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Liberté - Page 1288

  • Claude Rich saisissant, dans le rôle de Léon Blum !

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    Mardi 06.09.11 - 12.04h

     

    Je suis tombé hier soir sur un téléfilm d'exception : Léon Blum, incarné avec génie - et je pèse mes mots - par Claude Rich. Cette fiction télévisée, signée Claude Goretta, date de quelques années, je ne l'avais jamais vue, ce fut un bonheur total.

     

    La figure de Blum (1872-1950) m'a toujours fasciné. La jeunesse littéraire, ses écrits au moment de l'Affaire Dreyfus, ses critiques de livres dans la Revue Blanche. Et puis, bien sûr, le politique. Le Front populaire, les Congé payés : il est l'homme grâce à qui, dès juillet 1936, des centaines de milliers de Français, pour la première fois de leur vie, verront la mer. Blum, surtout, est un immense patriote, totalement sali, dès juillet 1940, par Vichy, qui veut faire endosser au Front populaire la responsabilité matérielle et morale de la défaite. Ce qui est, on le sait aujourd'hui, totalement faux. Si je devais conseiller une seule biographie, ce serait, sans hésiter, celle de Jean Lacouture.

     

    Cet homme, la qualité de ce visage, ces petites lunettes rondes, cet art oratoire de la Troisième République, Claude Rich nous les restitue de façon saisissante. Ça n'est plus lui, c'est Blum, celui des actualités, de l'INA, celui des grands discours. Très grand acteur. A signaler, aussi, la remarquable interprétation de Dominique Labourier dans le rôle de Thérèse, la deuxième femme de Blum. Sur la même époque, Claude Goretta avait déjà réalisé « Le dernier été », la vie de Georges Mandel, ce proche de Clemenceau devenu ministre de l'Intérieur du dernier gouvernement de la Troisième République, et qui finira, comme on sait, assassiné par la Milice de Vichy, le 7 juillet 1944, en forêt de Fontainebleau. Décidément, cette période charnière, où tout s'effondre, inspire avec un rare bonheur le réalisateur suisse.

     

    En voyant Claude Rich, si incroyablement juste, possédé par son personnage, j'ai pensé à Michel Bouquet dans le rôle de Mitterrand. Et aussi, avec émotion, à François Simon incarnant Jean-Jacques Rousseau. Le téléfilm s'appelait « Les Chemins de l'exil ». Il date de 1978 (le 200ème anniversaire de la mort de Rousseau). Et il était déjà signé d'un certain... Claude Goretta !

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Etat palestinien

     

    Sur le vif - Lundi 05.09.11 - 08.36h

     

    Une grande voix féminine, ce matin sur la RSR : celle de Leila Shahid. J'ai souvent eu l'occasion d'interviewer cette grande dame de la cause palestinienne, elle m'a toujours impressionné par sa lucidité politique, son habileté, son intelligence. Ce matin, elle a tenu à préciser à Simon Matthey-Doret son statut de « Déléguée de Palestine », représentant un Etat, et non un corps constitué qui serait inachevé, intermédiaire, tout juste toléré. L'Etat palestinien, qui doit un jour advenir, est déjà, complètement, dans sa tête, et la rude fierté de cette posture n'est pas sans rappeler le Charles de Gaulle d'Alger, dans les années 1943-1944, lorsque tous étaient encore contre lui, à commencer par Roosevelt.

     

    Le discours de Leila Shahid, l'humanisme de ses positions, l'ampleur de sa vue générale concernant le Proche-Orient, son absence d'outrances face à Israël, la profondeur de son désir de paix, voilà les meilleurs atouts pour la cause palestinienne. Bien sûr qu'il faut un Etat palestinien, il le faut depuis tant d'années. À côté d'un Etat israélien dont l'existence doit être garantie sans arrière-pensées. Bien sûr que la Suisse, petit pays, mais respecté des deux bords (je l'ai constaté souvent en reportage au Proche-Orient), doit tout entreprendre pour favoriser une solution politique.

     

    Cette solution, sans rien retrancher à l'amitié entre la Suisse et Israël, ne peut, aujourd'hui, avoir d'autre visage que la reconnaissance sans ambiguïté, par Berne, d'un Etat souverain de Palestine. Ce pas, la Suisse l'avait franchi pour le Kosovo. On voit mal pourquoi un peuple qui lutte depuis bientôt 45 ans pour ses droits, n'aurait pas droit à la même reconnaissance. Il ne s'agit pas d'égards. Mais de justice.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Didier Bonny, homme debout

     

    Sur le vif - Samedi 03.09.11 - 17.01h

     

    Je connais Didier Bonny depuis plus de trente ans, pour avoir été son prof d'allemand, alors qu'il était un jeune homme sensible, ouvert et intelligent. Plus tard, c'est lui qui a été l'instituteur de ma fille aînée, qui en garde un remarquable souvenir. Ce chassé-croisé d'enseignements (la plus belle chose, la plus noble relation du monde, sur laquelle Péguy, dans « Notre Jeunesse », a écrit de bouleversantes vérités), crée bien sûr des liens, mais ça n'est pas pour cela que j'écris ce billet. Non. C'est, bien sûr, suite à sa décision, annoncée hier, de quitter le PDC, après 26 ans de loyaux services.

     

    Tout le monde sait qu'à propos des alliances à droite, je ne partage pas le point de vue de Didier Bonny. Quelques-uns, peut-être, savent que je viens d'une famille maternelle où le mot PDC, jugé trop moderniste, ne se prononçait même pas : on disait conservateurs, et les chrétiens-sociaux étaient considérés comme de singuliers petits hommes jaunes, d'autres planètes. Mais ces divergences, aujourd'hui, n'ont aucune importance, elles s'abolissent face à l'admiration que m'inspirent la cohérence de Didier Bonny, la droiture de son acte, l'honneur de sa posture.

     

    Car enfin, que se passe-t-il ? Un homme, sur un point qu'il juge capital, n'est pas d'accord avec l'évolution de son parti. Il rumine, réfléchit longtemps, avertit. Et puis, un beau jour, il tire les conséquences. Avec élégance, sans la moindre haine, sans le moindre mot blessant (je viens d'écouter son interview à Forum), il s'éclipse. Peu de politiques, très peu, pourraient en dire autant. Son acte, avec éclat, tranche par rapport à la triste horizontalité des survies, ceux chez qui tout est bon pour s'accrocher : la fausse amitié des cocktails, les réseaux de copinage, le tutoiement de l'ennemi.

     

    Alors voilà, moi qui suis en désaccord total avec la raison même du départ de Didier Bonny, je veux dire ici que la dignité de cet au-revoir m'impressionne.

     

    Chapeau, Didier. Un homme n'est grand que dans la solitude. Les cocktails, c'est pour les rampants.

     

     

    Pascal Décaillet