Sur le vif - Vendredi 09.09.22 - 07.18h
Avatar de la délirante vague ultra-libérale de la fin des années 1990, qui haïssait l’Etat, la libéralisation du marché de l’électricité a été l’une des plus monumentales conneries de ces dernières décennies.
Bien seul à droite à l’époque, je la combattais. Même une partie de la gauche, aveuglée par la mode Tony Blair, défendait cette privatisation qui n’avait pas lieu d’être. L’électricité, comme l’eau, sont des biens publics.
Oui, j’étais bien seul à droite, il y a 25 ans. Pourtant, il existe une droite non-libérale, j’en fais partie. Pour l’entreprise, oui. Pour les PME. Pour les petits indépendants. Pour la plus extrême rigueur dans la gestion financière, à commencer par celle des deniers publics. Contre la machine tentaculaire de l’Etat. Contre les armadas de fonctionnaires. Contre les usines à gaz. Mais pas contre l’Etat en tant que tel, lorsqu’il accomplit sa tâche au service du bien commun.
Il y a 25 ans, ce discours ne passait pas à droite. Parce que la vague ultra-libérale, dévoiement du vrai libéralisme humaniste et patrimonial, déferlait sur notre continent. Ami des libéraux humanistes, ancien élève d’un très grand libéral (Olivier Reverdin), ayant accompli mes premières années de journalisme à la rubrique nationale du Journal de Genève, je combattais de toutes mes forces la déviance ultra, le primat de la spéculation boursière sur l’économie réelle, qui me passionne.
Mon père était ingénieur. Il était très actif, toute sa vie, pour animer des activités avec les anciens élèves de son École, dont il avait même présidé l’Association. Toute mon enfance, cela m’a permis de visiter des usines. En Suisse, mais aussi en Allemagne, et même en Suède.
Ces visites figurent parmi les plus beaux souvenirs de ma vie. Au même titre que les ruines archéologiques de la Grèce, du Proche-Orient. Au même titre qu’une église romane. La journée entière que j’ai passée, en juillet 1972, dans les usines VW de Wolfsburg, qui produisaient encore des Coccinelles, m’a marqué davantage que bien des livres. Oui, j’aime l’industrie, passionnément. Mais pas les spéculateurs.
Face à la crise énergétique, la Suisse doit trouver des solutions d’Etat. Pour cela, le politique doit s’imposer sur les féodalités et baronnies de l’électricité. C’est tout, sauf gagné. Les enjeux financiers sont colossaux. Les requins et vautours, omniprésents.
Pascal Décaillet