarder, de s’y donner des rendez-vous amoureux ? Le CEVA est-il un objet de désir ? Est-il rentable ?

     

    Les coûts réels de ce chantier du siècle, quels sont-ils ? Le dernier dépassement, 12,5 millions, est-il le dernier ? Le CEVA, pompeusement nommé « Léman Express » par l’officialité, a-t-il fait prospérer les entreprises locales ? Les adjudications de marchés public ont-elles favorisé les firmes genevoises, plutôt que françaises, voire plus lointaines ?

     

    Ces questions, certains députés se risquent à les poser. Ils attendent vainement les réponses. Tous les chiffres de cette aventure dantesque sont-ils consultables, transparents, à la disposition du public ? Règne-t-il une omerta ? Tout a-t-il été dit, comme il sied en République ? L’affaire est-elle close ? Aucun autre dépassement à attendre ? Ni Suez, ni Panama ? Juste Annemasse, vous êtes sûr ?

     

    Pascal Décaillet

  • Frontaliers : trois fois plus en vingt ans !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 10.11.21

     

    Il y a des chiffres qui parlent d’eux-mêmes : en l’an 2000, il y avait 30'000 travailleurs frontaliers sur Genève ; ils sont aujourd’hui 92'000. En vingt ans, le nombre a triplé. Ce chiffre est terrible, et je vais vous dire pourquoi. En précisant toutefois une chose, très importante : nos voisins français sont nos amis. Ceux qui travaillent à Genève, et que nous croisons tous les jours, participent à notre prospérité. Il ne s’agit en aucun cas d’ériger cette affaire en querelle de personnes, ni en guerre entre la Suisse et la France. Nous avons besoin de travailleurs frontaliers, et ils ont besoin de Genève. Le problème, ça n’est pas le principe des flux quotidiens transfrontaliers, mais leur nombre, devenu tout simplement écrasant.

     

    Dire que le chiffre est terrible, ça n’est pas s’attaquer aux hommes et aux femmes qui viennent travailler chez nous, ils sont nos amis, je le répète. Dire que le chiffre est terrible, c’est s’en prendre non aux humains, mais au chiffre-lui-même, qui est tout simplement dévastateur. De même, vouloir réguler l’immigration vers la Suisse, ça n’est en aucun cas xénophobe, c’est juste vouloir protéger les Suisses, les plus faibles d’entre eux, les plus précaires dans leur statut professionnel, les plus exposés à la concurrence internationale. Réguler, c’est vouloir le salut de la cohésion sociale suisse. C’est, au fond, une affaire des Suisses entre eux, et non des Suisses contre les étrangers. Ceux qui vous disent le contraire, notamment la gauche immigrationniste et (de l’autre côté) les ultra-libéraux déracinés des patries, vous mentent. Entre ceux-ci et ceux-là, quelque part dans le souci de la cohésion sociale la plus puissante possible, s’est toujours tracé mon chemin politique : ni gauche, ni libre-échange ; ni Etat-Providence, ni génuflexion devant la tyrannie des marchés. Pour la Nation. Et pour le social.

     

    Et c’est pour cela que je qualifie de « terrible » le triplement du nombre des frontaliers. Parce qu’il représente, à Genève, l’échec de l’Etat, de l’arbitrage, de la régulation, des équilibres (chers à Delamuraz). Et le triomphe du laisser-faire. D’une libre-circulation chaotique, échappant à toute règle, juste là pour satisfaire les appétits de profit d’un certain patronat. La sous-enchère, à Genève, ça existe ! La préférence cantonale a pourtant progressé, dans les consciences, ces quinze dernières années. Mais dans les consciences, seulement ! Dans les faits, on la laisse dormir au fond d’un tiroir ! Que fait l’Etat pour protéger les résidents genevois ? Que fait-il pour aider nos chômeurs, record de Suisse si l’on compte l’aide sociale ? Que fait-il pour former enfin, sur Genève, du personnel infirmier en nombre suffisant ? Que fait-il contre la sous-enchère ? Comment a-t-on pu laisser à ce point la jungle gagner la guerre, l’Etat capituler, le verbe perdre son crédit ? Et le parti même, à Genève, qui dès 2005, à juste titre, tirait la sonnette d’alarme, que lui reste-t-il de sa fougue, de sa combativité ? Ces questions dérangent ? Eh bien dérangeons !

     

    Pascal Décaillet