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Liberté - Page 38

  • Sauver l'industrie suisse !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 26.06.24

     

    J’ai souvent évoqué ici ma passion pour l’industrie suisse, et ma colère suite à l’abandon de secteurs entiers, comme la métallurgie, dans des cantons comme Genève, ces quarante dernières années. Pire encore : l’indifférence, l’apathie que semblent éprouver les pouvoirs publics face à l’absolue nécessité de réinventer constamment une industrie suisse imaginative, compétitive, au service des Suisses eux-mêmes, donc du marché intérieur, pas seulement la vache sacrée de l’exportation. À se demander à quoi les ministres de l’économie, dans les Cantons ou au niveau fédéral, passent leurs journées !

     

    Une tribune libre, parue dans le Temps le 20 juin dernier, signée notamment de deux ténors de la politique suisse, Pierre-Yves Maillard et Pascal Broulis, me redonne quelque espoir. Elle appelle exactement à ce que j’esquissais : elle demande au Conseil fédéral une nouvelle impulsion, puissante, pour relancer l’industrie suisse. Au service de cette fameuse « transition », dont on nous rebat les oreilles, mais enfin, si on pouvait avoir des panneaux solaires suisses, plutôt que chinois, ce serait plutôt bien, non ?

     

    Une telle relance exige une vision d’Etat. Et une volonté protectionniste qui soit en rupture avec les grandes illusions libérales des trente dernières années. Sauver l’industrie suisse est une tâche nationale. Soyons dignes des radicaux du 19ème siècle, sans qui notre industrie suisse n’aurait jamais existé.

     

    Pascal Décaillet

  • Mais bon sang, intéressez-vous à l'Allemagne !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 26.06.24

     

    L’Allemagne. Notre grand voisin du Nord. Près de 90 millions d’habitants. Premier partenaire commercial. Quatrième puissance économique du monde. Géant industriel, avec une capacité de réinvention sans pareille, sur le continent européen, depuis bientôt deux cents ans. Une langue, une littérature, une musique, si riches, si passionnantes, qu’elles dévorent ceux qui y sont sensibles, comme le Roi des Aulnes, dans le poème de Goethe, s’empare de l’enfant, le dérobe à son père.

     

    L’Allemagne, c’est tout cela, et tellement plus encore. Le poids de l’Histoire, si tragique dans la première partie du vingtième siècle, mais qu’il faut assurément considérer avec ampleur, pour en saisir le fil de continuité, invisible dans un premier temps, mais qui se dévoile, au fil d’une vie d’études et de travaux. Oui, la compréhension de l’Allemagne se mérite de haute lutte, tout comme la langue grecque, ou n’importe quel sujet d’étude. Oui, il faut s’investir, s’immerger dans la passion, et doucement les connexions vous apparaissent, vous commencez, comme dans une révélation photographique,  à saisir l’unité d’une Histoire, d’un destin national, derrière les paravents de la diversité. Cela porte un nom : cela s’appelle un chemin de connaissance.

     

    Il serait terrible que ce cheminement demeure réservé à une élite. C’est pourquoi je vous invite tous, à commencer par ceux d’entre vous que l’Allemagne indiffère, à tenter quelques incursions sur les voies de connaissance. Allez sur place, et par pitié pas seulement à Berlin, longtemps destination préférée d’une jeunesse stupide, ne s’y rendant, par vols à bas coût, que pour y festoyer. Non, allez voir Hambourg, ma ville préférée en Allemagne, arpentez à pied cette cité hanséatique si riche d’Histoire, qui a su survivre au terrible bombardement britannique de l’été 43. Allez voir Lübeck, hanséatique elle aussi, la ville de Thomas Mann et de Willy Brandt. Allez voir Munich, les châteaux de Louis II, commencez même par cela, c’est le plus facile, le plus plaisant. Allez visiter la Ruhr, de grâce ne manquez sous aucun prétexte la Musée de la Mine et du Charbon à Bochum, vous y saisirez toute la bouleversante aventure des Allemands avec le charbon, depuis Frédéric II de Prusse (1740-1786). Allez voir Nuremberg, en pensant à Wagner, allez voir les dessins de Dürer. Allez voir Dinkelsbühl, Rothenburg ob der Tauber, perles médiévales intactes.

     

    Et puis, surtout, prenez le temps de visiter les cinq Länder de l’ex-DDR : la Saxe, la Saxe-Anhalt, la Thuringe, le Brandebourg, et tout au Nord le verdoyant Mecklenburg-Vorpommern. Allez absolument voir Weimar, mais aussi Dresde, Görlitz, Magdeburg, Potsdam, Leipzig, Rostock. Prenez avec vous un livre de Thomas Mann, un Lehrstück de Brecht, écoutez Bach, Beethoven, Wagner, Richard Strauss, celui de l’Elektra et du Rosenkavalier. Baignez-vous dans la Baltique. Ne manquez pas Francfort-sur-l’Oder, la ville de Kleist, à la frontière polonaise. De grâce, tournez-vous vers l’incroyable diversité de toutes les Allemagnes. Elles en valent la peine, infiniment. Excellent été à tous !

     

    Pascal Décaillet

  • François Lachat : cinq secondes, inoubliables

     
    Sur le vif - Lundi 24.06.24 - 15.34h
     
     
    Cinq secondes, peut-être six. C'était, hier soir au19.30h RTS, l'intervention de François Lachat, dans la belle émission spéciale de Jennifer Covo à Delémont, pour marquer les 50 ans du plébiscite de 1974.
     
    Cinq secondes, c'est court. Mais cet admirable père fondateur, tellement attachant, premier Président du gouvernement jurassien, aujourd'hui octogénaire, a été, une fois de plus, bouleversant.
     
    Cinq secondes, pour laisser sortir toute l'intensité de son émotion. Et la nôtre. Et la mienne.
     
    Le même François Lachat, dans l'après-midi du vote historique du 24 septembre 1978, proclamant les résultats devant la foule, avait simplement dit "Citoyennes, citoyens, victoire !". La simplicité révolutionnaire de ces trois mots, sur le moment, m'avait profondément touché.
     
    Le peuple et les Cantons de la Suisse, ce jour-là, venaient d'accueillir le Jura comme 23ème Canton de la Confédération.
     
    J'avais vingt ans et trois mois. A l'époque, le droit de vote était à vingt ans. Le tout premier vote de ma vie, ce fut, ce jour-là, pour dire OUI, du fond du coeur, à la République et Canton du Jura. L'année précédente, 1977, j'avais fait mon service militaire, il y avait des Jurassiens dans la compagnie, ils chantaient la Rauracienne pendant les marches. Ils avaient conquis mon coeur.
     
    Oui, c'était une belle émission de Jennifer Covo. Avec la Conseillère fédérale jurassienne, rayonnante au milieu des siens. Avec la foule, joyeuse. Et avec ces cinq secondes d'un grand Jurassien, et d'un grand compatriote suisse. Cinq secondes, inoubliables.
     
     
    Pascal Décaillet