Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Liberté - Page 536

  • Tito, les Balkans, l'épopée

     

    Sur le vif - Lundi 04.05.20 - 14.59h

     

    Il y a juste 40 ans, le 4 mai 1980, disparaissait, à l'âge de 88 ans, l'une des figures majeures de l'Histoire des Balkans au vingtième siècle : Josip Broz, alias Tito. C'était un homme considérable, un géant.

    Sa biographie, notamment entre 1941 et 1945, mérite d'être étudiée jour après jour, tant elle est saisissante : non seulement il a résisté aux Allemands, mais il a fédéré sous sa bannière les mouvements de résistance, n'hésitant pas à liquider ses rivaux, comme le Colonel serbe Draza Mihailovic. Churchill avait fait son oeuvre, lui préférant Tito.

    Et puis Tito, c'est 35 ans d'Histoire de la Yougoslavie après la guerre, un pays où je m'étais rendu plusieurs fois de son vivant, et puis aussi après, bien sûr. Ce grand rêve d'une Fédération des Slaves du Sud, né des redécoupages de l'Après-Grande-Guerre, Tito avait su le tenir, l'activer, le vivifier.

    J'étais jeune encore, mais nous étions nombreux à suivre de très près cette expérience unique en Europe (à part l'Albanie), celle d'un communisme autonome, non-dépendant de Moscou, pratiquant la cogestion dans les entreprises, ne fermant pas ses frontières. Bref, un Non-Alignement qui, à l'instar de celui d'un Nasser un Égypte, ne manquait ni d'allure, ni de fierté nationale.

    Je me souviens, comme si c'était hier, de ce 4 mai 1980. J'avais déjà tant lu sur l'Histoire des Balkans, notamment entre 41 et 45. J'ai éprouvé ce jour-là, comme beaucoup, le sentiment très vif que l'unité yougoslave allait se déliter. Je ne pensais même pas qu'elle tiendrait encore une décennie.

    Il y eut la transition des années 80, complexe, passionnante. Et puis, il y eut la terrible décennie 1990-2000, qui vit les Balkans une nouvelle fois s'embraser. Et nos intellectuels parisiens à chemise blanche, étincelante, qui voulaient remplacer la connaissance historique par la morale et la philosophie, venir se pavaner sous tous les projecteurs. Pendant que l'OTAN, les États-Unis, les services secrets de M. Kohl, sous couvert de droit d'ingérence, plantaient leurs griffes dans une région qu'ils convoitaient depuis si longtemps. A vrai dire, depuis la Seconde Guerre mondiale.

    La vraie Histoire des Balkans demeure à écrire. Cela devra se faire par des historiens, ou alors peut-être par des poètes épiques, comme il y eut un Homère pour les guerres troyennes (on finit toujours par lire plutôt l'Iliade, sublime dans ses hexamètres, que le génial historien Moses Finley). Mais par pitié, surtout pas par des moralistes ! Ni même par des philosophes, avec leur prétention à la lumière et à l'horlogerie universelles. Là où le tragique de l'Histoire se nourrit du local, du particulier, de l'idiomatique, chaque théâtre d'opérations valant pour lui-seul, hors de toute leçon générale. Pour cela, il faut accepter de creuser, étudier les langues, les mythes fondateurs, lire les récits. Plutôt que chercher, comme un démonstrateur mathématique, à raisonner.

     

    Pascal Décaillet

  • La dette : non, non et non !

     

    Sur le vif - Lundi 04.05.20 - 11.25h

     

    La conversion du PLR à l'endettement, en matière cantonale genevoise comme en matière fédérale, constitue un total reniement des positions constamment défendues jusqu'ici par cette famille politique. L'un des virages les plus surréalistes de ces dernières années.

    Fidèle à mes principes en matière de gestion financière, comme citoyen et comme petit entrepreneur, je demeure, pour ma part, férocement opposé à cette facilité perverse et trompeuse.

    Mes mots-clefs : indépendance, travail acharné, gestion saine et rigoureuse, réduction des dépenses, confiance avec les partenaires, qualité des finitions, austérité, autonomie de décision. Tenir la ligne de front.

    Le reste, c'est du blabla.

    Ne lions pas nos destins à celui des usuriers.

     

    Pascal Décaillet

  • Comme le sous-préfet : aux champs !

     

    Sur le vif - Dimanche 03.05.20 - 14.23h

     

    Je ne pensais pas prendre un jour la plume pour regretter l'absence parlementaire dans mon pays. Mes idées, vous les connaissez : je me méfie viscéralement du monde législatif, pour le connaître trop bien, l'avoir fréquenté à Berne, puis ailleurs, dans les entrailles de son intimité. J'ai trop vu le système d'influences, le poids les lobbys, le jeu de miroirs des ambitions personnelles.

    Mon modèle est celui d'une démocratie totale, beaucoup plus de place prise par le suffrage universel, et des Parlements qui se contentent de faire les lois, sans la moindre mystification nécessaire du rôle "d'élu". Ils fabriquent les lois, soupèsent les virgules si ça les excite, votent un texte final, et si le peuple n'est pas content, il attaque la loi en référendum. Surtout, ce même peuple multiplie les initiatives, celles qui viennent d'en bas : les citoyennes, les citoyens sont la pierre angulaire de la nation, ce sont eux qui font la politique, et pas spécialement les élus. Tel est mon modèle.

    Vous pouvez partager ou non ma conception d'une démocratie totale, décrypter (si vous en avez les moyens) ce qu'elle doit à certains penseurs politiques de la première partie du vingtième siècle, dans des pays voisins du nôtre, et d'ailleurs aussi en Suisse. Je ne vous demande pas d'être d'accord, mais de prendre acte de ma conception.

    On aurait donc imaginé que d'autres que moi vinssent à la rescousse d'un pouvoir législatif que je n'adule guère. Oui, mais voilà : il y a eu la crise. Depuis deux mois, les exécutifs sont omniprésents, on ne voit et n'entend qu'eux. Sous l'imparable prétexte (en tout cas moi, n'étant pas médecin, je n'ai pas les moyens de la parade) d'urgence sanitaire, la Suisse est gouvernée par ukases, décrets, arrêtés directs. Le monde parlementaire, dont on nous répète à l'envi qu'il nous est vital par les vertus de son contre-pouvoir, a totalement disparu de notre espace politique. Il est quelque part, ailleurs, entre les fraises encore naissantes et les promesses de première menthe, entre l'Alpe et le marécage. Il est comme le sous-préfet de Daudet : aux champs.

    Les Parlements, en Suisse, ont intérêt à réussir leur retour. Ainsi, les quatre jours de session des Chambres fédérales, dès demain, seront jugés, non au contenu détaillé des délibérations, mais à la présence, à la justesse, au timbre, à la tonalité des voix qui s'exprimeront. Il ne s'agit pas tant de savoir si on va voter la variante A ou la variante B. Non, il s'agit, pour le Parlement, de montrer s'il sert encore à quelque chose dans ce pays, s'il est encore en mesure d'établir un contre-pouvoir à l'exécutif, d'en contrôler le travail et celui de l'administration, de représenter au mieux les intérêts du peuple.

    Si le Parlement devait échouer dans cette mission, alors beaucoup de nos compatriotes se rallieraient, dans les mois et les années qui viennent, au modèle exposé plus haut, celui que pour ma part je défends à terme.

    Dans tous les cas, Parlement fort ou Parlement faible, un troisième acteur, capital, doit lui aussi sortir de sa torpeur : le peuple. Entendez le corps des citoyennes et citoyens, ceux qui forment le suffrage universel, activent la démocratie directe, lancent des idées d'en bas, provoquent de vastes débats nationaux. Bref, la vraie sève politique de notre démocratie suisse, loin des arcanes parlementaires, des lambris du Palais fédéral, et de la combinazione inhérente à toute nomenclature.

    Quant aux fraises et à la menthe, nous irons nous aussi les cueillir. Lorsqu'elles seront mûres.

     

    Pascal Décaillet