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Sur le vif - Page 92

  • Foutez-nous la paix avec les personnes !

     
    Sur le vif - Jeudi 04.05.23 - 17.15h
     
     
    Ah non, vous n'allez pas recommencer ! Les noms, les visages, les affiches électorales, la machine à moudre des ambitions personnelles, pour un moment, ça suffit. Jusqu'à la rentrée du 21 août, en tout cas.
     
    Nous sortons à peine d'une élection, c'était il y a quatre jours. Et voilà que le microcosme, plus replié que jamais dans les salons de l'entre-soi, a l'indécence de venir déjà tartiner sur l'élection de cet automne (22 octobre, puis 12 novembre) au Conseil des Etats.
     
    C'est à désespérer. Depuis de longues années, j'affirme ici que la politique, ça doit être un combat d'idées. Il doit être interne, non au petit monde des élus, mais à l'ensemble des citoyennes et citoyens. Depuis une éternité, j'ajoute que les votations priment, et de loin, sur les élections. Parce qu'elles concernent les thèmes, et non les personnes. Ces thèmes que je vous présente, infatigablement, dans mes émissions, mes commentaires, mes éditos : pouvoir d'achat, fiscalité, classes moyennes, santé, accès aux soins, formation, emploi des jeunes, dignité des retraites, etc.
     
    Il y a eu des élections, nous les avons couvertes. A fond, et comme jamais. Et je sais de quoi je parle, je suis journaliste politique depuis bientôt quarante ans. Nous avons fait le job. Pour ma part, j'ai présenté soixante candidats au Grand Conseil, aux Visages de Campagne. Jérémy Seydoux, avec notre consœur Sylvia Revello, du Temps, ont animé de remarquables débats, avec tous les candidats au gouvernement. Dimanche encore, nous étions sur le pont.
     
    Mais maintenant, ça suffit. Pour ma part en tout cas, je ne veux plus entendre parler d'ambitions personnelles, ni du micmac des officines politiques pour le Conseil des Etats. D'ailleurs, j'ai toujours préféré l'élection au National, Dieu merci à la proportionnelle depuis 1919, elle a - elle - un sens représentatif sur le rapport de forces entre les masses tectoniques de notre géologie politique. C'était ça, l'idée du Comité d'Olten, juste avant la Grève générale de 1918. Je ne suis pas un homme de gauche, mais c'était un grand dessein.
     
    Mais franchement, se mettre à disserter, début mai, sur une élection aux Etats qui se déroulera dans six mois ! Election que je n'aime pas : avec ce système à deux tours, elle favorise les alliances, tout cette cuisine des états-majors qui n'a aucun intérêt emblématique pour le sens profond du combat politique. Un visage sur un tram ne fait pas encore une valeur citoyenne.
     
    Jusqu'au 21 août, à part pour quelques rebondissements ou surgissements, je demeurerai dans la ligne qui est mienne depuis tant d'années : m'intéresser aux VRAIS SUJETS qui préoccupent les gens. Me passionner pour le remboursement des frais dentaires, la baisse d'impôts pour les classes moyennes, la vitalité des PME.
     
    Mais franchement, saliver, dès le temps du muguet, sublime et suspendu comme trois notes de Mozart, pour le miroir aux ambitions sénatoriales, non merci !
     
     
    Pascal Décaillet

  • Le seul, le vrai pouvoir, est là

     
    Sur le vif - Mardi 02.05.23 - 08.39h
     
     
    Je suis profondément républicain. Je l'étais déjà en Mai 68, j'allais sur mes dix ans, je détestais la rue, je soutenais de Gaulle. Et toute ma vie, j'ai rejeté l'anarchie, y compris venant de gens particulièrement séduisants à mes yeux, poètes notamment.
     
    Bref, très tôt dans ma vie, j'ai été très mûr. Politiquement, je n'ai pas eu d'enfance. J'allais à la Bibliothèque municipale, le jeudi ou le samedi, avec un ami, nous avions onze ou douze ans, il lisait "Contes et Légendes" de tel pays, moi je lisais le Monde, la NZZ, le Journal de Genève. Il me fallait du réel. Je voulais tout savoir de l'Histoire allemande, l'Histoire de France, l'Histoire suisse.
     
    Cette maturité, pour dire qu'on ne me soupçonnera pas d'être un rêveur de la dissolution du pouvoir, ce qu'était le grand Léo Ferré, que j'ai eu l'honneur de voir six fois sur scène.
     
    Et pourtant, cher amis. Plus je vieillis, plus je déteste le pouvoir. Tout pouvoir, d'où qu'il vienne. Le pouvoir exécutif, en politique, derrière lequel je lis, en absolue transparence, la comédie des ambitions personnelles. Mais tous les autres pouvoirs aussi, patriarcat, mandarinat, et tant d'autres.
     
    Je ne déteste pas les gens qui exercent le pouvoir. Non, je déteste le pouvoir qui s'instille en eux, ce venin qui de l'intérieur les corrompt, les salit. Il les isole. Il les rend aveugles et sourds. Il les noircit de sa malédiction primale. C'est valable pour nous tous, je ne m'exclus en aucun cas du portrait.
     
    Alors voilà, avec les années, l'homme vieillissant devient moins mûr que l'enfant de dix ans qu'il était. Moins vieux. Tellement plus ouvert à la beauté du monde.
     
    Et puis, quoi ? Il me suffit d'écouter onze secondes Martha Argerich, dans n'importe quelle oeuvre, pour me dire : "Le vrai, le seul pouvoir est là". Dans le miracle de cette partition. Dans l'absolu génie de l'interprétation. Dans ce salut à la mort, comme d'autres saluent le soleil, dans l'aube d'un été.
     
     
    Pascal Décaillet

  • La Sainte Famille

     
    Sur le vif - Lundi 01.05.23 - 15.04h
     
     
    Est-ce un effet de ma fatigue ? Une partie de ce nouveau Conseil d'Etat me fait penser à une Sainte Chapelle. Un cloître, avec des chapiteaux romans, représentant de diaboliques créatures animales, des langues, du venin. Au milieu de la cour carrée, un jardin, magnifique, des fleurs partout. Roses, glycines, jasmin.
     
    Omniprésente, douce comme le silence, la bienveillance d'une Mère supérieure. Autour d'elle, avec la diligence ouvrière des abeilles, novices et nonnes aguerries. On ne parle pas vraiment, on chuchote. La Sororité le dispute à la douceur des sens. Parfum d'équilibre. L'Aventin.
     
    Mais tout de même, au sommet des colonnes plein-cintre, ces reptiles au regard qui tue. Immobiles. Jusqu'à quand ?
     
     
    Pascal Décaillet