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Commentaires GHI - Page 194

  • Réhabilitons la politique, l'urgence est absolue !

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    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 05.04.17

     

    Ce qui se passe en France, dans cette présidentielle 2017, est tout simplement catastrophique. Nous sommes à un peu plus de deux semaines du premier tour, et on n’a pas encore parlé de l’essentiel : l’avenir de la France. On a parlé de la vie privée des candidats, d’emplois fictifs, de costumes. On a laissé débouler sur le plateau d’une émission politique, face à François Fillon, une écrivaine, spécialiste de l’intime, venue non pour dialoguer, mais pour exécuter en direct le candidat. On a sorti des « affaires » dont la plupart n’en sont pas. On a confondu rectitude morale et capacité à tenir le pays. On a laissé faire des médias irresponsables, juste avides d’audience. Mais des choix fondamentaux qui attendent la France, Europe ou non, euro ou non, protectionnisme ou libre échange, contrôle des flux migratoires, destin des agriculteurs, on n’a pas parlé. On a ruiné la politique. Il est urgent, en France comme ailleurs, de la réhabiliter.

     

    Car la politique est une grande chose. Je pense, chez nous, à ces centaines de conseillers municipaux, de députés dans les Grands Conseil cantonaux, à tous ces conseillers généraux en France, ou régionaux, anonymes, bosseurs, dévoués, qui sacrifient leurs soirées à plancher sur le destin commun. Rien que pour eux, ces hommes et ces femmes admirables, notre foi dans l’action publique demeure intacte. Car la politique, ça n’est pas se pavaner chez Ruquier, ou chez les bien-pensants de BFMTV. C’est donner une partie importante de son temps, donc de notre capital humain le plus précieux, à la collectivité. Ces gens, qui s’engagent, méritent mieux que le discrédit. Pour eux, il nous faut œuvrer à la reconquête d’une confiance commune.

     

    La politique est quelque chose de sérieux. Certains des hommes que j’admire le plus, dans cet art, de Pierre Mendès France à Willy Brandt, me fascinent par leur puissance de solitude, leur rigueur, leur lucidité, leur vision. Ainsi, Brandt jette les bases de l’Ostpolitik à la fin des années 60, seul contre tous, désavoué par « l’allié américain ». Mais il persiste, tient tête, s’agenouille devant le Ghetto de Varsovie, ouvre une ère nouvelle dans l’Histoire de son pays. Oui, la politique vaut mieux que les quolibets des humoristes de pouvoir, des chroniqueurs salariés par le Réseau dominant, que la traque – sous prétexte « d’investigation » - de paparazzi sur leur vie privée. Nous les journalistes, les médias, les éditorialistes, il nous appartient de replacer l’action politique dans la hauteur qui doit être la sienne, plutôt que de la reléguer dans la fange et le caniveau.

     

    Cela passe par des entretiens politiques qui portent sur l’essentiel, le fond. Et non par ce mélange, de plus en plus fréquent, entre vie privée, hobbys, sous prétexte « d’humaniser » la personne politique. Non, non et non ! L’humanisme oui, mais ça passe par la qualité de la parole, dans l’échange. Sans concession, certes, et même durement s’il le faut. Mais dans le respect des personnes. Sinon, c’est la mort de l’âme.

     

    Pascal Décaillet

     

  • La libre expression, notre bien le plus cher

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    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 29.03.17

     

    Sommes-nous bien conscients de ce privilège ? En Suisse, chacun d’entre nous est libre d’exprimer publiquement son opinion. Vous pouvez être de gauche ou de droite, protectionniste ou libre-échangiste, pour ou contre l’armée, la libéralisation du cannabis, le suicide assisté, l’euthanasie, vous êtes libre de le dire. C’est un trésor de notre démocratie, dûment et lourdement conquis au fil des générations qui nous ont précédés. Tous les pays du monde, de loin, n’ont pas cette chance. Bien sûr, cette liberté n’est pas absolue, aucune ne l’est. Elle doit respecter les lois de notre pays, notamment en matière de racisme. Elle doit aussi s’abstenir d’attenter à l’honneur des gens, par exemple en les diffamant. Mais enfin, ces restrictions posées, la marge de liberté est immense. Utilisons-la ! La liberté de pensée, contrairement à certaines piles, ne s’use que lorsqu’on ne s’en sert pas.

     

    La liberté d’expression est souvent invoquée par les seuls journalistes. C’est une aberration. Elle s’applique à tout le monde, entre autres les journalistes. Ces derniers peuvent s’en réclamer, mais ni plus ni moins que n’importe qui. Nous avons tous le droit d’exprimer ce que nous pensons. Mieux : avec l’avènement des réseaux sociaux, chacun peut se ménager un espace, un chez-soi, où il est totalement libre de tenir son journal, commenter l’actualité, partager l’information. Vous vous rendez compte de la révolution que cela est en train d’engendrer ? Chacun peut mettre en forme. Chacun peut éditer. Chacun peut publier. J’ai beau chercher, je n’entrevois pas, depuis la découverte de l’imprimerie par Gutenberg, ou la traduction de la Bible en allemand moderne par Luther (1534), de révolution plus fondamentale dans la diffusion des idées.

     

    A nous, dès lors, de nous montrer dignes de cet exceptionnel progrès. Ecrivons, partageons, critiquons. Ne ménageons ni nos joies, ni nos colères. Mais, je vous en supplie, en respectant la sphère privée, en se gardant de toute diffamation, bref en respectant tout simplement la loi. Pour ma part, je n’en demande pas plus : la loi, toute la loi, rien que la loi. La loi, et pas la morale dominante. La loi, et pas le carcan que voudraient nous imposer toutes sortes de pouvoirs. A commencer par le plus insupportable : celui des médias. En clair, on a le droit d’être pour Trump, contre Mme Merkel, pour Fillon, pour Poutine, pour Erdogan. Et on a, tout autant, celui de les combattre. Si on doit s’abstenir de toute diffamation, on ne doit aucunement, en revanche, se sentir lié par des confluences de pensée majoritaires, étouffantes, celles hélas que la majorité des médias tentent de nous imposer.

     

    Aussi paradoxal que cela puisse paraître, moi journaliste, qui ai consacré plus de trente ans de ma vie à ce métier qui me passionne, j’appelle le public à s’affranchir de la terrorisante tutelle de la juste pensée, véhiculée par les médias. J’invite chacun d’entre nous à penser par lui-même, en se nourrissant des mille sources de la vie intellectuelle. A penser, à formuler ses idées, à les exprimer. Mais, de grâce, dans le respect des personnes. Sinon, il en sera vite fini de cette prodigieuse révolution qui s’offre à nous.

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Coquille vide

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    Commentaire publié dans GHI - 22.03.17

     

    Un homme charmant, bien coiffé, bien habillé, gendre idéal. Un regard bleu, allumé, en phase avec l’excitation de vivre. Emmanuel Macron, chouchou des sondages, candidat des milieux bancaires, européens, candidat de l’euro, candidat de l’Allemagne, candidat de la Côte Est américaine, candidat de la mode, des médias, des chaînes TV, de la gauche urbaine branchée, a eu l’occasion, lundi 20 mars, de transpercer l’armure du paraître : lors du grand débat de TF1, il a parlé.

     

    Je m’en suis réjoui. Pour la première fois, il nous était donné d’accéder, chez ce produit de luxe de la course à la présidence, non à des apparitions de phénix, mais à un discours articulé. Vous savez, des phrases. Avec des sujets, des verbes, des compléments. Et, pourquoi pas, soyons fous, un contenu. Du sens.

     

    Las ! L’homme parle. Il est sympathique, c’est sûr. Le regard bleu attire. Il parle, mais ne dit rien. Les mots s’échappent, s’envolent, la parole est ailée, elle glisse, virevolte, chatouille l’entendement, mais personne ne saisit ce que le locuteur a bien voulu nous signifier. Je crois qu’on appelle cela, en linguistique, un discours sans référent.

     

    C’est un peu ennuyeux. Non pour le plaisir de l’oreille, encore moins celui des yeux, car l’homme est affable et fort agréable. Mais par rapport à la fonction briguée. Car enfin, il ne s’agit pas d’élire un bateleur aux Arts ménagers. Mais le Président de la République française. Un successeur à des hommes comme Charles de Gaulle ou François Mitterrand. Oui, c’est un peu ennuyeux. Malgré le regard bleu.

     

    Pascal Décaillet