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Liberté - Page 184

  • Nous tous, méfions-nous du pouvoir !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 09.11.22

     

    De longues décennies de journalisme politique, avec une passion intacte, comme au premier jour, m’ont appris à me méfier de toutes choses. Me méfier des apparences. Des sourires. Des confidences. Me méfier des mots utilisés par le pouvoir. Et justement, les décortiquer. Un analyste politique doit avoir fait de la linguistique, ou tout au moins se montrer sensible au choix des vocables. Tout pouvoir, quel qu’il soit, règne par les mots. Tel régime autoritaire impose sa terminologie. Tel communiqué annonçant à la population des désagréments choisira des mots doux, pour atténuer la douleur du public. Tel parti en lance comme des slogans : la « famille » pour le PDC, la « liberté » pour les libéraux, la « transition climatique » pour les Verts, les « prestations à la population » pour les socialistes. Ils les jettent au vent, les reprennent au vol, les répètent en incantation, c’est leur méthode, leur liturgie.

     

    Notre rôle à nous, celui de toute citoyenne, tout citoyen, c’est de décrypter les actes de langage du pouvoir. Dès l’école, on doit prendre des textes émanant de gens ayant une emprise sur les autres, ou aspirant à l’avoir. Et on doit, documents en mains (journaux, communiqués, archives audio, vidéos) se livrer avec les élèves à une analyse rigoureuse, impitoyable, des mécanismes de langage du pouvoir. Pas besoin d’aller jusqu’au discours d’un dictateur ! Non, prenons ceux qui exercent la puissance aujourd’hui, tout près de nous : politique, économique, financière, médiatique. Prenons leurs mots, tels qu’ils sont. Lisons-les, écoutons-les, repassons la bande, dix fois, vingt fois. Analysons le rythme, le souffle, les silences, les effets de voix. Dégageons l’intention réelle, sous le masque des apparences. Vous verrez à quel point les élèves sont intelligents, lucides, éveillés à l’idée de travailler avec le matériau du langage, ne pas être dupes. Cet exercice-là, c’est le chemin le plus direct vers la citoyenneté.

     

    Et puis, nous tous, méfions-nous du pouvoir ! De tout pouvoir, d’où qu’il vienne. Celui des hommes. Celui des femmes, qui s’exerce exactement selon les mêmes mécanismes. Celui de la droite. Celui de la gauche. Celui des méchants. Celui (sans doute plus dangereux) des gentils, des souriants, des aimables, des ronronnants. Méfions-nous, comme de la peste, de ces drôles de pendards qui prétendent, le monde ayant évidemment commencé avec eux, « faire de la politique autrement ». Comme s’ils détenaient, eux, la clef magique pour s’affranchir de l’immanente noirceur du pouvoir. Celle qui nous guette tous, dès qu’il nous est loisible d’exercer une emprise sur nos contemporains.

     

    Je vais vous dire : je préfère encore la rude franchise de l’autoritaire assumé à la menteuse bonhomie des gentils. La politique n’est en rien une affaire de morale. Elle est un rapport de forces. Autant le génial historien grec Thucydide, il y a vingt-cinq siècles, que Karl Marx, nous l’identifient ainsi. Lisez ces deux auteurs. Pénétrez-vous de réalisme, voire de cynisme. Soyez lucides : c’est notre seule voie, au milieu de l’universelle manipulation.

     

    Pascal Décaillet

  • La tyrannie du genre, ça suffit !

     
    Sur le vif - Mardi 08.11.22 - 13.08h
     
     
    Succession de Mme Sommaruga : bravo à l'excellent Conseiller aux Etats zurichois Daniel Jositsch, qui se lance dans la bataille. Et ose ainsi défier le coup de force féministe de la présidence du parti socialiste suisse, qui veut absolument imposer à l'Assemblée fédérale, le 7 décembre, un ticket à deux femmes.
     
    M. Jositsch est socialiste, il est alémanique, il est hyper-compétent, il a les qualités d'un Conseiller fédéral. Pourquoi diable, au nom d'une tyrannie idéologique du genre, devrait-il renoncer à se présenter ?
     
    Le jour venu, les 246 trancheront. Et cela, quel que soit le choix du Groupe socialiste. Un Conseiller fédéral est élu par l'Assemblée fédérale, et non par la combinazione d'un parti. Au besoin, le Collège électoral du 7 décembre ferait bien d'administrer, comme en 83, comme en 93, une bonne leçon républicaine à ces sectaires du genre.
     
     
    Pascal Décaillet

  • La Suisse n'est pas un concours d'ethnies rivales

     
    Sur le vif - Lundi 07.11.22 - 15.34h
     
     
    Soyons clairs. Il y a déjà deux Romands et un Tessinois au Conseil fédéral, soit trois "Latins". Dans ces conditions, à moins de ne rien connaître aux équilibres suisses depuis 1848, il n'est pas question d'envisager l'élection d'un quatrième "Latin" au Conseil fédéral, le 7 décembre.
     
    Nos compatriotes alémaniques constituent, en population et en nombre de Cantons, l'écrasante majorité de notre pays. Il doivent avoir quatre d'entre eux au Conseil fédéral. Parfois cinq, parfois quatre. Mais seulement trois, désolé, ça ne va pas. La majorité doit respecter les minorités, mais n'a pas à s'écraser elle-même jusqu'à devenir minoritaire.
     
    J'ajoute un élément, capital, et c'est peut-être en moi le germanophone, tellement tourné vers la langue et la culture germaniques, qui le dit. Bien sûr que la Suisse romande, la Suisse italienne, la Suisse romanche, doivent avoir leur juste représentation. Mais enfin, à mes yeux, et même si j'ai fréquenté de près de nombreux conseillers fédéraux romands, dont deux radicaux, et l'un d'entre eux dont je me suis senti très proche (Jean-Pascal Delamuraz), cette affaire de "représentation" linguistique n'est pas d'importance première.
     
    La Suisse n'est pas un concours d'ethnies rivales dont les champions devraient arborer leurs couleurs locales, comme des bannières de tournoi, au gouvernement fédéral. Non. La Suisse est plus et mieux que cela. Elle est un pays à la fois divers (26 Cantons) et uni, par le miracle de son Pacte fédéral. Siéger au Conseil fédéral, ça n'est pas "représenter" son Canton d'origine. Non, c'est incarner le septième du pouvoir exécutif de toute la Suisse, indivisible.
     
    Je suis Genevois, d'origine valaisanne, ou Valaisan de Genève, comme on voudra. J'aime profondément ces deux Cantons. Je suis certes heureux qu'ils aient pu être "représentés" au Conseil fédéral. Mais je n'en fais aucunement une affaire primordiale. Dans le Bâlois Hans-Peter Tschudi, dans le Saint-Gallois Kurt Furgler, dans le Vaudois Jean-Pascal Delamuraz, je me suis senti tout aussi "représenté" (au fond, je déteste ce mot !) que par telle conseillère fédérale genevoise, pour prendre un exemple dans la pureté boréale du hasard.
     
    Nous tous, Suisses, envoyons à Berne ce que nous avons de meilleur. Mais sachons reconnaître aux autres, oui à ces Confédérés parfois lointains, méconnus, le droit et la pertinence à nous "représenter", Suisses parmi d'autres Suisses. Au-delà des ethnies. Dans l'amour partagé du pays tout entier.
     
     
    Pascal Décaillet