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Sur le vif - Page 2

  • Retour à la FM : dehors, les incompétents SSR !

     
     
    Sur le vif - Jeudi 11.12.25 - 16.55h
     
     
    A de rares exceptions près, dont mon excellent confrère Roger Schawinski, vrai professionnel inventif des médias en Suisse, je me sentais bien seul, en janvier, lorsque je pestais contre la plus stupide décision de l'Histoire de la SSR (qui n'en est pourtant pas avare), celle de renoncer à la FM pour le DAB. Je m'exprimais dans un domaine que je crois connaître un peu, et auquel j'ai peut-être pu apporter quelque présence, celui de la radio.
     
    Stupide décision ? Le mot est faible. Une véritable saloperie. Une connerie de la toute dernière espèce, préparée puis décidée par des incompétents. Des gens, tout en-haut, dans les étages, dans les nimbes, qui n'ont jamais rien compris à la spécificité de la radio, ce petit miracle de légèreté, d'ubiquité, d'omniprésence, ce média béni des dieux, celui qui vous habite, vous accompagne, s'incorpore à vous, vous colle à la peau. Le DAB est un modernisme pour amateurs, sous l'onction des technocrates. La FM est un ange gardien.
     
    En janvier, je pestais. J'ai une pensée, aujourd'hui, pour tous ces petits perroquets de la Bonne Parole SSR, ces esclaves du fait accompli, ces trottineurs derrière le pouvoir. Quel pouvoir ? Tout pouvoir, d'où qu'il vienne ! Celui des armadas de chefs, avec leurs meutes de petits sous-chefs, de chefaillons de gares de triage désaffectées, de petits caporaux. Celui des gentils journalistes, éditorialistes, copains de cocktails des apparatchiks SSR, qui n'en peuvent plus de reprendre leurs mots, leurs phrases, leur souffle, leurs intonations.
     
    En janvier, tous ces révolutionnaires de la 25ème heure nous juraient leurs grands dieux que la FM était foutue, tout juste bonne pour la casse, que le DAB c'était la sainte félicité, que la SSR ne perdrait pas un seul auditeur, qu'au contraire elle en gagnerait, parmi les jeunes, ah les jeunes, les jeunes, le jeunisme, comme si les "jeunes" ne songeaient qu'à consommer "jeune" ! Fadaises. Démission. Manque de confiance en soi, en son propre vécu, ses propres cicatrices, sa propre expérience, ses propres compétences.
     
    C'est ça, le fond du problème, les incompétents au pouvoir. Alors qu'il faut y mettre les artisans du micro. Les praticiens. Et qu'ils y demeurent, pour montrer l'exemple, défricher, ouvrir les voies ! On ne gouverne pas par l'appareil, mais par son propre savoir-faire, partagé fraternellement avec les collègues, mais toujours dans l'acte, jamais dans la parlotte, jamais dans les "séminaires de cadres à l'extérieur", tout ça, c'est de la foutaise !
     
    Alors, quoi ? Alors, la SSR doit immédiatement virer la bande d'incompétents qui ont engagé la radio dans l'abandon de la FM au profit du DAB. Elle doit donner des exemples, et très vite. Elle doit démolir ses structures, ses hiérarchies de glandus, et mettre au pouvoir les plus performantes de ses équipes de production. Le pouvoir à ceux qui savent faire ! Elle doit virer tous ses cadres qui n'ont aucune idée du métier, aucune idée de la production, aucune idée de la fabrication d'une émission, aucune idée de ce lien sacré noué avec la public, quand on prend le micro avec amour, avec passion.
     
    Dehors, les incompétents ! Sur ma vieille Mazda, j'ai gardé la FM. J'écoute avec plaisir France Culture et surtout France Musique. J'ai gardé vide ce qui était la sélection de la RSR1, celle à qui j'ai consacré, à l'Info, dix-sept années de ma vie, les plus belles. J'aurai plaisir, un jour, si possible avant de rendre l'âme, à rebrancher cette sélection vide sur sa destination d'origine. Rien que pour emmerder. Ca fait du bien, la colère, quand elle est portée par la passion d'une vie.
     
     
    Pascal Décaillet

  • Hep taxi, Malmö, vite !

     
     
    Sur le vif - Mardi 09.12.25 - 14.35h
     
     
    Vous n'imaginez pas le nombre de gens, en ville, qui s'agrippent à moi, me saisissent en tremblant par le collet, la lèvre inférieure blanche d'angoisse, habités par un mélange impétueux de violence et de désir, et me supplient de faire quelque chose pour sauver le train de nuit Genève-Malmö. C'est certainement, aujourd'hui, la préoccupation no 1 de nos compatriotes. Une LAME DE FOND. Négliger la pulsion nocturne Genève-Malmö, ce qu'elle recèle d'ivresse dionysiaque, ce parfum bergmanien de fraises sauvages, ce petit jeu pervers de tendresse et de domination, cette résurgence germanique de l'Orient Express, cette chevauchée wagnérienne sur la vague baltique, c'est se hasarder au dernier de nos crimes avant la fin du monde.
     
     
    Pascal Décaillet

  • L'Etat, l'indispensable outil !

     
     
    Sur le vif - Dimanche 07.12.25 - 17.08h
     
     
    Toute ma vie, j'ai aimé et voulu l'Etat. Toute ma vie, je l'ai cherché. L'Etat, et surtout pas des armadas de fonctionnaires. L'Etat, et surtout pas des alignements de guichets. L'Etat, et surtout pas pléthore de circulaires.
     
    Mais l'Etat, quand même. Celui de Philippe le Bel, quand il impose (et de quelle manière !) le pouvoir royal sur l'Ordre des Templiers, qui commençait à prendre trop de place, trop de pouvoir. Celui de Louis XI, quand il prend le contrôle des messageries postales. Celui, surtout, d'Henri de Navarre, quand, devenu Henri IV, il fait son entrée dans Paris, et réconcilie les Français autour de sa personne. Celui, plus tard, de Bismarck, quand il crée les premières lois sociales d'Europe.
     
    L'Etat, en Suisse, a été incarné depuis 177 ans par un parti, un seul : le parti radical. L'autre parti, arrivé plus tard, qui l'a défendu avec force est le parti socialiste. C'est tout. Défendre la famille, aussi respectable soit le projet, ça n'est pas défendre l'Etat. Défendre l'environnement, c'est très bien, mais ça n'a rien à voir avec l'Etat. Défendre l'entreprise, Dieu sait si je suis pour (les PME, notamment), mais ça n'est pas une affaire d'Etat. Défendre le grand capital mondialisé, c'est un acte anti-Etat, anti-frontières, anti-national, que je combats.
     
    Non. L'Etat, c'est autre chose. Disons une volonté citoyenne d'organiser la vie publique, à l'intérieur de frontières définies, dans le système de références, de valeurs et de mémoire d'une nation déterminée. Cette organisation n'est pas un but en soi, l'Etat n'est pas un but en soi. Si j'en prône la nécessité, c'est comme outil (organon, dirait Aristote) pour équilibrer les pulsions individuelles, servir l'intérêt commun, protéger les plus faibles contre les requins. L'Etat, c'est l'anti-jungle. Ce rôle, il doit, de toutes ses forces, l'assumer face au crétinisme ultra-libéral qui galope en Europe depuis la chute du Mur. L'Etat c'est une régulation cadastrale des forces de domination des chefs de clans.
     
    L'Etat radical, celui de 1848. c'est cela. L'Etat fazyste de 1846, c'est cela. Les hussards noirs de la Troisième République. si magnifiquement décrits par Péguy (L'Argent, Cahiers de la Quinzaine), c'est cela. L'extraordinaire passage (1959-1973) du socialiste bâlois Hans-Peter Tschudi aux affaires, avec trois révisions réussies de l'AVS en quatorze ans, c'est cela. Les huit mois de Pierre Mendès France au pouvoir (juin 54 - février 55), c'est cela. La génuflexion de Willy Brandt à Varsovie, il y a jour pour jour 55 ans (7 décembre 1970), c'est cela. On est quand même dans un autre système de valeurs que la défense paroxystique des marchés boursiers et des dividendes.
     
    L'Etat n'est qu'un outil. Mais je n'en connais nul autre pour réguler les passions contraires, et imposer l'intérêt général sur les ferments de dispersion qui se multiplient. C'est pourquoi j'aime et je veux l'Etat. C'est pourquoi j'inscris mon horizon politique entre la rigueur rationnelle des légistes radicaux et l'ouverture sociale de la seule gauche à laquelle je puisse faire référence : celle qui, depuis la Révolution française, se bat pour la justice, pour l'éducation, pour la santé. Pas la gauche libertaire, ni surtout mondialiste. Non, la gauche nationale, structurée autour des intérêts supérieurs du pays. Pas la gauche de la haine des riches, qu'on vient de voir à l’œuvre avec un succès que, pour être poli, je qualifierais de modéré. Mais la gauche du travail, de la défense des ouvriers, des plus fragiles, des plus faibles d'entre nous.
     
    Pour organiser la solidarité, il faut la rigueur et la précision de l'Etat. Encore faut-il, comme on l'a vu récemment, qu'il vise juste et sache cibler ses bénéficiaires avec une autre lucidité que celle des automatismes.
     
     
    Pascal Décaillet