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Liberté - Page 1035

  • Marche Blanche : le droit d'être contre

     

    Chronique publiée dans Lausanne Cités - Mercredi 07.05.14
     


    Le 18 mai, nous votons sur l’initiative dite « de la Marche Blanche », qui entend interdire à vie aux pédophiles (reconnus coupables) de travailler avec des enfants. Je ne me prononce pas ici sur le fond. Chacun d’entre nous votera en conscience. Et nous respecterons le verdict du peuple et des cantons.
     


    Mais le climat de la campagne est profondément gênant. Je le dis ici haut et fort, on a le droit d’être contre cette initiative. Et de venir le dire en public, comme le font les partisans. Nous sommes dans une démocratie : on nous propose un texte, on a le droit d’être pour, celui d’être contre, et rien n’est plus détestable que la diabolisation du point de vue opposé.


     
    Il n’est pas acceptable que les opposants se voient insultés, ou traités de « complices des pédophiles ». J’ai bien vu, en montant le débat sur Léman Bleu, la difficulté des partisans du non à se dévoiler en public. Comme par hasard, le soir de mon débat, ils étaient tous pris. Je n’aime pas du tout ce genre de climat où un camp terrorise l’autre.


     
    Il était insupportable, dans la campagne du 9 février, de voir traiter de « xénophobes » ceux qui voulaient juste réguler les flux d’immigration. Il l’est tout autant, sinon plus, d’assister à l’incroyable intolérance d’un camp par rapport à l’autre. Nous sommes dans une démocratie. On a le droit d’être pour. Le droit d’être contre. Et on respecte l’adversaire.
     


     
    Pascal Décaillet

     

  • Le Pape impair

     

    Chronique publiée dans le Nouvelliste - Mercredi 30.04.14


    Dimanche dernier, devant mon téléviseur, je me suis quand même dit que quatre papes, ça commençait à faire beaucoup. Certes, deux d’entre eux étaient défunts, et je n’ai rien à dire contre leur canonisation. Certes, le pape émérite était bien légitimé à être là. Certes, le pape François a parfaitement mené les choses. Mais tout de même, quatre papes, c’est trop. Parce que l’idée d’un pape, voyez-vous, c’est justement qu’il soit unique. C’est là le label du catholicisme, celui qui est d’ailleurs reproché à l’Eglise de Rome. Un seul chef, pour conduire et incarner cette Assemblée invisible qu’on appelle l’Eglise.
     


    Et puis, ces papes qui se canonisent entre eux, il y a quelque chose qui me gêne. Non que cela ne soit pas mérité, loin de là. Mais enfin, dans cette autocélébration, il y a un aspect circulaire, donc fermé, qui n’est pas le meilleur signe. D’autant que si on se met à canoniser un pape sur deux, non seulement ce sera trop, l’idée de sainteté perdra de son crédit, mais il y a un côté injuste pour « le pape impair », celui qui n’a pas l’heur d’être sanctifié. En l’espèce, celui qui était entre les deux saints de dimanche, c’était (si l’on excepte la trop courte période de Jean-Paul 1er), le pape Paul VI, que j’ai personnellement aimé, vu de très près à Genève en juin 1969, et dont j’apprécierais qu’une docte autorité romaine m’explique en quoi il serait « moins saint » que les deux qui l’entourent.
     


    Alors, désolé, mais dans ce Dimanche des Quatre Papes, j’ai surtout vu une immense et géniale opération de propagande, au sens premier, non péjoratif, entendez la nécessité de propager, faire connaître, rien de mal en soi. Et voyez-vous, moi catholique (je le resterai toujours), j’ai pensé que mes frères protestants, plus attachés à l’exégèse du texte qu’à l’image ou l’icône, n’avaient, dans leur retenue, pas entièrement tort. Je me suis pris à rêver, concernant Jean-Paul II, qu’une personne sur dix-mille ayant assisté à la cérémonie de dimanche prît la peine de lire, par exemple, sa lumineuse Encyclique « Laborem exercens ». Dans laquelle, 90 ans après le « Rerum Novarum » de Léon XIII, il redéfinit en 1981 le nécessaire humanisme du monde du travail. Alors non, chers lecteurs, l’Oncle Décaillet ne passe pas au protestantisme. Mais il a besoin de sens. De textes. Et de lumière. Comme nous tous, je crois.


     
    Pascal Décaillet

     

  • Séance spéciale : à quoi joue M. Droin ?

     

    Sur le vif - Mardi 29.04.14 - 09.31h

     

    Une séance spéciale sur le CEVA et les SIG, le 17 mai, ridiculement ramenée à deux heures, un sec rappel (dans la TG de ce matin) du champ très étroit auquel devront se limiter les débats, tout se passe comme si Antoine Droin, le président du Grand Conseil, entreprenait toutes choses pour réduire la portée de cette séance. Juste se limiter au minimum syndical du règlement. Pour une session que lui et les siens n'ont pas voulue. Normal : elle fut demandée, et obtenue, par les bancs adverses.



    Cela n'est pas son rôle. La mission du Grand Conseil est précisément de contrôler l'activité du gouvernement, de l'administration et des régies publiques. Le premier d'entre eux, l'homme du perchoir, devrait justement être celui qui, par son autorité rayonnante et sa pugnacité, favoriserait au maximum la capacité du Parlement à établir cette tâche. Faut-il rappeler qu'en démocratie, les pouvoirs sont séparés ? Les intérêts supérieurs du Parlement, sa mission de représentation populaire, son devoir de contrôle, l'amènent parfois à se trouver en litige avec le gouvernement.



    Loin d'être grave, cette dialectique de confrontation est au coeur de la démocratie. Rien de plus méprisable qu'une Chambre d’enregistrement, un Parlement croupion, des député(e)s groupies, ne jurant que par leurs ministres. Rien de plus admirable, au contraire, qu'un groupe parlementaire, ou des individus, osant s'attaquer à leurs propres magistrats exécutifs, parce qu'ils le jugeraient nécessaire à l'établissement d'une transparence démocratique.



    Le président du Grand Conseil a-t-il lu Montesquieu ? S'est-il pétri d'Histoire en prenant connaissance des différentes réalités parlementaires à travers les âges, Chambre bleu horizon de 1919, Chambre de la peur en juin 1968, Parlements de cohabitation (souvent les meilleurs), etc ? M. Droin est-il là pour défendre au maximum la capacité d'action de l'institution dont il a la charge, ou juste pour savourer le bonheur, ouaté de consensus et de bonne entente avec tous, de vivre sa fonction ?



    M. Droin a-t-il intégré qu'il n'était pas spécialement à ce poste pour "bien s'entendre" avec le Conseil d'Etat, mais parfois pour lui résister ?. Dans les cas, comme justement le CEVA ou les SIG, où il y aurait, de la part de l'exécutif, volonté d'obturation. Ramener au minimum syndical de deux heures une séance qui aurait dû avoir la durée nécessaire à une catharsis de vérité, c'est accepter la session spéciale en se bouchant le nez. Juste parce qu'elle a été demandée, et obtenue, par des partis (MCG et UDC) que M. Droin n'aime pas.



    Déjà lorsque le président du Conseil d'Etat, François Longchamp, avait eu l'incroyable arrogance de demander un vote nominal, la présidence du Grand Conseil aurait dû immédiatement, en public et à voix très haute, lui rappeler que le mode de scrutin du Parlement était du ressort des députés, et non d'un ministre. Cela s'appelle la séparation des pouvoirs. L'actuel président du Grand Conseil, si gentil avec tout le monde, à commencer par les gentils ministres, connaît-il seulement ce concept ?

     

    Pascal Décaillet