Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Commentaires GHI - Page 196

  • Liberté de la presse : les fausses pleureuses

    16110575_271368383277953_1392303916326060032_n.jpg?ig_cache_key=MTQyNjI4NzczMTg0MzEzMzQ0MQ%3D%3D.2 

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 08.03.17

     

    En pleurant, à n’en plus finir, la disparition d’un hebdomadaire, en craignant comme la peste celle d’un quotidien, en répétant à l’envi que « la diversité de la presse en Suisse romande est menacée », que nous révèlent les accents de Requiem et les trémolos de ces voix d’Apocalypse ? Une véritable sensibilité à la pluralité des opinions, dans notre coin de pays ? Ou plutôt, la peur de voir s’évanouir ceux qui furent si longtemps les relais de leurs points de vue ? Ici, un centre-gauche européiste, né de Mai 68, libertaire dans les affaires de société, plutôt libéral, tendance Blair ou Schröder, dans les choix économiques. Là, un centre-droit, également libéral, libre-échangiste, en pâmoison face à l’organisation multilatérale du monde, avec ses armées de journalistes formés à HEI, cette matrice située à quelques mètres du siège mondial de l’OMC, quelques centaines de mètres de l’ONU.

     

    Parlons sérieusement. Pour l’immense majorité des gens, un « bon journal », c’est un journal qui pense comme eux. Un « mauvais journal », c’est celui qui leur dit ce qu’ils n’ont pas envie d’entendre. Ils ont évidemment tort, mais c’est ainsi. A vrai dire, il faut déjà une certaine évolution, une certaine connaissance du métier, pour arriver à faire la part des choses, juger en fonction d’une bienfacture, un niveau de professionnalisme, plutôt que du diapason avec ses idées, à soi. Dans ces conditions, rien de pire, dans la vie d’un journaliste, que le paternalisme des politiques, de droite ou de gauche, qui vous veulent du bien. C’est la pire des choses ! Bien pire, encore, que ceux, au moins francs du collier, qui cherchent par tous les moyens à avoir votre peau. Tous ces esprits protecteurs, providentiels, qui surgissent au lendemain de la fermeture d’un titre, déjà suffisamment triste comme cela, pour vous promettre une improbable résurrection, ou réclamer d’urgence une « aide à la presse, de la part des pouvoirs publics ».

     

    Ces belles âmes, si pures, eussent-elles fait preuve du même empressement, pour aider à naître  - ou empêcher de mourir - un journal d’extrême gauche, ou alors de la droite conservatrice, anti-libérale, protectionniste, régulatrice des flux migratoires ? La réponse, évidemment, est non. Ce que veulent conserver ces chers politiciens, c’est la caisse de résonance, pour leurs idées à eux, que peut constituer un titre, une antenne, un site. Ils ne s’intéressent qu’à cela. Ce qu’ils appellent « pluralité », c’est la défense de leurs idées, à eux. Dès que vous déboulez avec une autre vision, ils entreprennent toutes choses pour vous réduire au silence. Les mêmes, qui ne jurent que par la « diversité », se révèlent, à la première occasion, les pires censeurs. Je ne leur accorde, pour ma part, aucune confiance. Je préfère encore le rapport de vie et de mort, assez sain finalement, et en tout cas conforme à mon éthique de la guerre, qu’entretiennent de bons vieux ennemis. Allons, selon l’adage, combattre nos adversaires. Mais par pitié, qu’on nous nous protège des fausses pleureuses. Qu’on nous épargne la sollicitude de nos « amis ».

     

    Pascal Décaillet

     

  • Non aux obsédés du marché !

    2654-champ-de-ble-WallFizz.jpg 

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 01.03.17

     

    Pourquoi refusent-ils d’admettre, simplement, qu’ils se sont trompés ? Il y a dix, quinze, vingt ans, ils n’en pouvaient plus de nous administrer la leçon sur les vertus incomparables de l’échange. Libre circulation des personnes, des capitaux, des marchandises. Négociations multilatérales d’accords commerciaux, sous le haut arbitrage de l’OMC (Organisation mondiale du Commerce, siège mondial à Genève). Disparition des frontières physiques. Abolition des taxes douanières. Liquéfaction progressive des Etats et des nations, pour se fondre dans d’immenses conglomérats, comme l’Union européenne, ayant la taille du continent, pouvant ainsi « rivaliser avec la Chine ». Pour y parvenir, délégation de souveraineté des nations à ces grands ensembles. Il fallait penser grand, global, continental, planétaire.

     

    Le moins qu’on puisse dire est qu’on est revenu de cette idéologie. Les nations ne sont pas mortes. Les frontières sont vivement souhaitées par les peuples, demandeurs de contrôles beaucoup plus importants. La régulation des flux migratoires (qui n’est pas une fermeture des frontières) est, de plus en plus, exigée par la base. Les thèmes de la préférence nationale (ou, en Suisse, cantonale) ne sont plus du tout de l’ordre du tabou. L’idée, totalement vilipendée pendant les années 1990 et 2000, de protectionnisme, avance à grands pas. En matière agricole, où le niveau de vie des paysans atteint hélas des seuils catastrophiques, elle apparaît même comme une évidence. Bref, un peu partout dans nos pays, Suisse, France, Angleterre, sonne la fin d’une ère. Peut-être pas du libéralisme, grand mouvement de pensée politique, né des Lumières, parfaitement respectable. Non : plutôt la fin de l’acception « ultra » du terme, cette vague née des années 80, qui prétendait tout emporter sur son passage, pour le seul culte du libre-échange et du profit.

     

    Personne ne nie les vertus de l’échange. Le problème, c’est qu’au lieu de le tenir pour ce qu’il est, un moyen d’action, on l’a purement et simplement sanctifié. Jusqu’à favoriser exagérément, dans la politique économique suisse, le commerce extérieur par rapport, notamment, à l’agriculture. On a tout misé sur les uns, quitte à laisser tomber les autres. Car enfin, à quoi riment les paiements directs, s’ils ne s’inscrivent pas dans une volonté politique affirmée de promouvoir nos terroirs, nos produits, notre agriculture ? Pour suivre depuis plus de trente ans le dossier agricole, l’avoir couvert déjà du temps de Delamuraz, je puis affirmer que la Suisse, aujourd’hui, n’a plus de vision claire, offensive, dans ce domaine.

     

    De quoi avons-nous besoin ? De quoi, si ce n’est de nous sentir, ensemble, dans des réseaux de solidarités. En allemand, cela porte un beau nom : « Gemeinschaft », « communauté ». Cette intimité du lien entre les humains d’un même lieu, le libéralisme ultra, avec son exaltation de l’échange, et ses rêves mondialisés, a bien failli la casser. A nous de la reconstruire. La politique est une affaire d’hommes et de femmes, unis dans la citoyenneté. Ne la laissons pas aux obsédés du marché.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Délicieux prédicat

    2401172.jpg 

    Commentaire publié dans GHI - 22.02.17

     

    En France, M. Fillon n’est pas mon candidat. J’apprécie sa personne, sa retenue, ne me laisse en rien impressionner par les « affaires » sorties sur lui, mais son profil économique et social est beaucoup trop libéral pour moi. Pourtant, il y a eu, dans sa campagne, un moment que j’ai littéralement adoré, celui où il a tourné en dérision l’insupportable jargon de préciosité des pédagos, en dénonçant avec humour le mot « prédicat ». Juste à ce moment, j’ai aimé François Fillon, il m’est apparu comme un esprit libre, bien fait, indépendant, ne craignant pas, en pleine campagne de se mettre à dos une caste.

     

    D’ailleurs, qui s’est-il mis à dos ? Les enseignants ? Sans doute pas, qui pourraient bien être les premiers à souffrir de la prétention de quelques spécialistes à « rénover » un mode d’apprentissage de la grammaire qui a magnifiquement fait ses preuves, invite l’élève à décortiquer la phrase, en identifier les dépendances, bref aiguise son esprit critique.

     

    Né en 1958, j’ai la chance extrême, par l’école où je suis passé, les maîtres qui furent miens, d’avoir échappé à ce carnage. De sept à onze ans, au primaire, nous avons appris à fond l’analyse grammaticale, avec des compléments d’objet, direct ou indirect, des compléments circonstanciels. Puis, dès onze ans, au secondaire, l’analyse logique, en même temps que nous commencions le latin et l’allemand, avec les terminaisons qui changent en fonction des cas. Tout cet apprentissage était parfaitement construit, s’enchaînait. Il n’y avait ni prédicat, ni pédagos, Il n’y avait, pour moi, que le bonheur d’apprendre.

     

    Pascal Décaillet