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  • Que chacun assume ses mots, à lui !

     
    Sur le vif - Lundi 31.05.21 - 13.52h
     
     
    Désolé, mais l'expression "neutralité carbone" appartient au jargon des Verts. Tout comme "urgence climatique". Les Verts ont le droit d'en user à leur guise, chacun est libre de ses choix de langage. Mais en aucun cas ces formules, qui reflètent un choix idéologique bien précis, n'ont à être reprises, telles quelles, par des gouvernements.
     
    Quand je vois le Conseil d'Etat genevois nous annoncer, pour après-demain, une conférence de presse in corpore pour nous chanter la liturgie du "Plan climat cantonal", avec comme objectif "la neutralité carbone d'ici 2050", je n'ai pas l'impression d'être à hauteur d'un langage gouvernemental, mais à celle d'une Grand-Messe des Verts.
     
    Je ne conteste en rien aux Verts le droit d'avoir leurs idées, ni de les défendre haut et fort. Mais l'empressement, par peur de déplaire au vent des modes, à reprendre leurs mots, leurs formules, leurs incantations, est insupportable. Tout le monde se met à parler comme les Verts : les gouvernements, les médias, les flous du PLR, les tièdes du Centre. A droite, seuls résistent encore les PLR non-contaminés, les conservateurs, les souverainistes, et une gauche du travail peu sensible aux bobos gentrifiés des villes. Pour le reste, c'est la débandade, le joyeux Rethondes de la capitulation, on prend les mots des Verts, on signe sans regarder, et va pour le "Plan climat cantonal", et vogue la galère pour la "neutralité carbone".
     
    Dans cette affaire, je ne reproche strictement rien aux Verts, ils jouent leur jeu sur l'échiquier politique. Mais de grâce, que chacun assume ses mots, à lui. Le plagiaire est l'incendiaire de la diversité de la pensée. Les choristes, sages repreneurs de formules, étouffent tout courage, toute puissance de solitude, toute aspiration au cisèlement individuel, pourtant fondateur de l'acte de langage.
     
    Que les Verts parlent comme des Verts ! Mais alors, que les radicaux se remettent à nous parler d'Etat, les socialistes du peuple, et la droite, qu'elle recommence à s'intéresser aux valeurs intellectuelles, spirituelles et philosophiques qui fondent, depuis la Révolution, son existence dans le débat public.
     
    J'invite chacun à être lui-même. Plutôt que de reprendre misérablement les syllabes de propagande des autres.
     
     
    Pascal Décaillet
     

  • Le Pont de l'Enfer

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 26.05.21

     

    A peine Genève commence à entrevoir la fin de la crise Covid, voilà que pleuvent les annonces de leurs déconvenues futures ! Ça concerne la circulation, et ça va faire mal. Dans quelques jours, début des travaux sur le Pont du Mont-Blanc, autant dire l’enfer pour les automobilistes. Plus tard, chamboulement complet de Cornavin, où la voiture sera bientôt réputée indésirable. Et tout cela coïncide avec quoi ? Avec le retour massif des pendulaires, reprise économique oblige.

     

    Bien sûr, il faut entretenir le Pont du Mont-Blanc. Mais un peu de jugeote, de la part de tout qui constitue à Genève le pouvoir, un peu de coordination, un peu de stratégie dans la communication, ne seraient pas de trop. Mais non ! On catapulte les mauvaises nouvelles, sans la moindre vision d’ensemble dans l’opportunité des annonces. On signifie aux automobilistes qu’ils vont, une fois de plus, en baver. En filigrane, on leur délivre du mépris, une totale insensibilité à leur sort : « Ils n’ont qu’à prendre les transports publics ! ».

     

    Eh bien non, nous n’avons pas « qu’à » ! Nous avons, à Genève, le libre choix de nos modes de transports. Nous n’avons absolument pas à nous sentir coupables, parce que ça contredit la doxa des Verts, de nous déplacer en voiture. Rien ne nous oblige à succomber au charme du vélo, ni des bus, ni des trams, ni des trains. Va-t-il falloir, à Genève, recréer un parti des automobilistes, bien poujadiste et bien populacier, pour se faire entendre ? Je vous klaxonne mon salut.

     

    Pascal Décaillet

  • Plaidoyer d'un souverainiste viscéralement européen

     
    Sur le vif - Jeudi 27.05.21 - 14.50h
     
     
    Je suis souverainiste, depuis toujours. Et je suis profondément européen. Non au sens de la machinerie de l'UE, mais dans celui, autrement plus fondateur, de mon appartenance totale à ce continent que j'aime, au sein duquel je voyage depuis six décennies, dont je parle une ou deux langues, en tentant d'en apprivoiser quelques autres, dont l'Histoire m'habite et me passionne.
     
    Toute ma formation, tous mes chemins de connaissance, le français, l'allemand, le latin, le grec, puis l'italien, un peu de grec moderne, me mènent à l'Europe. Elle est mon terroir, mon terreau, je lis ses écrivains, j'écoute ses musiciens. J'ai passé pas mal de temps en Allemagne, y compris à l'époque de la DDR, j'ai étudié avec passion la littérature allemande, je prépare une Histoire de l'Allemagne en 144 épisodes, dont 32 sont déjà publiés. Je lis la presse européenne en plusieurs langues, je m'essaye aux journaux grecs, mais là, j'ai encore un sacré boulot.
     
    Tout ça, pour inviter mes compatriotes à partager mon amour du continent. Je ne suis pas un occidental, encore moins un atlantiste, le monde anglo-saxon ne m'attire guère, je vibre pour l'Europe continentale, les Balkans, le Proche-Orient (où je me suis rendu maintes fois), l'Afrique du Nord. Je rends hommage à mes parents, qui nous ont permis, ma soeur et moi, de découvrir de fabuleux pays, dans notre enfance, aujourd'hui lointaine. Le Proche-Orient, justement, mais aussi par exemple la Scandinavie, été 1968, avec un voyage mémorable jusqu'au Cap Nord, et retour, dans la Mercedes 280 S de mon père. Inoubliable.
     
    Pourquoi j'écris ça ? Pour bien séparer deux choses. Le sentiment profond d'appartenance au continent européen (en Prusse, en Saxe, en Thuringe où vécurent Bach et Luther, je me sens chez moi, tout autant que dans un monastère perdu de la Grèce). Et puis, d'un autre côté, la défense d'une Suisse intraitable sur son indépendance, sa souveraineté. Non parce qu'elle est la Suisse, mais parce que toute nation doit être souveraine, ou n'être pas, sans troisième voie. Le destin de notre pays, pour moi, n'est pas de se fondre dans une entité supérieure. Collaborer, oui. Échanger. Apprendre à se connaître. Partager la culture, les langues. Mais en demeurant souverain.
     
    J'écris ça, aussi, parce que je couvre l'actualité Suisse-Europe depuis plus de trente ans, depuis Delamuraz, dont le souvenir illumine encore ma mémoire. J'ai couvert tous les combats, EEE, bilatérales, initiatives de l'UDC. Et maintenant, j'aspire à l'apaisement. Cet accord institutionnel était touffu, atrocement mal fagoté, le Conseil fédéral a mille fois bien fait de tirer la prise. Maintenant, il nous faut nous calmer. Respirer. Ne rien précipiter. Retirer le dossier aux diplomates et aux technocrates. Prendre quelques années pour nous demander, entre nous, les citoyennes et citoyens suisses, ce que nous voulons, en termes de politique européenne.
     
    Laissons, quelques années, nos amis Européens tranquilles, tout en maintenant avec eux des relations de confiance et de respect mutuel. Et instaurons le seul débat qui vaille : non pas celui des Suisses avec l'Europe, mais celui des Suisses avec la Suisse. Car à l'intérieur de notre pays complexe et fragile, la plus grande conquête n'est pas d'aller vers la connaissance de l'univers. Mais vers celle de nous-mêmes. Notre petit pays, riche de ses tranquilles inquiétudes, en vaut la peine.
     
     
    Pascal Décaillet