Liberté - Page 11
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Métallurgie : agissez ou partez, M. Parmelin !
Sur le vif - Vendredi 15.11.24 - 18.15hEt maintenant, Swiss Steel ! L'autre fleuron de l'acier suisse, à Lucerne, vient d'annoncer 800 suppressions d'emplois. Après Vétropack, à Saint-Prex. Et surtout, après les aciéries de Gerlafingen (SO).La sidérurgie et la métallurgie suisses se meurent, le ministre de l’Économie regarde passer les trains, assis sur un banc ! Normal : bien qu'appartenant à l'UDC, il est en fait un libéral, partisan acharné du libre-échange, un non-interventionniste. Il considère que l'Etat n'a pas à entrer en scène lorsque les choses sont au plus mal. C'est une catastrophe. Cette passivité politique est une honte.Depuis des années, dans mes commentaires, chroniques ou éditos, je réclame la relance volontariste d'une politique industrielle en Suisse. Pas "l'innovation", ce mantra des snobinards lausannois qui passent leur temps à chanter les louanges des "start-ups" accrochées à l'EPFL. Non, une POLITIQUE INDUSTRIELLE ! Une volonté d'Etat, ambitieuse, dynamique, prospective, pour garder dans notre pays ces secteurs stratégiques, pour notre souveraineté, que sont la métallurgie et la sidérurgie.Regardez le débat de GAC que j'ai organisé cette semaine, sur ce thème. A dessein, j'ai invité deux hommes de droite, pour souligner la fracture interne au sein de cette grande famille politique. Le partisan de M. Parmelin, c'était le libéral Vincent Subilia. L'adversaire, c'était le Président de l'UDC genevoise, le paysan protectionniste Lionel Dugerdil ! La voilà, la vraie ligne de séparation des droites suisses. Au sein du PLR, entre libéraux et radicaux. Au sein de l'UDC, entre blochériens et agrariens.L'affaire Swiss Steel, qui tombe comme ça, un vendredi soir, c'est la goutte d'eau de trop. Le vase déborde ! Le politique, en Suisse, doit se réveiller, autour de notre souveraineté industrielle. Et le ministre fédéral de l’Économie, si vraiment l'industrie l'intéresse si peu, doit céder la place à une personnalité plus dynamique, plus inventive. Une personne qui veuille, tout simplement, croire en la politique. C'est le moins qu'on puisse attendre d'un Conseiller fédéral.Pascal Décaillet -
Darius et ses généraux
Sur le vif - Jeudi 14.11.24 - 18.19hVous êtes un général en retraite ? Si vous voulez vous signaler, nul besoin de former quarteron, ni d'aller ourdir un putsch à Alger ! Il vous suffit d'aller chez Darius, qui vous bombardera expert. La gloire vous attend.Voilà des années que, sur une chaîne privée française où règnent la convention, la glorification du macronisme, l'obédience à l'Oncle Sam, le respect des huiles en place, défilent les généraux. L'esprit alerte, les vertus lustrées comme des guêtres sous le soleil d'Austerlitz, la compétence universelle : ils sont ceux qui savent. Ils sont les Généraux du Savoir.Ont-ils brillé, naguère, sur quelque terrain ? Percé les Ardennes ? Franchi la Meuse ? Repris Douaumont ? Ramassé le drapeau, gisant sur le Pont d'Arcole ? Taillé en pièces les Espagnols, à Rocroi ?Sur l'Ukraine, ils savent tout. Des Encyclopédies ! En quelques années, ils ont tout prévu, tout annoncé, tout et son contraire. Ils nous ont promis la prodigieuse efficacité d'une "contre-attaque ukrainienne", on imaginait déjà Manstein au printemps 43, après Stalingrad. On a été un peu déçus. Ils nous ont promis l'effondrement de l'armée russe, pour cause de moral en chute libre. Ce ne fut pas exactement cela. Ils nous ont promis le succès imparable des aides massives, à coups de dizaines de milliards de dollars, de l'Oncle Joe. On attend, encore et toujours.Tous les soirs, donc, Darius tient salon avec ses généraux. Au rapport, Messieurs, pour une nouvelle soirée traversée d'extase par vos éclairs de lucidité !A la Cour du Roi de Perse, le Grand Darius, fourmillaient aussi devins, mages et conseillers. On sourcillait. On fomentait. On ratiocinait. C'était l'Orient, celui de tous les rêves, l'Orient compliqué, l'or, la myrrhe, l'encens, la clef des songes.Merci, Darius. Tant d'étoiles, dans la nuit, celles qui fusent, celles des galons, celles qui filent. Des Étoiles Mystérieuses. Avec leurs armadas de Philippulus. Les Prophètes en toges, accrochés au plus haut mât du navire.Pascal Décaillet -
Bavardages sur le néant
Commentaire publié dans GHI - Mercredi 13.11.24
Il y a quelques années encore, un « chroniqueur » était une plume, ou une voix, qui surgissait de façon régulière, tel jour et à telle heure, pour nous livrer sa compétence, son regard, ses lumières. On l’attendait, on se réjouissait de le lire ou l’entendre. Toute mon adolescence, abonné au Nouvel Observateur, je trépignais de découvrir Delfeil de Ton, ou Jean Daniel, ou Françoise Giroud. Dans les années cinquante, les lecteurs du Figaro brûlaient de savourer le redoutable et souvent vipérin « Bloc-Notes », de François Mauriac.
Depuis une décennie ou deux, le mot « chroniqueur » a dévié. Il désigne aujourd’hui, sur les chaînes privées françaises, un homme ou une femme qui s’en vient faire salon au sein d’une équipe, toujours la même. Et qui salive à donner son avis sur tout, et n’importe quoi. Le chroniqueur n’est plus spécialiste, il est juste fragment de mondanité, paravent de bavardage. Le meneur d’antenne aligne les sujets du jour, on part dans tous les sens, les « chroniqueurs » surenchérissent de rivalité dans le génie du Café du Commerce, et puis on va se coucher.
Rarement l’usage d’un mot n’aura autant été dévalorisé que celui de « chroniqueur ». Ce qui, à l’origine, procédait d’une connaissance intime du sujet, de la finesse d’une plume ou de la qualité d’une voix, s’est proprement liquéfié, jusqu’à devenir bavardages sur le néant. Ça vous convient ? Moi, pas trop.
Pascal Décaillet