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Liberté - Page 530

  • Celle qui nous précède et nous survit

     

    Sur le vif - Dimanche 17.05.20 - 16.14h

     

    Avant-hier soir, Mezzo : au milieu d'une Philharmonie de Berlin vide comme le temps qui passe, la musique absolument sublime d'Arvo Pärt, en l'occurrence la pièce "Fratres".

    Depuis la fin de l'enfance, j'ai toujours pensé que l'expression "musique contemporaine" n'avait aucun sens : toute musique est contemporaine. Haendel, Beethoven, Wagner, Bartók, et tous les autres, sans exception, qu'ont-ils fait d'autre que de composer de la musique contemporaine ? De la musique pour leurs contemporains !

    Et même quand aujourd'hui, on joue la musique ancienne, ce sont des soeurs humaines, des frères humains d'ici et de maintenant, avec leur souffle de vie instantané, simultané au nôtre, qui lui restituent sens et vie. Le plus bel exemple : Johann Nikolaus comte de La Fontaine et d'Harnoncourt-Unverzagt (oui, il s'appelait vraiment comme ça, il descendait de l'Empereur du Saint-Empire, et a vécu entre 1929 et 2016 !), l'homme qui, avec le plus éclatant génie, nous a réactualisé, au sens le plus brechtien, cette musique, en soufflant sur sa poussière. Harnoncourt, l'un des plus contemporains de nos grands chefs.

    Avant-hier, Berlin, Philharmonie, ombre immense et silencieuse de Furtwängler, salle vide. La musique de l'Estonien Arvo Pärt, né en 1935, l'un de nos plus grands musiciens vivants. Sous la direction de Kirill Petrenko, une quinzaine de musiciens, peut-être vingt, distances respectées, c'était le 1er mai dernier, sous l'empire du confinement. Un concert sans public. Et pourtant, jamais la présence de la musique n'aura été aussi puissante. C'est elle qui est centrale. Elle qui vit. Elle qui nous précède et qui nous survivra. C'est par elle que se jouent l'absence ou la présence.

    Jamais concert ne fut à ce point contemporain.

     

    Pascal Décaillet

  • Valets des Verts

     

    Sur le vif - Dimanche 17.05.20 - 07.46h

     

    Le problème, ce ne sont pas les Verts, qui ont parfaitement le droit d'apporter leurs idées dans le débat démocratique.

    Le problème, c'est la sur-adaptation des autres, notamment chez certains gentils centristes, à l'idéologie Verte.

    C'est un défaut de caractère. Les Verts, ces temps (peut-être plus pour si longtemps, d'ailleurs), ont le vent en poupe. Leur vision constitue la doxa du moment, tout comme l'ultra-libéralisme fut celle du début des années 2000.

    Alors, certains se mettent à la remorque. Ils font tous les caprices des Verts, précèdent même leurs désirs. Ils élargissent démesurément les pistes cyclables, mais rétrécissent le champ de leur propre liberté intérieure : ils deviennent des valets de la domination des consciences par les Verts.

    Ceux-là seront toujours du côté du pouvoir du moment. Aujourd'hui, celui des Verts. Demain, un autre. C'est un défaut de caractère, oui.

    Nous avons, plus que jamais, besoin d'esprits libres. D'hommes et de femmes capables de penser par eux-mêmes. Résister à l'esprit du temps. Se contre-foutre des modes de pensée. Chacun avec sa vision, sa conception, son univers mental. Sa plume. Et sa voix

     

    Pascal Décaillet

  • Quand le ministre voit large

     

    Sur le vif - Vendredi 15.05.20 - 18.43h

     

    La question n'est pas de savoir s'il faut des pistes cyclables à Genève. Il en faut, c'est certain, et la protection des cyclistes doit être garantie. Sur certains tronçons, il y a des ruptures de continuité qui obligent les utilisateurs de vélos à surgir sur la chaussée, donc se mêler aux voitures, ou alors sur le trottoir, avec le risque d'incommoder les piétons. Bref, pistes cyclables oui.

    Mais il faut les aménager correctement. Et là, désolé, mais ce qu'on vient de nous tracer, boulevard Georges-Favon direction Coulouvrenière, ou après la place du Cirque en sens inverse, ce ne sont pas des pistes cyclables, mais des aires d'atterrissage pour jets privés, retour du Grand Prix d'Abu-Dhabi. On dira, pour demeurer courtois, que le ministre a vu large. Il a dû se rêver Baron Haussmann, Paris Second Empire, Champs-Élysées, boulevard des Italiens, Belle-Epoque, champagne avec les danseuses, Offenbach, grande vie.

    On a surtout l'impression qu'il a pris sa décision à la hache. Ou avec la machette du défricheur de la forêt amazonienne, on coupe, on tranche, on fonce. Il s'est permis cela, pourquoi ? Parce qu'hélas, cet homme de valeur, attachant, avec un vrai sens du service de l'Etat, a tendance à se sur-adapter à l'esprit du temps. Lors des très riches heures de François Longchamp, il nous faisait à sa manière du Longchamp, reproduisant sa terminologie, le verbe "indiquer" par exemple. Du Longchamp trottinant, du Longchamp en cavalcades, comme à l'hippodrome.

    Aujourd'hui, la doxa est au Vert. Des Verts partout, les uns galants, d'autres luisants, des Verts tenant toutes les manettes du pouvoir. Alors, le ministre se sur-adapte à l'idéologie Verte. Et il trace large. Et il élargit encore !

    Ce ministre, je l'ai déjà dit et n'en démords pas, est un magistrat de qualité. Tout au plus pourrait-on souhaiter qu'il se régente lui-même avec un peu plus d'autonomie, un peu moins de mimétisme aimanté sur le pouvoir du moment.

    Pour le reste, vive le vélo. Vive le respect de TOUS les modes de transports. Mort aux Torquemadas. Et longue vie à la liberté d'esprit, celle du verbe, celle des mots. Et celle des étalons étincelants, sur les pistes de lumière des hippodromes.

     

    Pascal Décaillet