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Sur le vif - Page 800

  • "Ni gauche, ni droite" : l'attape-nigauds

     

    Sur le vif - Samedi 15.03.14 - 10.33h

     

    Le 6 octobre 2013, le peuple genevois a porté au Grand Conseil une majorité très nette de la droite élargie. Hier soir, cette majorité s'est simplement mise en action. En termes de mécanique politique, rien d'autre. Le politique est un rapport de forces.



    Hier soir, le MCG a simplement prouvé ce qu'il était: un parti de droite. Qui a pu jamais, une seule seconde, en douter ? Droite sociale, populaire, allez populiste si ça vous fait du bien de dire ce mot qui n'a d'ailleurs rien de péjoratif. Mais droite, of course. Le slogan "ni droite, ni gauche" n'est qu'un attrape-nigauds. D'une chiquenaude, il prétendrait abolir toute la gravité économique et sociale de la lutte des classes. Dans ces deux domaines, bien sûr qu'il existe une gauche, et qu'il existe une droite. Nous ne vivons pas avant l'Histoire, ni après l'Histoire, dans une prétendue post-modernité de bobos. Nous vivons DANS l'Histoire, à l'intérieur de ses mécanismes, de son tragique, de l'immuable noirceur de ses jeux de pouvoir.



    Le jeu du MCG, hier, avec la droite immobilière, ne m'a personnellement pas fait plaisir du tout. Le scandale de la Tulette, toute cette atmosphère de copinage éhonté, me choquent comme tout le monde. Mais en analyse politique, faisons abstraction de nos déplaisirs moraux. Nous avons au Parlement une nouvelle puissance de feu de vingt députés, capable de faire la différence, sur la droite (comme hier), mais aussi (on attend et espère le voir) sur la gauche. C'est toute l'ambiguïté, toute l'imprévisibilité de cette puissance de feu qui rend fous de jalousie les autres partis. Hier, colère de la gauche, parce qu'elle fut écrasée par la mécanique adverse. Demain (on l'espère et on l'attend), colère de la droite économique, le jour où le MCG, tout en étant de droite, réaffirmerait sa dimension sociale, populaire et joyeuse.


    Hier, ce parti ne fut ni social, ni populaire, ni joyeux. Il fut l'acolyte de la droite immobilière. Pour des raisons tactiques. Pour tester sur la législature la redoutable puissance de frappe de son grenadier lance-flammes Ronald Zacharias. Pour s'affirmer comme le faiseur de majorités. En technique politique, ce fut bien joué. En lisibilité auprès de la population, encore deux ou trois coups comme cela pendant la législature, et bonjour la dégringolade aux élections de 2018.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Loi Longchamp : les oublis de la TG

     
    Sur le vif - Mercredi 12.03.14 - 09.26h
     
     
    Il y a deux dimensions dans la fronde de "certains députés de droite" contre la loi Longchamp (PPE). Il y a d'abord le fond: sur ce point, il faut bien reconnaître que le projet du Conseil d'Etat présente une dimension plus sociale, ouverte au plus grand nombre, que ce que réclame le quarteron de mousquetaires de droite qui a mené la guérilla contre lui. Mais il y a aussi - et il est étonnant que la TG omette de mentionner cet aspect - toute l'ampleur de la leçon qu'une partie de la droite parlementaire, au-delà du sujet lui-même, veut donner à un magistrat dont l'arrogance et la volonté d'extension de pouvoir et de placer les siens partout, sont sans limites.
     

    Alors, je dis à la TG: quand vous évoquez un sujet, traitez-le jusqu'au bout. Jusque dans sa dimension humaine, qui implique la rude noirceur des jeux de pouvoir. Parce que juste montrer la tête de deux socialistes (un gentil et un méchant), en une, qui volent au secours du gentil magistrat radical contre les hideux promoteurs - dont on laisse entendre dans l'édito que l'un d'eux roulerait pour lui ad personam - là c'est promouvoir une vision partielle. Et partiale. C'est, une fois de plus depuis tant d'années, faire le jeu de l'homme de pouvoir François Longchamp. La TG est devenue le véritable porte-parole officiel de ce conseiller d'Etat, ainsi que de son acolyte Pierre Maudet. C'est son droit. Mais il faut juste le dire.
     
     
    Bref, si demain soir, le Grand Conseil se contente de désavouer les mousquetaires de la droite et de revenir purement et simplement au projet Longchamp (avec, pour la forme, quelques corrections centristes, juste destinées à ne surtout pas se brouiller avec le pouvoir), les PPE seront peut-être vaguement gagnantes, soit quatre ou cinq mille personnes dans un canton qui en compte près d'un demi-million, c'est dire à quel point nous sommes dans un sujet luxueux. Mais le signal d'inféodation donné à l'arrogance au pouvoir serait catastrophique. C'est cela, en évident filigrane du sujet lui-même, le véritable enjeu de ce vote. Il émarge au rapport de forces interne à la droite, en cela il est l'un des combats amiraux de positionnement des troupes pour la législature. Si la TG ne veut pas voir cela, tant pis pour elle.
     

    Nombre de gens, à Genève, sont plutôt d'accord, sur le fond, avec le Conseil d'Etat, dans cette affaire. Mais un nombre au moins aussi grand verrait d'un très bon œil que le magistrat en question reçoive une bonne leçon de la part d'un Parlement qu'il n'a cessé de rabaisser. Jusqu'à demander, il y a quelques semaines, un vote nominal, au mépris de toute séparation des pouvoirs, ce que le Perchoir aurait aussitôt dû lui rétorquer avec toute la fermeté d'usage.


    Hélas, au Perchoir, cette année plus que jamais, la barbichette est reine.
     
     
    Pascal Décaillet
     
     
     

  • Madrid, dix ans après

     

    Sur le vif - Mardi 11.03.14 - 17.03h


    Il y a, jour pour jour, dix ans, je m'envolais pour Madrid, pour une édition spéciale de Forum, réalisée en direct au milieu de la foule, le soir même de l'attentat de la gare d'Attocha. Nous avons fait une heure d'émission, place de Castille, au milieu des Madrilènes sous le coup de l'émotion et de l'incompréhension. Pendant notre direct, un journal gratuit, distribué à la population, avançait un peu vite la thèse de l'ETA.



    L'attitude des Madrilènes, comme celle des gens de Nanterre au soir du drame du 27 septembre 2002 (un forcené avait tiré sur les élus municipaux), avais forcé mon admiration. Dans les deux cas, une communauté humaine sous le choc de la violence extrême. Mais une communauté qui dit non à la fatalité. Qui se ressaisit. Affirme avec puissance sa volonté de continuer à vivre un destin commun. Avec des règles. Des joies communes. Des peines communes.



    Finalement, une victoire de la vie.



    Le soir, nous étions allés sur les lieux du drame.


    Aujourd'hui, dix ans après, mes pensées vont aux victimes. A leurs proches. Et à la ville de Madrid. Qui nous avait donné une leçon. Ce jour-là, la fierté hispanique n'a jamais été aussi belle.

     

    Pascal Décaillet