Sur le vif - Jeudi 16.03.23 - 14.18h
Il n'appartient en aucun cas à l'Etat d'offrir des abonnements de presse à des citoyens, fussent-ils des jeunes de 18 ans, pour leur souhaiter la bienvenue dans la vie civique.
D'abord, pas un seul centime d'argent public ne doit aller à la presse. Ce sont les deniers des contribuables, c'est notre argent. Comme citoyen, je veux bien que mes impôts financent les grands corps de l'Etat, la Sécurité, la Santé, la Formation, etc. Mais je ne veux en aucun cas qu'ils servent à une intrusion du gouvernement dans le privé. Et en dernier lieu, à la presse !
Que sera ce journal en ligne, lu gratuitement par un jeune, grâce au cadeau de l'Etat ? Il sera, aux yeux mêmes du bénéficiaire, la presse agréée. La presse bien pensante. La presse adoubée par l'Etat. Sous le prétexte qu'elle se contenterait "d'informer" (le mythe du factuel), et pas de commenter, ni d'attaquer cet Etat lui-même, ses ministres, lorsqu'ils dysfonctionnent. Nous avons, je crois, quelques exemples récents.
Bref, la presse gentille. La presse qui nous délivre des commentaires ronronnants, thèse, antithèse, synthèse, l'ennui mortel du pour et du contre, pesés avec le pointillisme granuleux de l'apothicaire. La presse qui fait partie du paysage. La presse institution. La presse jugée digne, par le pouvoir exécutif, d'être l'école de la citoyenneté pour les jeunes de 18 ans. Comme Athènes, dans le discours de Périclès en hommage au morts de Delphes, était décrite comme "L’École de la Grèce" (Thucydide, Guerre du Péloponnèse, II, XLI).
La presse n'est pas là pour être convenable. Elle n'est d'ailleurs pas là pour répondre à une quelconque "mission", dictée par l'extérieur. Ni même par elle-même ! Elle n'a pas à se fixer de buts : méfions-nous des moralisateurs, des élagueurs de toute éclosion de vie. Méfions-nous du journalisme érigé en corporation.
Laissons vivre ceux qui vivent. Laissons écrire ceux qui écrivent. Laissons la voix humaine donner sa pleine mesure. Des fois, ça plaît. Souvent, ça déplaît. La vie qui va, sur une arête acérée, entre le vide et le néant.
Pascal Décaillet