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Liberté - Page 541

  • Sans-culottes

     

    Commentaire publié dans GHI - 22.01.20

     

    On ne me soupçonnera pas d’une sympathie excessive pour Emmanuel Macron : je condamne depuis trois ans tout ce qu’il incarne. Son rapport avec le monde de la grande finance internationale, ce qu’il lui doit. Ses options libérales. Son allégeance à l’Allemagne. Sa foi dans une supranationalité européenne qui fait fi de la souveraineté millénaire de son propre pays. Je suis donc, en profondeur, avec des arguments que je suis prêt à développer pendant des heures, un adversaire de ce Président.

     

    Oui, mais voilà. Adversaire de sa politique, pas de l’homme, contre lequel je n’ai rien. Dans le champ public, on combat des idées, pas des personnes. Surtout, on respecte leur vie, leur espace privé, on ne se comporte pas comme des sans-culottes pourchassant l’aristo pour accrocher sa tête au sommet d’une pique. C’est, hélas, ce qu’ont cru bon de faire quelques improbables justiciers de réseaux sociaux, s’en allant traquer le chef de l’Etat français jusque dans un théâtre, où il assistait à la pièce, comme spectateur.

     

    Ce comportement de meute, c’est le déni même de la République. C’est le degré zéro de la révolte, celui qui personnalise, stigmatise, voue à la vindicte. Jamais cela, dans un Etat de droit, ne doit être toléré. Non seulement contre le Président, mais contre quiconque ! L’attaque physique, la vindicte, la mise sous pression par une foule constituent des comportements inacceptables. Le combat – légitime – contre les idées de M. Macron mérite mieux que ces attitudes de va-nu-pieds.

     

    Pascal Décaillet

     

     

     

     

  • L'imposture des "collectifs"

     

    Sur le vif - Mercredi 22.01.20 - 14.06h

     

    Je ne peux plus supporter ces mots, les "collectifs", les "coordinations", et autres nébuleuses, qui nous enfument à longueur de journées avec leur communiqués, leurs exigences, leurs menaces.

    A Genève, n'importe quelle grappe improbable peut se revendiquer d'un "collectif". Souvent, un gourou, avec une docile bande de moutons et de brebis. Entre soi, sans autre légitimité que s'être agglutiné, avoir créé un groupe sur un réseau social, on se chauffe, on s'aiguise au fer rouge, on se surexcite, dans l'attente du Grand Soir.

    Qui sont ces "collectifs" ? Quels sont leurs formes juridiques ? Qui porte la responsabilité légale, lors "d'actions", dans la rue, ou parfois en violation de domiciles ? Qui les finance ? Au nom de quelle légitimité viennent-ils se couvrir de ces deux mots totalement fumeux, "collectifs", "coordinations" ?

    Surtout, nous les citoyennes, les citoyens de ce canton, hommes et femmes libres, détenant pour chacun d'entre nous une part indivisible du suffrage universel, en quoi devrions-nous, d'une quelconque manière, nous laisser impressionner par ces entités grégaires, qui essaient juste la loi du nombre, la détestable loi du groupe intimidant, pour faire peur ?

    La République, ça n'est pas la loi du nombre. Ca n'est pas le communautarisme associatif. Ca n'est pas ce petit jeu de matamores qui cherchent à intimider les citoyens. Ils ont certes le droit de s'agglutiner, de s'exprimer, tant qu'ils veulent. Nous, nous avons celui de les ignorer, d'exiger d'eux la transparence sur leur forme associative, leurs mécanismes réels, et la connaissance exacte, précise, assumée, de ceux d'entre eux qui portent la responsabilté juridique.

    Tout le reste n'est qu'enfumage. La République, ça passe par la confiance. Et par la clarté.

    Et si chacun d'entre nous, avant d'aller s'embrigader dans un "collectif", assumait à titre individuel, en signant de son nom et de son prénom, en prenant soi-même le risque de sa parole, ses positions dans la Cité ? Rien de pire que de s'abriter derrière un groupe. Notre démocratie, vivante et ouverte, mérite mieux que ces nuages opaques, porteurs de lâcheté.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Le pouvoir, qui noircit et corrompt

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 22.01.20

     

    J’en ai accompagnés, dans mon métier, des gens qui montaient vers le pouvoir ! Souvent, le tout premier, en radio puis en télévision, je leur ai donné la parole. Ils étaient jeunes, ils étaient frais, ils avaient cette gourmandise de la vie, cette voracité à mordre le destin, croquer le fruit défendu, s’émanciper des normes, bousculer l’ordre établi. Celui qui aspire au pouvoir n’a de chances d’y parvenir que s’il incarne le mauvais garçon, doué, frondeur, séduisant, le grand frère qui transgresse, le Grand Meaulnes, sublime héros du roman d’Alain-Fournier, dont le narrateur, juste un peu plus jeune sur les bancs de l’école, est quasiment amoureux. Un homme, en 1994/95, a parfaitement compris ce principe : Jacques Chirac, pourtant la soixantaine entamée, deux fois Premier ministre, Maire de Paris depuis deux décennies, a réussi le tour de force, face à l’orléaniste installé Edouard Balladur, de se faire passer pour un grand escogriffe charmeur, incarnant l’avenir, la justice et l’espoir.

     

    Hélas, le pouvoir un jour finit par arriver. Et c’est le début de la fin. Parce que, de l’intérieur, il vous corrompt, vous corrode, il noircit votre âme, il vous isole, il vous rend sourd aux critiques, il vous amène son lot de courtisans, il anesthésie votre être sensible, il fait de vous une machine. A ce destin, nul n’échappe. Ni hommes, ni femmes, ni jeunes, ni vieux, ni conservateurs, ni progressistes : tous à la même enseigne ! Tous prisonniers de ce même carcan. Tous à gauger dans le jus de cette hypocrisie, où il faudrait demeurer populaires, alors on multiplie les bains de foule, on se fait photographier sur les réseaux sociaux, sympas, humains, copains d’antan, mais en réalité on est seul, de plus en plus dur, on multiplie les scénarios pour survivre dans sa fonction d’homme ou de femme de pouvoir. Nul n’y échappe.

     

    Alors, quoi ? Le père Décaillet, Prussien dans l’âme, républicain rectiligne, serait-il devenu un vieil anar ? Pas vraiment ! Mais face au jeu des ambitions humaines, face la chansonnette et la ritournelle des jeunes loups – et louves – il n’entretient pas la moindre illusion. Dans chacune de ces âmes tendres, il voit déjà poindre les futurs abus de la domination. Car celui qui aspire au pouvoir est déjà entré dans la spirale de la noirceur. Tout au plus demeure-t-il encore, le temps d’accéder aux marches convoitées, dans un rôle qui séduit l’opinion. Mais déjà, il la dévoie. Notre système de démocratie représentative, qui passe par l’élection, donc par une campagne de séduction intense, favorise cette diabolique transformation. Encore une fois, nul n’y échappe, surtout pas ceux – et celles – qui prétendent « faire de la politique autrement » : ils deviennent les pires ! La seule issue : développer un système, heureusement déjà présent chez nous en Suisse, où les thèmes l’emportent sur les personnes, les votations sur les élections, la démocratie directe sur les affiches de campagne personnalisées. Excellente semaine à tous !

     

    Pascal Décaillet