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  • Suffrage universel

    Chronique parue dans le Nouvelliste du jeudi 11.09.08

     

    Je suis partisan, depuis de nombreuses années, de l’élection du Conseil fédéral au suffrage universel. L’exécutif doit être la clef de voûte de nos institutions. Je le dis et l’assume, dans un pays qui a exagérément cru bon d’octroyer cette fonction au Parlement. Ainsi, ce très étrange titre de « premier citoyen du pays » pour le président du Conseil national. Il y a là quelque chose d’incongru : le premier de tous, dans une démocratie, doit être le chef de l’exécutif, pas l’homme du perchoir.

    Encore faut-il que l’exécutif ait un vrai chef. Non seulement pour un an, ni même pour deux, mais pour l’ensemble d’une législature. Cela se fait dans tous les pays du monde, il n’y a là rien de grave, rien de scélérat. D’autres pays ont plusieurs langues, plusieurs religions, et n’ont pas pour autant instauré l’impuissance impersonnelle, ni la division par sept du pouvoir, pour faire leurs preuves.

    Suffrage universel : l’exécutif, qui offre actuellement un spectacle bien difficile, tout le monde attaquant tout le monde (un peu comme dans le merveilleux poème « Les Ouménés de Bonada » de Michaux) a besoin de restaurer sa légitimité. La dernière élection du Conseil fédéral, le 12 décembre 2007, riche d’une « combinazione » sur laquelle je ne reviendrai pas, a prouvé avec éclat les limites du suffrage indirect. S’il fallait ne pas réélire Christoph Blocher, que ce fût au moins par le désaveu du peuple, et non pas celui d’un cartel de passage, au demeurant aussi vite dissous qu’il s’était formé.

    L’exécutif doit tirer sa sève, sa légitimité, des profondeurs du peuple souverain. Bien sûr, avec quelques garanties, simples et tenant sur cinq ou six lignes de la Constitution fédérale pour garantir la représentativité des régions.

    Avec ce système, émergeront de grandes figures nationales : Pierre Maudet, Pierre-Yves Maillard, Christophe Darbellay en ont la carrure. Des hommes forts, avec une intelligence, une vision, un rayonnement dépassant de loin des frontières de leur canton, et même de leur région. Franchement, qui s’en plaindra ? Faut-il, en politique comme dans la vie, craindre la puissance et le talent ? Faut-il craindre les caractères, les tempéraments ? Et recommencer à élire des passe-murailles en complets croisés ? A chacun de se forger sa religion. Pour moi, depuis longtemps, c’est chose faite.

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Mille morts par jour, pendant quatre ans


    Edito du 7-8  -  Radio Cité  -  Vendredi 12.09.08  -  07.05h

     

    La France, en Afghanistan, a perdu des hommes, dans une embuscade. Elle les pleure. Les familles demandent des explications. Elles se rendent même sur place, pour tenter de comprendre ce qui s’est passé.

    Sur la douleur des familles, rien à redire. Mais sur un certain climat d’émotion autour de cet événement, entretenu par les médias, dont le 20h de TF1, il convient peut-être de rappeler un ou deux points.

    Le principe d’une guerre, c’est de tuer l’ennemi, ou de se faire tuer par lui. La France a choisi de faire la guerre en Afghanistan, et sans doute ce choix est-il à saluer. Elle envoie donc ses soldats sur l’un des terrains de guerre les plus difficiles de la planète, où celui qui maîtrise le terrain (les Russes en savent quelque chose) est gagnant d’avance.

    Dans ces opérations d’une difficulté extrême, la France tend des embuscades aux talibans. Et, ma foi, les talibans tendent des embuscades aux Français. C’est très dur, c’est un jeu de vie et de mort : c’est précisément ce qu’on appelle la guerre.

    Entre le 2 août 1914 et le 11 novembre 1918, la France a perdu, en moyenne, mille morts par jour. Nulle famille du pays ne fut épargnée par le deuil. La saignée démographique fut terrible, et fut l’une des causes majeures de la défaite de 1940.

    Aujourd’hui, pour dix morts d’une armée devenue professionnelle, sur un terrain extérieur, on réclame des commissions d’enquête. N’a-t-on pas oublié, tout simplement, que l’Histoire était tragique, que le mal faisait partie de la vie. Et que la notion de progrès, face à ces fondamentaux, était bien relative.

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Jours fériés : et si on ouvrait un peu le jeu ?


    Edito du 7-8  -  Radio Cité  -  Jeudi 11.09.08  -  07.05h

     

    C’est aujourd’hui le Jeûne genevois. Genève a congé. Comme un dimanche, ou presque. Genève a congé, mais nul, hormis quelques érudits, ne sait exactement pourquoi. Ce jeûne, cette action de grâce, d’où viennent-ils, quel sens ont-ils ? Pourquoi le rite demeure-t-il, dans nos calendriers ?

    C’est le problème avec beaucoup de nos jours fériés. Le 15 août, les Valaisans ont congé. Combien d’entre eux sont-ils capables de nous tenir un discours sur l’Assomption de la Vierge Marie ? Bien des gens la confondent avec l’Ascension, celle du Christ. Fêtée quarante jours après Pâques. Il est vrai que l’homonymie ne facilite pas les choses. Ne parlons pas de la Fête-Dieu, congé dans les cantons catholiques, Corpus Christi en latin : magnifique, certes, avec ses cortèges, son rituel, mais qui en décèle encore le sens ?

    La plupart de nos jours fériés viennent du christianisme. Dès lors, serait-ce perdre notre âme que d’ouvrir, par exemple, deux fêtes par an à d’autres importantes communautés religieuses de Suisse ? Par exemple, le début du Ramadan pour les Musulmans, Rosh Hashana ou Yom Kippour pour les Juifs ? La Suisse n’en serait pas pour autant, dès le lendemain, couverte de minarets ni de synagogues, l’empreinte chrétienne, par son histoire, resterait très présente, et la Suisse aurait donné un signe d’ouverture.

    A cet égard, une très belle image : celle de Pascal Couchepin partageant, avec des Musulmans, il y a quelques jours, un moment du Ramadan. Un signal fort, à mille lieues de certaines initiatives qui sont à l’errance ce que les plus hautes tours – ou les plus hauts minarets – sont au Ciel.

     

    Pascal Décaillet