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Sur le vif - Page 614

  • La vieille ficelle de l'homme nouveau

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    Sur le vif - Samedi 23.06.18 - 10.46h

     

    L'immense escroquerie de Macron, lors de la présidentielle 2017, a été de nous sortir la vieille ficelle de "l'homme nouveau". Comme Giscard, en 1974, avec sa "société libérale avancée".

     

    Pour qui sait lire la politique, pour qui s'est frotté à l'Histoire, il ne saurait exister d'hommes nouveaux. Tout politicien, même jeune, même flamboyant, recèle en lui les archétypes de la captation du pouvoir. C'est dans Plutarque, dont je vous recommande absolument la lecture (Pléiade). C'est dans Shakespeare, notamment "Jules César". C'est Kennedy, en 60. C'est Giscard en 74. Et c'est Macron, en 2017.

     

    Le discours sur "l'homme nouveau" est tellement vieux en politique qu'il résume en lui l'éternité de l'archaïsme. Rien de plus éculé que la modernité.

     

    La vérité, c'est que Macron entre, comme tous les autres, dans des typologies parfaitement identifiables, pour qui a consacré une partie de sa vie à les étudier.

     

    Économiquement, c'est un libéral, tradition Tardieu et un peu Giscard. C'est un libre-échangiste, proche d'une école anglo-saxonne peu répandue en France. Il y en eut quelques-uns, sous le Second Empire, puis vers le milieu de l’Entre-deux-guerres.

     

    Dans les rapports avec l'Europe, c'est un MRP, entendez un démocrate-chrétien français de la Quatrième République, on pense à des hommes comme Schuman ou Pleven. À certains égards, Jacques Delors.

     

    Dans le rapport aux choses de l'Argent et à la majesté de sa posture, c'est un orléaniste. La branche cousine des Bourbons, celle qui fit des affaires, ou encouragea qu'on en fît.

     

    Tout cela, toute cette configuration qui finit bien par affleurer, relève d'options que Macron a totalement le droit d'embrasser. Simplement, il n'est pas un homme nouveau. Il incarne les feux de l'Ancien Monde. Ses choix, dans la géographie et la géométrie politiques, sont repérables, traçables, identifiables.

     

    Il n'existe jamais d'hommes nouveaux. Juste des hommes plus jeunes, qui prennent leur place sur l'échiquier. Pour nous rejouer l'ancestrale noirceur du pouvoir. Dans cette partition, toujours recommencée comme une suite de Bach, rien ne change, jamais.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Macron, conservateur de l'Ordre libéral

     

    Sur le vif - Vendredi 22.06.18 - 14.53h

     

    Très vite, dans la campagne présidentielle de 2017, il m'est apparu que le concept de nouveauté, dont se targuait tant le candidat Macron, n'était qu'une apparence. Cet homme n'est ni un révolutionnaire, ni même un novateur. Au contraire, il a été le candidat de la conservation de l'Ordre libéral. Le candidat de l'Ancien Monde.

     

    Dans la campagne, il a joué sur quoi ? Son aisance, sa jeunesse, sa belle allure, toutes choses que nul ne lui conteste. Il est tombé au meilleur moment, celui où tous les appareils qui avaient régi la Cinquième République se suicidaient allègrement sous ses yeux : les gaullistes et les socialistes, au premier chef. Mieux : sa rivale du second tour s'est, elle aussi, suicidée face à lui, lors du débat, où elle été simplement calamiteuse.

     

    Un homme, beau et souriant, moderne, au milieu des décombres et des suicides. Oui, il a pulvérisé tout le monde, c'est assurément très bien joué. Mais qu'il ne vienne pas se présenter comme le Président du changement.

     

    Face à une Union européenne en ruines, totalement incapable de donner une réponse à la pression des flux migratoires, Macron continue de s'en tenir aux paradigmes des années 1990, à l'époque de Jacques Delors et de l'européanisme triomphant. Il ne voit pas - ou feint d'ignorer - le retour des nations. Il a, dit-on, une solide formation philosophique : il aurait mieux fait de lire des livres d'Histoire, nation par nation, c'est plus concret pour le préparer à un job comme le sien.

     

    Face à une Italie qui réaffirme l'échelon national et marque sa volonté de contrôler drastiquement les flux migratoires, il a commencé par insulter le nouveau gouvernement, en lui brandissant des poncifs moraux : catastrophique posture du Président-philosophe face à un pays qui fait ce qu'il peut dans la gestion du réel.

     

    Face à l'Allemagne, il continue de croire en Mme Merkel, personnage du passé, figure dépassée par une crise migratoire à laquelle elle n'a pas su donner les bonnes réponses.

     

    Le Président Macron est un homme du passé. Un défenseur de la vision multilatérale des rapports entre les nations. Un tenant de l'Ordre libéral, et surtout libre-échangiste, qui étouffe l'Europe et une partie du monde depuis trois décennies. Un orléaniste, charmant et souriant, présentant bien, faisant bonne figure. Sur le fond, un démanteleur de services publics, un conservateur des acquis pour les nantis. Un libéral. La France méritait une autre vision. Cinq ans de répit pour l'Ancien Monde. Cinq ans de perdus.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Le bailli en dentelles

     

    Sur le vif - Vendredi 22.06.18 - 07.35h

     

    Interviewé par Romain Clivaz, l'ancien Président du Parlement européen, l'Irlandais Pat Cox, au demeurant remarquable francophone, s'accroche encore à l'idée d'une politique globale européenne dans la gestion des flux migratoires.

     

    Le problème, c'est que l'Europe politique n'existe pas. Elle est juste une fiction, un château de cartes, pour faire illusion. Or, pour qu'il y ait une quelconque "politique", migratoire ou autre, il faut qu'existent, puissamment, le crédit et la confiance de l'instance qui prétend l'appliquer, cette politique.

     

    L'improbable conglomérat nommé "Union européenne" ne dispose ni de ce crédit, ni de cette confiance. Comment voulez-vous, dans ces conditions, lui délivrer un chèque en blanc pour une gestion continentale coordonnée des flux migratoires ? Il est assez rare que l'on confie ses intérêts à un fantôme errant.

     

    Tout au contraire, les nations reviennent. Pour ma part, ayant étudié de très près, depuis ma jeunesse, les Histoires de France et d'Allemagne dans les trois derniers siècles, notamment la naissance de l'idée nationale allemande dans la Prusse occupée par Napoléon (1806-1813), je crois depuis toujours à la primauté de la nation sur l'empire.

     

    La nation, c'est la réalité vécue de nos mémoires et de nos âmes. C'est l'unité, le périmètre sensible dans lequel vibrent les souvenirs et se forgent les décisions des peuples. Cet espace-là, aujourd'hui encore, jouit du crédit et de la confiance indispensables à l'application des politiques. Le château de cartes européen, pour sa part, n'en jouit pas. Il est perçu comme lointain, irréel, diaphane, inefficace, prétentieux, arrogant. Un bailli en dentelles.

     

    Dès lors, pour les années qui viennent, les politiques migratoires seront décidées et appliquées nation par nation. Chacune d'entre elles considérera son intérêt propre avant celui du voisin. Entre les Etats, les frontières renaîtront. Et le château de cartes continental, tout naturellement, s'effondrera.

     

    Pascal Décaillet