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Commentaires GHI - Page 10

  • Marx n'est pas un étranger en Europe !

     

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 26.03.25

     

    Impossible de comprendre les enjeux européens si on ne s’astreint pas à une ascèse, longue, tenace, continue, sur la connaissance de l’Allemagne. Notre voisin du Nord est le pays le plus puissant d’Europe, première économie du continent, quatrième du monde. Il est, pour la Suisse, le premier partenaire commercial en Europe. Il traverse parfois des moments difficiles, comme l’actuelle situation de son industrie, le vieillissement de ses infrastructures routières et ferroviaires, la paupérisation de régions entières, et pas seulement en Thuringe, en Prusse et en Saxe, l’ex-DDR, mais aussi à l’Ouest. Allez visiter la Ruhr, symbole de la puissance allemande depuis la grande aventure du charbon, il y a deux siècles. Vous y découvrirez des villes certes chargées d’une passionnante Histoire économique, dont elles entretiennent la mémoire avec une bouleversante nostalgie, mais au train de vie bien modeste.

     

    On est très loin de l’image du miracle économique allemand de l’après-guerre, voitures puissantes et rutilantes, prospérité enfin trouvée. Si vous allez dans l’ex-DDR, ce que je vous recommande absolument, vous trouverez une Allemagne simple et digne, aux trésors culturels époustouflants, mais dont le niveau de vie n’a strictement rien à voir avec celui de la Suisse. Oui, il existe des Allemagnes pauvres, certes pas miséreuses comme au début des années vingt, après Versailles, ou au moment de la crise de 1929, mais modestes, oui c’est le mot qui convient, il respire la sobriété, de grandes vertus luthériennes, les quatre décennies marxistes de la DDR.

     

    Faut-il, encore et toujours, rappeler que Karl Marx n’a rien à voir avec l’Europe de l’Est : il est un philosophe allemand, rhénan même, natif de Trèves, sur cette Moselle dont parle si bien Ausone au début du quatrième siècle, Trèves au passé romain (Augusta Treverorum), profondément imprégnée de latinité. Marx n’est pas un Prussien, c’est très important pour le comprendre ! Je le dis depuis toujours : la lecture de Karl Marx, du moins celui du « Manifeste », mais aussi ses écrits de jeunesse dans la Rheinische Zeitung, devrait être obligatoire dans les écoles. Cette œuvre, au-delà des lectures et récupérations que les communistes de pouvoir ont pu en faire au vingtième siècle, n’en demeure pas moins un moment essentiel de la conscience sociale européenne, lors de Révolution industrielle. Marx n’est pas un étranger en Europe : il est une part de notre Histoire. Elle doit être connue de tous. J’invite les profs d’Histoire, les profs d’allemand, les profs d’économie, à se sortir un peu de cette damnation de la mémoire de Marx, née de la chute du Mur (1989), et entretenue par plus de trois décennies de crétinisme ultra-libéral, au nom de la « victoire définitive du capitalisme ».

     

    Vous ne comprendrez pas l’Europe sans passer par l’Histoire allemande. Une telle ascèse n’est ni un luxe, ni un dada : c’est une nécessité vitale, épistémique, pour tenir les clefs de compréhension. Et si Marx vous fait peur, il vous reste Luther, Beethoven, Richard Strauss et Thomas Mann : il y a pire, comme compagnie, non ?

     

    Pascal Décaillet

     

  • 45 passions communales

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 19.03.25

     

    Deux mois et demi de débats, de duels politiques, de défilés de candidats, en vue des Municipales du 23 mars ! Il en ressort une petite musique : nos Communes ont besoin d’être davantage écoutées par le Canton ! C’est valable en tous domaines, mais d’abord dans l’aménagement du territoire. C’est le domaine, avant tous les autres, où nos 45 Communes souffrent d’un jacobinisme territorial, hérité de la présence française (1798-1813), où le Préfet, d’en-haut, dictait sa loi. Nos Communes genevoises méritent mieux.

     

    Pour le reste, nos 45 vies communales ont beaucoup de points communs. Elles respirent la proximité. Le besoin d’engagement. Le souci du bien public. Et tout cela, pour un républicain, fait tellement plaisir à voir ! Siéger dans un délibératif communal constitue un engagement parfois austère, sur des domaines exigeant le sens du concret, celui de la précision, du travail dans l’ombre. Saluons, tous partis confondus, ceux qui acceptent cette ascèse.

     

    La Commune, c’est aussi aller vers l’autre. Le premier échelon de la vie sociale. Dans mes innombrables débats, je crois bien que le mot « crèches », ou que le mot « aînés » ont été les plus prononcés ! Nos Communes doivent avoir la plus grande autonomie possible en matière sociale.

     

    Pour le reste, bonne chance à tous, sans exception ! Et bravo pour votre engagement ! Vous, candidats, vous êtes la sève de notre vitalité républicaine.

     

    Pascal Décaillet

  • Au coeur de tout, la passion pour la Cité !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 19.03.25

     

    Quarante ans de journalisme. Des décennies de combat pour la politique. Non pour une faction en particulier, mais pour la politique, en elle-même, au sens le plus noble : celui de la Cité. De longues années d’émissions politiques à la radio, dont bien sûr Forum, dont j’ai été le producteur il y a 25 ans. Puis, depuis 19 ans, Genève à Chaud. Il y a là une continuité : celle d’organiser, infatigablement, contre vents et marées, contre la mode du « sociétal », contre le consumérisme, des émissions consacrées à la politique. En Suisse, du dehors, c’est souvent perçu comme austère. Les sujets de votations, sur la brochure, sont illisibles, truffés de mots complexes, on édifie mille barrages pour que le peuple n’y comprenne rien ! Le journaliste politique, lui, prend exactement la même substance, et tâche de la présenter au plus grand nombre, en termes clairs, pour que tout le monde saisisse les enjeux. Se sente concerné. Et finalement, aille voter. Il est au service de la Cité. Au service de la clarté. De la transparence. De l’implication citoyenne.

     

    Surtout, j’ai choisi, il y a très longtemps, avant même le lancement de Forum, de donner la parole aux politiques. Ça n’allait pas de soi ! « Tu vas ennuyer tout le monde, avec tes débats parlementaires au Palais fédéral, la Suisse est austère, oublie-la, monte à Paris ! ». Nous n’étions que quelques-uns, une poignée, il y a 35 ans, à nous battre pour mettre dans l’arène la politique suisse. Les sujets « société » commençaient à faire fureur, à quoi bon infliger aux gens la vie de la Cité ! Eh bien non, non, et non : nous nous sommes battus, comme des lions, dans la Berne fédérale et dans les Cantons, pour que les enjeux citoyens concernant les Suisses eux-mêmes soient traités en priorité ! Au fond, nous reprenions, à l’oral, le si beau combat d’un Jacques Pilet, quand il a lancé l’Hebdo, en 1981. Il me semble tout de même que la mission première d’un journaliste est d’agir sur le terrain où il habite, où vivent sa famille, ses amis, de façon à démêler des enjeux de proximité, faire tomber des masques familiers, éclairer des enjeux cachés, bien souvent économiques. Après cela, si on veut aller au Congo, au Laos ou au Nicaragua, chacun vit sa vie, chacun est libre.

     

    Je vais vous dire une chose. Persister, comme je le fais, à mener des émissions politiques, en invitant des hommes et femmes politiques, ne va pas de soi, aujourd’hui. Regardez les chaînes privées parisiennes : un chef de meute (rôle qu’au demeurant, je sais parfaitement tenir), au milieu d’un cénacle de « chroniqueurs », toujours les mêmes. On ne s’embarrasse pas d’inviter des politiques. On cause entre soi, on pérore, on s’engueule pour faire monter l’audience. On ne prend jamais de thèmes de fond, austères, économiques. On fait juste défiler les deux ou trois sujets polémiques du jour. Et le tour est joué ! C’est une conception du métier. Ça n’est pas la mienne. J’aspire à d’autres horizons, de citoyenneté partagée et de passion commune pour les intérêts collectifs.

     

    Pascal Décaillet