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Sur le vif - Page 43

  • Isabelle Faust : chaque note est une naissance

     
    Sur le vif - Samedi 03.02.24 - 10.58h
     
     
    Isabelle Faust, l'une des plus grandes violonistes vivantes, est seule, debout, dans la Thomaskirche de Leipzig, dont Jean-Sébastien Bach fut le Cantor, de 1723 jusqu'à sa mort en 1750. Concert pour temps de Covid. Partita pour violon seul no 2, cinq mouvements, ça commence par l'Allemande.
     
    C'était repris hier soir, sur le coup de 23.30h, sur Stingray Classica. Je connaissais déjà, je crois même en avoir parlé. Il est des choses dont je ne parle jamais, d'autres que je reprends à l'infini. On gère ses passions comme on peut.
     
    Dans ce moment rare, il y a cette extraordinaire interprète, la qualité de son visage, sa totale présence dans l’œuvre. Elle semble découvrir chaque note que, par la pression sur la corde ou le jeu de l'archet, elle crée pourtant elle-même. Elle a dû la jouer mille fois, mais là, c'est la première. Cette interprétation est une naissance.
     
    Il y a l’œuvre. Simplicité. Densité. Acoustique de l'une des églises les plus célèbres des Allemagnes, celle de Bach, celle où Mendelssohn redécouvrit les Passions. Celle où, si souvent, fut lue la Bible en allemand de Luther, dans sa traduction de 1522. La Thomaskirche de Leipzig, coeur vibrant de l'âme allemande.
     
    Il y a Isabelle Faust, violoniste bouleversante, elle-même remuée par l’œuvre qu'elle sert. Il y a le lieu. Il y a la musique. Il y a chaque note qui s'élève. Vers quel destin ?
     
     
    Pascal Décaillet
     

  • Ceux qui tutoient l'orgasme

     
    Sur le vif - Vendredi 02.02.24 - 14.33h
     
     
    Les députés sont des élus du peuple. Ils doivent représenter le peuple, défendre ses intérêts. Si leur langage ressemble à celui du peuple, c'est très bien, les députés ne sont pas des Académiciens. Si leurs colères, leurs fureurs, sont celles du peuple, il n'y a pas à les censurer. Les députés ne sont pas un Conseil de paroisse, ni une assemblée de géomètres autour d'un Cadastre.
     
    Il n'y a pas à censurer les députés, s'ils élèvent la voix au nom du peuple. Ils n'ont pas le droit de s'interpeller mutuellement ? C'est une règle ridicule, les élus à la Convention le faisaient continuellement (lisez Michelet, Histoire de la Révolution française), c'est une preuve de vitalité : la politique, c'est le combat. La politique, c'est la guerre.
     
    Il faut les voir, dans les minutes qui viennent de s'écouler, certains députés du Grand Conseil genevois, sur une question touchant aux résiliations des rapports de service dans la fonction publique, s'exprimer comme des hauts-fonctionnaires. Comme des chefs adjoints de RH. Comme des petits grimpaillons pète-sec, au service du pouvoir.
     
    Je n'aime pas cela. Je n'aime pas ce ton, chez les élus du peuple.
     
    Nous élisons des représentants. Des gens qui nous ressemblent. Pour interpeller l'exécutif, exiger des comptes du pouvoir, serrer au plus près les ministres, afin d'éviter les abus.
     
    Nous n'élisons pas des secrétaires généraux adjoints à titre temporaire, pétris comme des gisants, qui tutoient l'orgasme dès que surgit le mot "entretien de service".
     
     
    Pascal Décaillet

  • 13ème rente : le PLR face au risque du déclin

     
    Sur le vif - Mardi 23.01.24 - 10.26h
     
     
    Joindre le pouce et le majeur, prendre une attitude bien posée, jouer l'expert, défendre la raison arithmétique face aux pulsions des extrêmes. C'est, en gros, la stratégie du PLR dans le combat autour de la 13ème rente AVS. Vieille posture, si souvent couronnée de succès dans notre Histoire politique, que je couvre depuis près de 40 ans.
     
    La plupart du temps, le PLR a raison. On doit compter les sous, éviter tout gaspillage d'Etat. Je vais même plus loin : on ne doit dépenser que ce que l'on possède déjà. Pour moi, la dette, dont les intérêts sont payés par les contribuables et leurs enfants, c'est non. Entrepreneur, je n'ai jamais emprunté un seul centime à personne. Donc, la rigueur financière, c'est oui : sur le principe, je suis d'accord avec les plus sévères des PLR.
     
    Mais le 3 mars, le PLR pourrait bien perdre la bataille. Cette fois, il n'a pas face à lui la seule gauche, mais une bonne partie de la droite, quasiment toute la droite non-libérale, ce qui inclut un bon nombre de radicaux, et même pas mal d'UDC, regardez la section genevoise. Oui, par prise en étau, comme sur la question européenne, le PLR pourrait perdre.
     
    Une défaite du PLR, en soi, c'est supportable. Mais désolé, par sur l'AVS. Pas sur ce fleuron de nos assurances sociales. Pas sur la mémoire de 1947, à mes yeux l'une des plus grandes dates de la Suisse moderne. Pas sur le dos de nos aînés, qui ne veulent pas entendre parler de report. Perdre sur les retraites, le 3 mars, c'est prendre rendez-vous avec le déclin. Le PLR prend ce risque. Mais aussi, le Conseil fédéral, le Parlement, bref tout le monde institutionnel suisse, face à la prodigieuse vitalité rénovatrice de la démocratie directe.
     
    J'invite le PLR à se souvenir qu'il est, avant tout, l'héritier, du grand parti qui a fait la Suisse, les radicaux, y compris la Suisse sociale. Et que l'apport de l'autre aile, presque exclusivement romande (Genève, Vaud, Neuchâtel), ainsi que Bâle-Ville, bref une mini-galaxie minoritaire, élitaire, n'est que très subsidiaire dans ses fondements.
     
    J'invite le PLR à se remettre en question. Et voir cette votation du 3 mars pour ce qu'elle est : un rendez-vous de la Suisse avec son destin.
     
     
    Pascal Décaillet