Sur le vif - Jeudi 03.03.22 - 13.44h
On ne me soupçonnera pas, je pense, de macronisme aigu. Je condamne depuis cinq ans les options européennes et mondiales de ce Président, son absence d'armature nationale, ses choix économiques et sociaux, son orléanisme.
Mais hier soir, il a dit des choses qui sonnaient juste. Il a, bien entendu, condamné l'agression russe en Ukraine. Mais il n'a pas, pour autant, coupé les ponts avec la Russie. Il a rappelé le passé de cet immense pays avec la France, le sacrifice inimaginable des années 1941-1945, la permanence d'une amitié entre deux peuples.
Il a condamné un régime, des choix politiques et stratégiques. Mais pas la nation russe, ni son peuple. Il a rappelé qu'il maintenait le contact avec Vladimir Poutine.
Bien sûr, on n'était pas, hier, dans la grande voix d'une France souveraine et non alignée, celle d'un Charles de Gaulle. Mais, Dieu merci, on n'était pas non plus dans un alignement benêt face à l'impérialisme américain. Il y avait, au moins dans le propos, les tonalités d'une France ayant sa politique propre, sans être un dominion de Washington.
J'avoue avoir été surpris. Jusqu'ici, depuis 57 mois, l'atlantisme d'Emmanuel Macron était sans faille. De même, son européisme. Sa confiance naïve dans une "communauté des nations" qui n'a jamais été qu'un leurre. Ses jugements historiques à l’emporte-pièce, comme celui sur les 132 ans de présence française en Algérie. Sa méconnaissance inquiétante du tragique de l'Histoire. Son inaction totale pour donner au peuple de France des voies institutionnelles de participation aux décisions, ce que réclamaient à juste titre les Gilets jaunes.
Oui, un bilan que je réprouve. Mais hier soir, c'était un bon discours. On a entendu la voix de la France qu'on aime : celle qui écoute les souffrances, mais veut donner sa réponse à elle. Et n'entend pas devenir le 51ème Etat américain.
Pascal Décaillet