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Sur le vif - Page 4

  • Un homme d'exception

     
     
    Sur le vif - Jeudi 09.10.25 - 10.40h
     
     
    Il y a 33 ans, le 8 octobre 1992, s’éteignait l’un des plus grands hommes d’Etat allemands. Correspondant au Palais fédéral de la RSR, immergé jusqu’au cou dans la campagne du 6 décembre (je sillonnais la Suisse dans tous les sens), je lui avais consacré un hommage, dans la matinale du lendemain.
     
    Né en 1913 dans la superbe Ville Hanséatique de Lübeck, qui fut aussi celle de Thomas Mann, il a refusé le Troisième Reich, passé douze ans en exil en Scandinavie.
     
    Revenu en Allemagne, il fut un incomparable Maire de Berlin, puis Vice-Chancelier et Ministre des Affaires étrangères, et enfin, de 69 à 74, le premier Chancelier social-démocrate de l’après-guerre.
     
    En décembre 1970, première visite d’un Chancelier allemand à Varsovie, il surprend le monde entier en s’agenouillant devant le monument aux morts du Ghetto. L’année suivante, il sera Prix Nobel de la Paix.
     
    Willy Brandt, toute sa vie, a porté son regard vers l’Est, quitte à se faire détester par les Américains. Sa géniale intuition de l’Ostpolitik l’a amené à établir, enfin, des relations avec la DDR.
     
    J’ai absolument tout lu sur lui, en allemand comme en français, toutes ses biographies, toute sa correspondance, tous ses discours : Willy Brandt portait en lui une intime conviction de l’unité allemande retrouvée. Pas celle du Rhénan Kohl, capitaliste et atlantiste, qui phagocytera avec une inimaginable vulgarité la DDR. Non, Willy Brandt respectait la Prusse, la Saxe et la Thuringe, leur Histoire, leur rapport à l’Etat, à l’organisation sociale, où le marché n’a JAMAIS régné en maître. Bref, il avait profondément compris l’essence historique et philosophique de la DDR. Le capitaliste Kohl, lui, n’y a vu qu’un marché à racheter.
     
    Willy Brandt voulait une unité du cœur et de l’âme de tous les Allemands, c’était un visionnaire, un homme d’exception, l’un de ceux que j’admire le plus au vingtième siècle, avec de Gaulle et Mendès France.
     
     
    Pascal Décaillet

  • Le Roi est nu, le Roi est seul, le Roi doit partir

     
     
    Sur le vif - Lundi 06.10.25 - 14.38h
     
     
    Emmanuel Macron : un homme intelligent, charmant, cultivé, doté d'une belle plume, ou alors bien entouré, beau parleur, excellent dans les discours.
     
    Bref, l'homme ne manque pas de qualités. Mais un homme d'Etat, ça n'est pas un homme tout court. Il faut qu'il y ait en lui le génie de l'Etat. C'était le cas avec Charles de Gaulle. Aussi, certes autrement, avec François Mitterrand.
     
    Chez Macron, la dimension d'Etat, celle d'un Philippe le Bel, celle d'un Louis XI, celle d'un Carnot, d'un Mendès France, n'apparaît pas. L'homme se donne à briller. Il aime la Cour. Il aime presque physiquement les puissants du monde, il adore les empoigner amoureusement, les embrasser. Chez lui, la diplomatie est une étreinte recommencée. Dans l'ordre de l'horizontalité de classe, les puissants en haut, les gueux en bas, il excelle.
     
    A lui seul, par réaction, il réveille Marx, la presse de gauche rhénane des années 1840, Engels, la dialectique hegelienne, la prise du Palais d'hiver, la Révolution allemande de 1919, le bain joyeux de Mao dans le grand fleuve.
     
    Que signifie l'inimaginable bordel de son second mandat, d'ailleurs déjà largement installé lors du premier ? Politiquement, l'échec du grand rêve MRP, très Quatrième République, de vouloir construire une majorité par le Centre. Pour une raison simple : en politique, il y a la droite, la gauche. Les dominants, les dominés. La lutte des classes. Au milieu de ces feux d'antagonismes, bienvenus dans une perspective dialectique, le Centre n'est qu'une illusion. Un Marais. Une eau de bénitiers, trempés des doigts de mille pécheurs et pécheresses.
     
    La preuve de cet échec ? Depuis 2017, Macron nous promet de résorber les extrêmes. Huit ans après, ils ne se sont jamais aussi bien portés. Les vrais chefs, en France, dans une forêt de prétendants futiles, sont Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon. La première est aux portes du pouvoir. Elle n'a plus qu'à introduire la clef.
     
    Alors voilà, Macron, cet homme intelligent, nous prouve par l'acte qu'en politique, briller seul dans un Palais des Glaces, entouré des seuls courtisans, ne sert à rien. Il faut une vision de l'Etat. Et il faut une vision POUR l'Etat. Car en France, depuis mille ans, rien ne se fait sans l'Etat. Que fait de Gaulle, en 44, pour éviter une guerre civile entre maquis communistes et partisans des Américains ? Partout en France dévastée, il rétablit l'Etat.
     
    Cette dimension, austère et sacrificielle, celle d'un Charles de Gaulle avant tout, Macron ne l'a pas. Alors, tel une divinité carthaginoise, flaubertienne, assoiffée de sacrifices humains, il envoie ses Premiers ministres, l'un après l'autre, dans la dévoration par le feu.
     
    Aujourd'hui, lundi 6 octobre 2025, le Roi est nu. Le Roi cherche la lumière, mais il a sacrifié tous les fusibles. Le Roi est seul. Le Roi doit partir.
     
     
    Pascal Décaillet

  • Mon soutien et mon amitié à Rémy Pagani

     
     
    Sur le vif - Dimanche 05.10.25
     
     
     
    On ne me soupçonnera pas d'être du bord politique de Rémy Pagani. Mais depuis toujours, je le respecte : c'est un vrai militant, courageux, déterminé.
     
    Ce courage, il vient d'en faire preuve dans l'affaire de la flottille. Rien ne l'obligeait, à plus de 70 ans, à se lancer dans cette aventure. Il n'y a que des coups à prendre : on sait très bien, dès le début, que les Israéliens ne vont pas vous accueillir à bras ouverts. Risques d'arrestation. Risques de prison. Tout cela, Pagani le savait, dès le départ. Il est parti, quand même. Ce courage, pour ma part, je ne l'aurais pas eu.
     
    Et puis, Rémy Pagani se trouve être un ancien Maire de Genève. L'ancien numéro un de la deuxième Ville de Suisse est actuellement dans une prison israélienne. On pourrait imaginer que la chose émeuve, chez ses collègues politiciens de tous bords ayant un minimum de classe. Hélas, il n'en est rien. C'est soit le silence assourdissant, soit des quolibets particulièrement déplacés, venant de la part de gens n'ayant pas eu son courage. Cela, quoi qu'on pense du conflit Israël-Palestine.
     
    Eh bien voilà. Moi, citoyen de ce pays que j'aime, la Suisse, m'exprimant à ce titre-là et à lui seul, j'adresse à Rémy Pagani mes voeux pour que tout se passe au mieux, pour qu'il soit libéré au plus tôt. Lui et ses compagnons, hommes ou femmes, suisses ou pas suisses, anciens Maires ou futurs charpentiers.
     
    Il y a des moments, dans la vie, où des humains doivent s'adresser à d'autres humains. Si vous vous promenez dans la Vieille Ville de Jérusalem, qui tant de fois dans ma vie m'a fasciné, vous verrez que mille voix, surgies de trois grands courants spirituels au moins, vous y invitent. Humains, adressons-nous à des humains. Et respectons le courage de ceux qui osent.
     
     
    Pascal Décaillet