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Sur le vif - Page 801

  • Ecopop : chacun en conscience

     

    Sur le vif - Dimanche 09.03.14 - 16.34h

     

    Avec Ecopop, cette initiative sur laquelle nous devrions nous prononcer avant la fin de l’année, c’est reparti comme en quarante. Le Conseil fédéral, nous dit-on, ne veut pas de cette initiative. On va aussi nous dire que les Chambres fédérales n’en veulent pas. Tout cela sera certes exact, mais le problème – toujours le même – c’est que l’avis du Conseil fédéral et celui du Parlement n’ont pas beaucoup d’importance dans une initiative.

     

    Une initiative, dans notre démocratie suisse, est un défi lancé au peuple par une fraction du peuple. Lancé à l’ensemble du corps électoral, par un tout petit groupe, au départ, un comité d’initiative. Le but ultime n’est absolument pas de convaincre le Conseil fédéral, ni les Chambres, traditionnellement hostiles à cette démocratie directe qui vient les déranger. Et pour cause : si, d’en bas, on ressent la nécessité de procéder par voie d’initiative, c’est parce que les problèmes concernés ont, du point de vue des initiants, été négligés par les élus. Une initiative est bel et bien, chez nous, un mécanisme correctif à la gouvernance législative ou exécutive. Nos voisins nous l’envient. Et ils ont raison.

     

    Malgré tout cela, l’immense majorité des médias, SSR en tête, insistent de façon appuyée, non sur une présentation de l’initiative, mais sur son rejet par les corps constitués. Le point de vue de ces derniers n’est pourtant qu’un indicateur parmi d’autres. Il n’a pas à être à ce point mis en valeur. Une initiative, c’est une affaire du peuple avec le peuple. Le peuple, face à lui-même : qu’on lui laisse au moins cela, dans un système où la démocratie représentative a déjà pris tant d’importance.

     

    Pour ma part, je considère Ecopop comme la votation la plus importante de notre calendrier démocratique. J’aurai largement, dans les mois qui viennent, l’occasion d’y revenir. J’encourage, comme chaque fois, chaque citoyenne, chaque citoyen à se forger sa décision par lui-même. La traditionnelle démolition du texte par le pouvoir en place, relayée par la SSR et la majorité des médias, sans parler d’Économie Suisse, nous renvoie à notre responsabilité individuelle de citoyen. J’emprunte ce terme à la terminologie de mes amis protestants. Parce qu’en politique, je crois dur comme fer à la conviction indivisible de chaque unité de vote. La vôtre, la mienne, la nôtre à tous.

     

    Ah, au fait, puisqu’on parle d’Économie Suisse : adversaires d’Ecopop, n’hésitez pas à lancer à nouveau ces fins limiers de la rhétorique politique. On connaît désormais leur redoutable efficacité.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Le MCG est à droite - Et alors ?

     

    Sur le vif - Jeudi 06.03.14 - 09.46h

     

    M. Sciarini nous fait toute une démonstration, dans le Temps, pour nous prouver que le MCG est à droite. Mais enfin, qui en doutait ? Qui a en jamais douté une seule seconde ? Où est le problème ? C'est interdit, d'être à droite ? Comme s'il était scélérat que le groupe parlementaire de ce parti construise des majorités avec le PLR et l'UDC au Grand Conseil.


    Bien sûr que c'est un parti de droite. L'appellation "Ni droite, ni gauche" ne dupe personne, et ne veut strictement rien dire. S'étonner de son appartenance à la droite (avec une composante sociale, populaire, et si ça peut vous faire plaisir "populiste"), serait ramener, par ignorance historique, la droite à sa seule famille libérale, ce qu'en effet le MCG n'est pas.


    Et justement, ramener la droite, cette grande famille de pensée politique depuis deux siècles, au seul libéralisme, surtout celui que nous avons connu depuis vingt ans avec le profit sans entraves, la libre circulation pour le seul profit de quelques-uns, le Capital comme Veau d'or et le tout aux actionnaires, bref cet orléanisme bancaire, c'est méconnaître profondément les autres dimensions, autrement puissantes, de la droite. Notamment une dimension sociale et populaire dont il n'est pas question que la gauche s'arroge le monopole.

     

    Oui, il existe une droite venue d'en bas, une droite du peuple, joyeuse et conviviale, attachée au lien social. Différente de la gauche pour des raisons bien davantage CULTURELLES (j'y reviens volontiers) que politiques. Mais enfin, le partage, la fraternité, le sentiment d'appartenance républicaine n'ont pas à être détenus de façon exclusive par la gauche. Si la droite laisse filer cela, qui est tellement important, au profit d'une image de cléricature censitaire ou ploutocratique, alors elle aura tout perdu.



    M. Sciarini, qui a sans doute une vaste culture de gauche, pêche par méconnaissance - due à un manque d'affinités ? - lorsqu'il s'exprime sur la droite. Sans remonter à la Convention, ni à Tocqueville, ni à Joseph de Maistre, ni au Ralliement de Léon XIII à la République (1891), on dira juste qu'il y a deux siècles d'imprégnation et de connaissances à prendre en compte. A lire par exemple, de toute urgence, dans la même édition du Temps, celle de ce matin, le lumineux papier d'Olivier Meuwly sur l'UDC.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Sublime comme le silence de la prière

     

    Sur le vif - Mardi 04.03.14 - 17.14h

     

    Le sentiment de la nature est-il inné ? Survient-il avec l’âge ? Accompagne-t-il la peur de la mort ? Sublime-t-il la vie ? Pourquoi l’irruption d’un lièvre, au petit matin, nous bouleverse-t-elle ? Que vivent nos frères animaux ? Pourquoi ai-je cru voir, ce matin, près de Bernex, mon premier milan noir de l’année, et cette apparition a-t-elle accentué en moi l’idée de la vie recommencée ? Pourquoi toute promenade est-elle une renaissance ? Ces quelques questions, je les avais à l’esprit en lisant avec passion le livre de Philippe Roch sur Robert Hainard.

     

    L’ancien patron de l’Office fédéral de l’environnement est l’un des fils spirituels du génial peintre animalier (1906-1999). Ce livre n’est pas une biographie, mais une initiation à ce qu’a pu être la philosophie de la nature chez Hainard. Par le concept. Mais surtout par la vie, l’expérience, les milliers d’heures à guetter la vie animale, la nuit, à l’aube, au crépuscule, dans ces moments où tout commence et tout s’éteint. Alors oui, le peintre, graveur, nous est décrit comme l’homme au milieu de la nature, perclus du mystère de cette dernière. L’homme en communion. Avec qui ? Dans l’ordre de quelle mystique ?

     

    Un livre sur la matière. Mais où tout est esprit. Éloge de la matière, références à Kant, Aristote, ancrage dans le paléolithique, résurrection des totems, Philippe Roch nous transporte dans un univers où l’homme ne serait qu’un invité. Un passant. Il aurait à observer le monde, s’en imprégner, vivrait la matière « comme résistance » (page 52). Tel Hainard, qui croque, esquisse, dessine, peint ou grave, toujours dans l’ancrage du concret. Mais pour nous amener où ? Vers quelles hauteurs, quelles profondeurs ?

     

    Cette nature-là, celle de Philippe Roch lorsqu’il nous parle de Robert Hainard, nous bouleverse. Elle conserve la fraîcheur immaculée de l’apparition, l’instantané de la rencontre. Le doute, la stupeur : ai-je bien vu ? Ai-je bien vécu ce moment ? A lire d’urgence. D’abord, pour les références en termes de philosophie de la nature. Plus encore, pour la profondeur du sentiment émotionnel qui, de la première à l’ultime page, parcourt et traverse le livre. J’ose le dire : comme un bréviaire. La sonorité d’une liturgie. « L’odeur du bois » (page 9). Le silence, tellement éloquent, de la prière.

     

    Pascal Décaillet

     

    *** Le penseur paléolithique - La philosophie écologiste de Robert Hainard - Par Philippe Roch - Editions Labor et Fides - Mars 2014 - 241 pages.