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Liberté - Page 811

  • De la noblesse, et puis du style

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    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 08.11.17

     

    J’ai passé mes premières années dans le quartier de Sécheron, il y avait ces usines, qui me fascinaient, elles représentaient pour moi l’avenir, la croissance, et pourquoi pas un emploi futur, que j’imaginais, allez savoir pourquoi, dans l’industrie. Le seul mot « Sécheron », dans ma tête, a toujours été magique, même si le site de production a émigré à Meyrin, la multinationale ABB a englobé tout cela, il demeure un parfum de noblesse, celui de ces années où l’industrie genevoise avait encore des fleurons. De la noblesse, et puis du style.

     

    Aujourd’hui, ce qui se passe sur le site genevois d’ABB Sécheron est une catastrophe. Une centaine d’emplois supprimés, ainsi que 43 postes temporaires, pour cause de délocalisation dans la ville polonaise de Lodsz. D’aucuns se contenteront de hausser les épaules, ils nous diront que c’est la vie, que la bonne vieille industrie de naguère n’a plus sa place à Genève, qu’il faut se reconvertir dans les cleantechs.

     

    Je veux bien. Mais alors, pourquoi la fabrication des mêmes pièces aurait-elle davantage sa place au fin fond de la Pologne ? Parce que la vie y est moins chère ? Les salaires, moins élevés ? Une chose est sûre : le Conseil d’Etat, avec ses deux ministres responsables du dossier, MM Maudet et Poggia, doit entreprendre toutes choses pour trouver une solution. Si la politique économique et sociale d’un canton doit servir à quelque chose, c’est bien sur ce genre d’exemples qu’on en jugera. Les salariés d’ABB méritent au plus haut point qu’on les soutienne. Et l’industrie, y compris lourde, a encore sa place à Genève.

     

    Pascal Décaillet

     

  • France-Iran : l'espoir d'une ouverture

     

    Sur le vif - Mercredi 08.11.17 - 14.20h

     

    Le possible rapprochement, évoqué par le Monde, entre la France et l'Iran, après quatre décennies de froid, est une excellente perspective. Emmanuel Macron pourrait être le premier Président français, depuis 1976, à se rendre à Téhéran. 1976 : c'était encore l'époque du Shah, trois ans avant la Révolution.

     

    Réjouissante perspective, d'abord pour la diplomatie française. Depuis l'arrivée aux affaires du nouveau Président, au mois de mai, on peine à dégager des lignes directrices claires en matière de politique internationale, à part un alignement bien obédient sur Mme Merkel.

     

    Dans sa politique au Proche et au Moyen-Orient, la France doit avoir ses options propres, celles d'une longue tradition de dialogue avec le monde arabe ou (en l'occurrence) persan, qui ne doit strictement rendre aucun compte aux États-Unis d'Amérique. Ni à une "communauté internationale" noyautée par Washington.

     

    Perspective intéressante, aussi, pour l'échiquier politique du Proche et du Moyen-Orient. La vieille puissance perse, depuis des siècles, des millénaires, a, tout naturellement, un rôle de premier plan à y jouer. Cela, au-delà du régime qui règne en Iran : les régimes passent, la permanence des intérêts nationaux demeure.

     

    On nous permettra de trouver plus naturelles les tentatives d'arbitrage de Téhéran, dans cette région du monde, que les catastrophiques ingérences armées de Washington, tiens par exemple celle du printemps 2003 contre l'Irak.

     

    On nous permettra, aussi, d'attendre de la France, liée par son Histoire à un monde auquel les États-Unis n'entendent pas grand chose, d'entretenir, avec l'Orient compliqué, des relations choisies par elle-même. Et non dictées par Washington.

     

    La France que nous aimons est celle d'une diplomatie souveraine et non-alignée, nourrie de contacts et de réseaux culturels, renseignée sur l'Histoire et sur les forces en présence. Surtout, défendant le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. Cela tient en un discours, inoubliable : celui prononcé à Brazzaville, le 30 janvier 1944, en pleine guerre, par un homme seul, sans terre et sans appui : il s'appelait Charles de Gaulle.

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Trump, un an après : toujours l'homme à abattre !

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    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 08.11.17

     

    Il y a tout juste un an, Donald Trump était élu à la présidence des Etats-Unis d’Amérique. Elu, seul contre tous. Contre les médias. Contre les intellectuels. Contre les artistes de Hollywood. Contre l’incroyable campagne organisée pour l’abattre. Contre la puissance du clan démocrate, sa richesse, ses réseaux, ses ressources. Contre Mme Clinton, pourtant donnée grande favorite, et soutenue pendant toute la campagne par le président sortant, Barack Obama. Au matin du 9 novembre 2016, pour tout ce petit monde, y compris en Suisse romande, c’était la gueule de bois. Quelque chose s’écroulait. Un monde s’en allait, laissant la place à un autre. Un univers de références, de paramétrages, était soudain pulvérisé. Nos belles âmes, qui avaient tant fait campagne pour Mme Clinton, tant sanctifié Obama pendant huit ans, n’en revenaient pas. Un an après, elles sont toujours sous le choc. Et n’ont strictement tiré aucune leçon de ce qui s’est passé.

     

    Trump, aux affaires depuis le 20 janvier 2017, a-t-il convaincu ? La question est évidemment complexe, comme pour tout président, il y a de bonnes pistes dans certains domaines, des échecs dans d’autres, il faudra juger sur quatre ans, voire sur huit, pour l’heure c’est beaucoup trop tôt. En politique étrangère, je n’hésite pas à désigner une erreur majeure : vouloir défaire l’Accord sur le nucléaire avec l’Iran, qui était pourtant (avec Cuba) l’un des deux seuls succès, en huit ans, de la diplomatie d’Obama. Dans un Proche et Moyen-Orient compliqués, auxquels les Etats-Unis n’ont jamais compris grand-chose, il y avait là la possibilité de relancer un acteur majeur, historique, ancestral des grands arbitrages dans la région. Il faudra quand même que nous, en Suisse, commencions à entrevoir l’Iran comme autre chose que la caricature proposée par les Etats-Unis depuis 1979.

     

    Des actes du Trump au pouvoir, on peut, on doit discuter. Exactement ce que refusent de faire, depuis un an, dans notre bonne presse romande, les perdants du 9 novembre 2016. Pour eux, Trump demeure, plus que jamais, l’homme à abattre. Avec une avidité sans pareil, ils n’en peuvent plus de guetter le moindre de ses « dérapages », de condamner le plus furtif de ses tweets. Ils sont restés dans leur extase de l’ère Obama, ce « merveilleux danseur », tellement plus fin que l’autre, « l’emperruqué », dont on ne cesse de blâmer la vulgarité. A Trump, ennemi mortel, on ne pardonne rien. A commencer par son péché originel, celui d’avoir, il y a juste un an, eu le culot de se faire élire président à la place de Mme Clinton. Trump, le dévoyé, l’usurpateur. Il est là, il est au pouvoir, mais ça doit être une erreur, un cauchemar, une disjonction du prévisible : il est président, mais on n’arrive pas à s’y faire. Alors, on continue, à n’en plus finir, au moindre de ses actes, de ses propos, de lui déverser des tonnes de fiel. Un an après, la presse romande, toujours aussi uniforme, n’a toujours rien compris. Elle ne saisit plus le réel. Elle s’enferme dans l’éclat solitaire de ses certitudes.

     

    Pascal Décaillet