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Liberté - Page 242

  • Le peuple élague et clarifie

     
    Sur le vif - Samedi 23.04.22 - 09.52h
     
     
    Nous, les citoyennes et citoyens, pouvons faire la politique nous-mêmes, directement. Nous disposons, en Suisse, des armes pour cela. La démocratie directe est une chance inouïe. Elle est une grâce. Elle est faite pour qu’on s’en serve, non pour qu’on la laisse dormir.
     
    Le peuple qui vote (démos) n’est pas une masse de rue, qui braille derrière des pancartes. Il est une institution de notre système politique. Comme les parlements. Comme les gouvernements. Mieux : il est celle qui prime sur les autres. Le peuple n’a pas « raison », comme on le dit faussement. Mais il tranche. Il décide, en ultime instance. Il est le souverain.
     
    Nous attachons beaucoup trop d’importance aux partis, à leur cuisine, à la vie interne des parlements, aux corps intermédiaires, aux milliers de féodalités associatives qui fragmentent l’unité de notre pays. Notre Suisse est multiple, certes, c’est son secret et c’est son charme, mais il n’est écrit nulle part qu’il faille ajouter à cette diversité naturelle des strates infinies de complexité. La Suisse a besoin de simplifier ses équations : des domaines comme la gestion de l’asile, la politique de santé, sont devenus illisibles, par surabondance d’acteurs, de baronnies.
     
    Les partis, les corps intermédiaires, la toile associative alourdissent l’équation. Le peuple simplifie. Le Nœud Gordien, il le tranche. L’initiative populaire modifie la Constitution, les parlements font des lois d’application (ils le doivent, et trahissent s’ils s’y dérobent, comme pour le 9 février 2014), et l’affaire est réglée.
     
    Nous avons besoin du peuple, pour élaguer le foisonnement d’herbes inutiles. Pour voir clair. Pour voir loin. Les droits populaires doivent être défendus de toutes nos forces. Le meilleur moyen de leur rendre hommage, c’est, tout simplement, de les utiliser.
     
     
    Pascal Décaillet

  • Colleurs d'étiquettes

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 20.04.22

     

    Se contenter de coller des étiquettes sur l’adversaire, pour le disqualifier et éviter tout débat, ça marche de moins en moins. Et bientôt, ça ne fonctionnera plus du tout. « Fasciste », « xénophobe », « populiste », les bonnes vieilles rengaines, si commodes pour jeter l’autre dans le camp du Mal, et s’ériger soi-même dans celui du Bien, c’est bientôt fini. Le truc est usé, laminé, jusqu’à la moelle.

    Elle date de quand, cette vieille ficelle ? Au moins de Mai 68, lorsque fleurissaient, sur les murs de Paris, des slogans aussi efficaces (à l’oreille) que scandaleux sur le fond. Exemple : « CRS-SS ! », où les Compagnies républicaines de sécurité, qui n’étaient certes pas des tendres dans les manifs, se voyaient comparées, 23 ans après la guerre, avec les tueurs nazis. Le slogan sifflait, il était d’une incroyable efficacité acoustique, mais l’assimilation était tout simplement scélérate. A l’âge de dix ans, très informé déjà de la Seconde Guerre mondiale, je trouvais ces cinq syllabes inadmissibles.

    Les colleurs d’étiquettes seront bientôt à bout de souffle. Parce que leur vieux truc ne marche plus. En France, en Suisse, dans toute l’Europe, les gens veulent des réponses sur le fond. La souveraineté de leur pays. Son indépendance. Un contrôle drastique des flux migratoires. Une éducation de qualité, sans fadaises. Une maîtrise nationale de l’agriculture, de l’industrie, de l’alimentaire. Une fiscalité raisonnable. Un pouvoir d’achat correct. Ils veulent que l’on parle de cela. Les étiquettes, ils s’en foutent.

     

    Pascal Décaillet

  • Recoudre la France

     
     
    Sur le vif - Vendredi 22.04.22 - 10.19h
     
     
    Après-demain, les Français rééliront un conservateur. L'homme de l'Ancien Régime, de l'Ancien Monde. L'homme qui a "oublié", nous dirons "omis", d'installer la proportionnelle. Il avait cinq ans pour le faire. L'homme qui est resté sourd à toutes les revendications des Gilets jaunes, pouvoir d'achat, droits populaires.
     
    Prenez le dernier chapitre de l'interminable débat de mercredi, de loin le plus intéressant : les pouvoirs du peuple. En Suisse, nous connaissons bien. Marine Le Pen arrive avec des propositions parfaitement claires, innovantes, révolutionnaires. Une conception de la primauté du peuple qui rappelle avec éclat le système suisse : le souverain, c'est lui. Emmanuel Macron ne cesse de lui dire : "En grillant les corps intermédiaires, nous irions contre la Constitution". Juste que, précisément, c'est la Constitution que sa rivale veut modifier. Il fait semblant de ne pas entendre. Il ne veut juste rien changer.
     
    En France, l'aspiration à des droits populaires donnant aux citoyennes et citoyens la possibilité d'intervenir directement sur le fond (comme, chez nous, l'initiative), est tellurique. C'était ça, les Gilets jaunes. Dans ce domaine, comme dans les sujets sociaux, Marine Le Pen incarne une volonté révolutionnaire. Face à elle, le Président sortant se cramponne aux corps intermédiaires, défend les corporations d'Ancien Régime. C'est un homme très conservateur, libéral en économie, très sceptique sur les grandes réformes sociales. Il ne rappelle absolument pas Charles de Gaulle, puissant rénovateur d'institutions, mais Georges Pompidou. La France de la prudence, du bas-de-laine.
     
    Sans doute, après-demain, la France réélira-t-elle cet homme-là. Elle l'aura voulu. Mais elle sera coupée en deux. Aux grandes colères sociales, aux souffrances, au sentiment d'oubli et d'abandon, à l'urgence d'une régulation drastique des flux migratoires, une moitié du pays n'aura pas de réponses. Ces deux France irréconciliables, il faudrait la grandeur d'un Roi Henri, oui le Quatrième, pour les recoudre.
     
    "Recoudre". Tiens, ce mot juste et simple était dans son discours, à elle. Pas dans le sien, à lui.
     
     
    Pascal Décaillet