Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Commentaires GHI - Page 77

  • La vie privée, ça existe !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 15.06.22

     

    De quoi, au fond, la politique doit-elle s’occuper ? Depuis ma jeunesse, je planche sur cette question, fondamentale. Et je fais partie d’une école de pensée, une philosophie politique, qui lui apportent une réponse précise, cadrée, où demeure la césure capitale, celle de ma génération, entre vie privée et espace public. Aujourd’hui, cette séparation s’estompe, jusqu’à parfois se diluer. Je le regrette infiniment. Eh oui, on a parfaitement le droit de déplorer le cours des choses, ne pas s’ébahir devant toute mode, toute évolution, toute jeunesse. Le droit d’affirmer les valeurs de son âge, ses lectures, ses passions, ses admirations. Mes références s’appellent Charles de Gaulle, Willy Brandt, Pierre Mendès France. Je les assume. Je les emporterai avec moi, dans l’autre monde.

     

    Alors, où place-on la limite du champ politique ? Là aussi, j’apporte une réponse qui pourra déplaire à certains jeunes (pas tous), je respecte leur position, j’énonce la mienne. Lecteur d’Aristote, je note que la politique est l’affaire de la Cité. Entendez l’espace public, avec des institutions, un droit de vote accordé à certains, et non à d’autres, des citoyennes et des citoyens libres, de qui tout procède (là, j’en suis déjà au système suisse). Dans ce champ, nous avons à décider, tous ensemble, des affaires concernant les intérêts supérieurs d’un Etat. En statuant, non sur toutes les choses de la vie, mais sur quatre ou cinq priorités publiques, touchant à l’indépendance du pays, sa souveraineté, la sécurité nationale, celle des personnes et des biens, les assurances sociales, la solidarité, les systèmes de santé, les retraites, la formation, les grandes infrastructures, les choix énergétiques. J’ai presque tout dit. Et, pour ma part, je m’en tiens à cela.

     

    Autrement dit, je n’inclus pas dans le champ politique tout ce fatras de préoccupations privées, familiales, alimentaires, toutes ces questions liées au genre, qui envahissent l’espace public depuis quelques années. Non qu’il faille les taire. Mais ces sujets « de société » ont pris une telle importance dans les débats qu’ils éclipsent la finalité même de la politique, qui se définit autour d’un Etat, d’une nation, de ses intérêts vitaux à préserver. Ces mots-là vous semblent datés ? Vous avez tort. La paix ou la guerre, la victoire ou la défaite, l’indépendance ou la sujétion, tout cela existe, l’Histoire la plus récente nous le rappelle. Survivre comme nation, comme communauté humaine libre, n’est pas garanti. Et dépend de nous seuls. Le jour venu, seule compte la cohésion nationale, tous les mirages de facilité s’évanouissent.

     

    Dans ces conditions, on comprendra que mes attentions intellectuelles soient davantage magnétisées par la question centrale de l’Etat et de la nation, que sur le mode de vie alimentaire, carnivore ou végétarien. Cela n’a tout simplement rien à faire dans le débat politique. Ma position personnelle, sur la question, aurait d’ailleurs de quoi vous surprendre. Mais justement, je la garde pour moi. Et pour mes quelques proches.

     

    Pascal Décaillet

  • Hors-sujet

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 08.06.22

     

    Le piratage de tout discours par la récurrence virale de mots-valises, du style « urgence climatique », ou « transition énergétique » sévit, hélas, au plus haut niveau de la politique genevoise. Chez une personne intelligente et respectable, Mme Fischer, ministre cantonale de l’Economie. C’est dommage, infiniment : les lumières de l’esprit méritent mieux que de s’accrocher désespérément aux mêmes outils lexicaux, toujours recommencés.

    Dernier exemple en date, la fameuse interview de la magistrate, dans la Matinale radio de la RTS, ce mardi 31 mai. On en a tous retenu l’annonce en direct, par mes confrères, de la fusion Firmenich-DSM, et la Conseillère d’Etat qui affirmait ne pas être au courant. Fort bien. Mais l’essentiel, au fond, n’est pas là. Il est dans la grande interview elle-même, quelques minutes auparavant.

    En un mot, mes confrères et sœurs tentent d’obtenir de la ministre des priorités motrices, enthousiasmantes, pour relancer l’économie genevoise. Las ! Tout le dispositif argumentaire du Conseil d’Etat genevois se trouve réduit, dans la réponse, à la seule question de la « transition » écologique.

    On veut bien que les entrepreneurs genevois fassent un effort dans ce sens. Mais diable ! Ils ne se lèvent pas, le matin, dans la seule jouissance d’aller poser des panneaux solaires sur les toits de leurs boîtes. L’essentiel de l’économie, la raison première d’une entreprise, la sève de l’aventure, ça n’est pas de faire Vert. A cet égard, le discours monothématique de la ministre apparaît comme terriblement décevant. Réducteur. Et, finalement, hors-sujet.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Mort de Napoléon ? Le climat, bien sûr !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 08.06.22

     

    Sexe des anges ? Vie après la mort ? Causes de la Grande Guerre ? Affaire du Courrier de Lyon ? Innocence ou culpabilité du Capitaine Dreyfus ? Empoisonnement ou mort naturelle de Napoléon ? Hitler s’est-il enfui en Argentine, dans un U-Boot, fin avril 45, et il aurait vécu encore trente ans comme épicier bio dans un faubourg de Buenos-Aires ? Vous pouvez les lancer sur n’importe quel sujet, les Verts détiennent l’universelle clef d’explication : la transition énergétique. Ces deux mots, ou encore, « urgence climatique », sont l’alpha et l’oméga de tout leur discours. Le « topos », entendez le passage obligé, incontournable. On doit accepter le rite initiatique, accéder par lui à la connaissance. Que nul n’entre ici, s’il n’est géomètre du climat.

     

    Une belle détermination ? C’est une manière de voir les choses. L’opiniâtreté, en politique, est certes une vertu. Mais la focalisation monomaniaque sur un seul thème, dans un domaine éminemment pluriel, peut tout autant se retourner méchamment contre ses auteurs, et finir par détourner une bonne partie de l’électorat. Par effet de fatigue. De saturation. D’exaspération. Or justement, de premiers signaux commencent à poindre, montrant une amorce de lassitude du public. L’ineffable affaire de la consommation de viande interdite aux élus Verts, lorsqu’ils mangent en public (chez eux, à l’abri des regards, ils peuvent baffrer à souhait du Chateaubriand, sauce persillée à la crème), en a été le révélateur le plus éclatant, à la fois tragique et croquignol, désespérant et bouffon. Il a fait hurler de rire la République. Ça fait du bien.

     

    Mais une partie des gens commencent à en avoir marre. Y compris des sympathisants des Verts, partageant le légitime combat de cette famille politique pour le respect de l’environnement. Mais ne supportant plus cette liturgie, ce martèlement répété à l’infini, cette application systématique d’une grille de lecture, une seule, à l’ensemble des politiques publiques. Il n’est pas exclu, dans les dix-huit mois qui viennent, que les Verts reçoivent du peuple l’addition pour ce rapport obsessionnel à certains outils de langage, toujours les mêmes. En termes électoraux, cela pourrait être une soustraction.

     

    Prenez l’Histoire politique, depuis 1848. Il y en a eu, en Suisse, en France, des éruptions monothématiques : le Général Boulanger dans les années 1880, la percée poujadiste aux législatives de 1956, les Ligues de vertu. Nulle d’entre elles n’a duré. Dans la Suisse de 2022, les citoyennes et citoyens sont exigeants. Ils attendent d’un parti politique, pour peu que ces derniers soient nécessaires, une orientation généraliste, ouverte, sur l’ensemble des problèmes de la Cité. Et un catalogue de réponses nuancé, en fonction des objectifs. Le parti des Verts est capable de cet universalisme de pensée, il l’a montré ces dernières années, avec des élus compétents. S’il veut éviter de se voir plumer aux prochaines échéances électorales, il a intérêt à revenir à cet humanisme. Et laisser au vestiaire, ou dans la sacristie, les invocations liturgiques. Laissons-les aux clercs. Soyons dans la Cité, laissons à d’autres les mots du Temple.

     

    Pascal Décaillet