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Commentaires GHI - Page 50

  • Jeunes censeurs

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 27.09.23

     

    Autrefois, les censeurs étaient des vieux cons. Aujourd’hui, ils sont jeunes. Hallucinant, chez une partie (heureusement fort minoritaire) de la génération montante, ces Pères-la-Vertu n’ayant qu’une idée en tête : faire taire toute personne ne pensant pas comme eux. C’est tout simplement terrifiant.

     

    J’avais dix ans en Mai 68, je n’aimais pas ce mouvement, n’ayant rien à reprocher à mon école, qui m’ouvrait, m’épanouissait. Mais j’écoutais mes aînés, ceux qui avaient huit ou dix ans de plus que moi, et rêvaient du Grand Soir. A Genève comme à Paris, ils réclamaient la liberté d’expression, se braquaient souvent à juste titre contre d’antiques mandarins. Ils étaient les opprimés, les vieux ronchons en chaires étaient les censeurs.

     

    55 ans plus tard, c’est le contraire. Dès qu’à l’Université, est invitée à s’exprimer une personnalité ne partageant pas leurs convictions sur les questions de genre, de couleur de la peau ou de relecture de l’Histoire, que font-ils, ces Savonarole en herbe ? Ils exigent le silence de l’importun ! « En aucun cas un tel personnage ne doit s’exprimer en nos murs ».

     

    Les censeurs, ce sont eux. Des champions de la gomme, toutes catégories. Ils sont hommes ou femmes d’une parole, d’une version, d’une Croisade, il ne s’agit pas d’y déroger. Terrifiant, oui. Ils sont jeunes, ils ont la vie devant eux, ils se bouchent les oreilles, se voilent les yeux. Ils sont vieux.

     

    Pascal Décaillet

  • Un chef doit réussir. Ou partir.

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 27.09.23

     

    Nous avons, en Suisse, beaucoup trop de retenue, de déférence, mêlées parfois d’une sourde crainte, envers les magistrats exécutifs. Les Conseillers d’Etat, par exemple. Ils ne sont en rien des personnages intouchables, encore moins des « Sages », stupide expression qui pourrait à la limite s’appliquer (et encore !) aux juges d’une Cour suprême, mais en aucun cas aux membres d’un gouvernement. Sages, ils n’ont pas à l’être ! La vertu qu’on attend d’eux n’est pas « d’être » quelqu’un de bien, encore moins un modèle moral, non, c’est d’avoir un objectif, et réussir. Si c’est le cas, c’est bien. Sinon, le ministre doit partir, sans délai. Sans haine de la part des citoyens, sans sentiment de rejet, sans cet océan de « déceptions » qui charrie l’écume de ces sentiments totalement déplacés en politique. Mais partir, oui.

     

    Et puis, ce flot de paroles. Autant les parlementaires sont là pour en découdre avec le verbe (je les convie chaque soir à ce défi), croiser le fer, briller dans la joute des idées, autant le ministre doit se taire. Un Conseiller d’Etat est élu par le peuple, non pour se pavaner « d’être » ministre, mais pour agir. Pour ma part, peu importe qu’il soit sympathique, souriant, sociable, à l’aise dans les cocktails, ce qui compte c’est son efficacité dans l’œuvre. La tâche est ardue, il faut s’imposer face à l’administration, convaincre les parlementaires. Mais enfin, rien ni personne n’a jamais obligé un homme ou une femme à se porter candidat à une charge exécutive. Ceux qui le font recherchent le pouvoir, sont tenaillés par la férocité d’une ambition, fort bien, mais qu’ils assument !

     

    Nous, citoyennes et citoyens, jugeons-les sur leurs résultats, non sur leur vie privée, ni sur leurs qualités sportives, ni leur statut de bons pères ou mères de famille, ni sur leur élévation dans l’ordre de la morale. Ils ne sont pas des anges, ce qu’ils « sont » n’a d’ailleurs aucune importance, regardons ce qu’ils « font ». Ils sont là pour réussir. Sinon, très vite, ils doivent partir. Cela signifie que nous devons en finir avec la sacralisation du temps de législature. Un ministre, ça doit pouvoir gicler quand ça dysfonctionne, sans empoisonner le monde en blanchissant sous le harnais, sous prétexte qu’on ne touche pas à la durée de son mandat. Nous devons inventer des procédures permettant une destitution. Non pour manquement moral, mais, infiniment pire, pour échec dans l’action.

     

    Car nous vivons dans l’hypocrisie. Je passe mon temps à discuter avec les politiques, de tous bords. Que me disent-ils, à longueur d’année, hors-micro ? Quel tel magistrat, à peine élu, est déjà nul, se fait danser sur le ventre par les permanents de l’administration, n’arrive pas à s’imposer. Eh bien, il doit partir ! Pourquoi nous, citoyennes et citoyens, serions-nous condamnés à ces interminables fins de législature, qui rappellent méchamment les portraits de la Cour, à Versailles, par le génial Saint-Simon, dans cette année 1715 où, le Roi-Soleil malade, tout le monde ourdissait autour de lui, mais se taisait en sa présence ? Non, un chef doit réussir. Ou partir.

     

    Pascal Décaillet

  • Taisons-nous !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 20.09.23

     

    Il paraît que c’est tabou. On n’aurait pas le droit d’établir une relation entre pression migratoire et infrastructures qui étouffent, en Suisse. S’y aventurer, ce serait sortir du cercle de ce qui est audible, convenable. Très bien. Alors, taisons-nous !

     

    Taisons les chiffres du solde migratoire en Suisse. Ne rappelons pas aux gens l’augmentation hallucinante de la population suisse, depuis des années. Passons sous silence le relief si particulier de notre pays, avec ce Plateau, coincé entre Jura et Alpes, et déjà vermoulu par ce mitage du territoire que Franz Weber, à juste titre, ne cessait de dénoncer.

     

    Taisons notre vote, il y a quelques années, sur Ecopop, cette initiative vilipendée par toute la classe politique : elle se permettait, l’effrontée, de poser le problème de la démographie en Suisse.

     

    Taisons l’état des routes, vieillissantes. Taisons l’engorgement des chemins de fer, les pannes constantes, les retards. Taisons l’extrême difficulté, pour notre jeunesse suisse, à se trouver un logement. A Genève, c’est alarmant. On construit pour qui ? Taisons cette question, qui pourrait laisser entendre qu’on fait venir des gens qui construisent des immeubles pour… se loger eux-mêmes. Déjà en 1970, cet argument surgissait, dans les débats de bistrots, ou de famille, autour de l’initiative Schwarzenbach. Déjà, la droite patronale le balayait. Alors, silence ! Et bonne sieste à tous !

     

    Pascal Décaillet