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  • Et la poudre aux yeux, ça rapporte ?

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 14.04.21

     

    Vous connaissez mon opposition viscérale à toute forme de dette, j’en ai déjà parlé ici. Cela me vient de mes quinze années d’expérience comme petit entrepreneur : ne rien devoir à personne, jamais. Ne pas acheter de matériel, ni se lancer dans un quelconque projet coûteux, si on n’a pas, antérieurement, économisé les fonds nécessaires. C’est une conception prudente de l’économie, peut-être même timorée, j’en suis conscient. Mais je tiens la tenue du budget d’un Etat pour comparable à celle d’une famille : on dépense ce qu’on a ; si on n’a pas, on s’abstient.

     

    Hélas, nos édiles ne voient pas exactement les choses comme cela. Ils dépensent, dépensent, et dépensent encore. Ils nous produisent des budgets déficitaires, creusent la dette, au point que cette dernière devient vertigineuse. Il faudra des décennies pour la rembourser, c’est un cadeau empoisonné légué à nos enfants. Aujourd’hui, les taux d’intérêt sont favorables, mais demain ? Comment notre classe politique peut-elle se montrer à ce point irresponsable ? Elle joue avec les deniers des contribuables. Notre argent, le fruit de notre travail, de notre sueur ! Elle dilapide, et il faudrait la laisser faire sans réagir.

     

    Pire : elle tente de nous entraîner dans son sillon maléfique, en nous brandissant, à longueur de débats, le prétendu distinguo entre « la mauvaise dette » (celle qui touche le fonctionnement de l’Etat), et la « bonne dette » (emprunter pour investir). Du coup, le mot « investissement » devient un vocable magique, un mantra. Peu importe qu’on se lie les mains face à un créancier (les banques qui prêtent à l’Etat, il faudra bien un jour en parler, de celles-là), pourvu que ce soit dans le dessein salvateur de « l’investissement ». Le seul mot, brandi dans un débat économique, est réputé définitif, comme un coup de marteau final à l’issue d’une sentence. « Investir » nous est présenté comme la vertu suprême, celle qui lave du péché : le miracle baptismal.

     

    Dans ce petit jeu où la langue nous piège, soyons attentifs, pour prendre un exemple au hasard, au discours des Verts. Ils commencent par nous parler anglais : « Green New Deal ». Une louche de poudre aux yeux, une petite référence au grand Roosevelt, pour nous dessiner, en pure théorie, en pure spéculation, sans la moindre garantie, des chœurs symphoniques de lendemains qui chantent. Des milliards pour la rénovation et l’isolation des bâtiments, par exemple, tout cela sur engagement massif de l’Etat, sur la base d’emprunts à on ne sait quelle banque, charge au contribuable (et à sa progéniture) de rembourser un jour ces sommes colossales.

     

    Ce discours-là, c’est exactement celui qui fait mode auprès de nos élites de gauche, à Genève. Et ça tombe bien : ils ont, pour deux ans, la majorité au Conseil d’Etat ! Le Parlement aura-t-il le cran de s’opposer à cette chansonnette de perlimpinpin ? Comprendra-t-il qu’il représente le peuple, les contribuables, et qu’un minimum de rigueur et de raison s’impose, si on veut éviter la catastrophe ? On peut rêver ! C’est l’un des derniers droits qui restent aux classes moyennes, ponctionnées jusqu’à la moelle. Excitant, non ?

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • La capitale du monde, c'est Munich. Pas Berlin.

     
    Sur le vif - Mardi 13.04.21 - 10.19h
     
     
    Quand on pense Bavière, on pense catholicisme. C'est un tort. La Bavière est certes à majorité catholique, mais tout le Nord du pays bavarois est fortement imprégné par la Réforme, notamment la Franconie moyenne (Mittelfranken) et la Haute-Franconie (Oberfranken), régions que j'ai la chance de bien connaître : elles jouxtent par le Sud le Land de Thuringe, temple vivant de la religion luthérienne.
     
    Mais c'est ainsi : l'image première de la Bavière, ce sont Munich, les Châteaux de Louis II, les lacs sublimes qui se reflètent dans les Alpes, à la frontière autrichienne. J'y ai passé encore quelques jours l'été dernier, de retour d'un séjour en ex-DDR. Il est vrai que le tableau est saisissant.
     
    J'ai déjà abordé, dans ma Série Allemagne en 144 épisodes, le cas, si particulier et passionnant, de "l'Etat libre de Bavière", la région d'Allemagne (avec la Saxe et la Prusse) où j'ai passé le plus de temps. C'est un pays, en soi. C'était un Royaume, jusqu'à la Révolution de novembre 1918, qui y fut particulièrement féroce, avec des Soviets locaux, proclamés en 18-19 dans la plupart des principales villes. La Bavière industrielle, ouvrière, se rappelait à notre bon souvenir, faisant éclater le vernis d'une imagerie paisible et prospère, celle de la carte postale de Linderhof et Neuschwanstein.
     
    Bref, l'Histoire de la Bavière reste à écrire : elle est celle d'un pays comme un autre, qui a cherché au 19ème siècle à vendre au monde une image d’Épinal, mais traversé par toutes les forces antagonistes de l'Europe : Réforme, Contre-Réforme, guerres napoléoniennes, fin du Saint-Empire (1806), cheminement vers l'Unité allemande (1866), Révolution industrielle, deux guerres mondiales, Révolution de novembre 1918, contradictions et mensonges de l'après-guerre. Pays captivant, méconnu, victime de la carte postale qu'il nous avait lui-même concoctée, avec de bons gros bougres, en shorts de cuir, brandissant une chope de bière. Un pays comme les autres : ça ne vous rappelle rien, amis Suisses ?
     
    Je vous parle ce matin de la Bavière luthérienne, moins connue que la Bavière catholique, parce que le Ministre-Président, Markus Söder, 54 ans, natif de Nuremberg, est justement luthérien. Et qu'il s'invite, contre l'appareil de la CDU, contre Armin Laschet, le dauphin désigné de Mme Merkel, à la course à la Chancellerie, qui se jouera le 26 septembre. Et sa candidature, moins sage et moins docilement orthonormée Europe que celle de son rival, va faire parler d'elle.
     
    A-t-il des chances ? Nous verrons. Mais une chose est sûre : pour la toute première fois, un Ministre-Président de Bavière s'ouvre la voie vers le pouvoir central. A l'image d'un Prince électeur, à l'époque du Saint-Empire, postulant pour le titre d'Empereur. Telles sont les Allemagnes, décentralisées, plurielles, très personnalisées dans les régions. Un Bavarois à la Chancellerie : même le puissant Franz Josef Strauss, le Taureau de Bavière, n'y était pas parvenu. En avait-il seulement eu envie ? La capitale du monde, chez ces gens-là, c'est Munich. Pas Berlin.
     
     
    Pascal Décaillet

  • Résister aux modes : maintenant, ou jamais !

     
    Sur le vif - Dimanche 11.04.21 - 10.37h
     
     
    Il faut savoir résister aux modes. Elles finissent toujours par passer. Et il arrive toujours un moment, après quelques années, où on finit pas les considérer avec le demi-sourire qui sied aux choses désuètes. Pire : les plus sévères, après coup, sont ceux qui, sur le moment, leur avaient succombé avec le plus d'obédience.
     
    Mais c'est trop tard, Messieurs les anciens servants enfin affranchis. Les modes, c'est du temps de leur tyrannie qu'il faut leur dire non. Je parle ici des modes de pensée, non des caprices vestimentaires, qui ne m'ont jamais intéressé.
     
    Alors, parlons d'ici et de maintenant. Pour ma part, je résiste aux excès d'un double courant : la mode féministe et la mode climatiste. Je ne remets pourtant en cause ni l'égalité la plus totale des sexes, ni la nécessité de protéger notre planète. Je parle bien des excès : colonisation du discours, postures menaçantes face aux gens qui pensent autrement, auto-proclamation tribale de "collectifs", mise à l'écart des opposants : je n'accepte pas ces procédés. Je ne les ai jamais acceptés, de personne.
     
    J'avais dix ans en mai 68, j'ai observé de près les événements, j'avais l'oreille collée à la radio : déjà, je détestais ces mouvements de foule, qui s'élevaient contre un homme que j'admirais, un homme de l'Histoire.
     
    Les années passeront. Un jour, d'autres contempleront l'empire exercé sur nos consciences, au début de ces années 2020, par des mouvements extrêmes. Le langage inclusif, cette verrue sur la langue française, ils en dégageront toute la part de Préciosité, au sens de Molière. Le sabir des "chercheurs en sciences sociales", ils le compareront au latin des médecins du Malade imaginaire.
     
    Ce sera bien. L'Histoire efface, sur le sable. Elle avance, corrige, prend distance. Ce sera bien, mais ce sera trop tard. Je m'adresse à ceux d'entre vous qui, peut-être, partagent mon scepticisme dans les domaines que j'ai évoqués ici. Je leur dis : le réveil, c'est maintenant. Le combat, c'est maintenant. La solitude, c'est maintenant. Les maux de bide parce qu'on se crée des emmerdes face à la doxa qui régente, c'est maintenant.
     
    Maintenant, ou jamais.
     
     
    Pascal Décaillet