Sur le vif - Dimanche 10.03.24 - 10.27h
La France, notre grand voisin et ami de l'Ouest, est-elle devenue folle ? On n'y entend plus parler que de guerre, d'intervention directe de troupes françaises sur le théâtre d'opération Ukraine-Russie. Le Président a même évoqué l'envoi de troupes terrestres.
Pire : hier à Lille, pour lancer sa campagne des européennes, l'illustre inconnue parachutée par Macron pour conduire sa liste s'est couverte de ridicule. Le souci numéro un des Français est le pouvoir d'achat. Ou encore, les retraites. Ou encore, la déshérence du monde paysan. Et de quoi vient leur parler Miss Parachute ? De Daladier, de Chamberlain, de la Conférence de Munich en 38, des Sudètes. Tout cela, pour attaquer de front le RN, crédité d'un sacré tabac le 9 juin.
Toujours à Lille, le Premier ministre, en clair le commis aux oeuvres de Macron (il n'a nulle autre prérogative que celle-là), en surajoute dans le thème "RN fasciste", gentillesse totalement contre-productive : dans une campagne, il ne faut jamais parler de l'adversaire, mais de soi. Or, hier à Lille, du programme de la Macronie pour les européennes, qu'avons-nous appris ? Rien. Strictement rien. Si ce n'est qu'ils insultent le principal parti d'opposition, alors qu'ils sont, eux, au pouvoir. Madame Le Pen, Monsieur Bardella, sortent grands vainqueurs de cette Messe inaugurale de leurs adversaires.
Bien pire encore : l'ineffable chaîne macronienne LCI. On n'y voit plus défiler que des généraux en retraite, tout chantres de l'entrée en guerre de la France sur le front ukrainien. Tous convaincus, comme en 39, de l'absolue supériorité de l'armée française. Tous torréfiés par le génie nucléaire de la dissuasion. A travers chacun de ces personnages, le ton est donné par l’Élysée. Macron tient le diapason, les valeureux généraux chantent la victoire. C'est sûr, ils iront suspendre leur linge sur les lignes russes.
Dans la guerre, tout le monde fait de la propagande. Poutine, sur ses chaînes en Russie. Biden, sur les siennes aux Etats-Unis. Macron, en laissant instiller, sous couvert "d'experts", la petite musique du bellicisme.
Le record absolu d'arrogance de nos généraux français ? Il vient d'être pulvérisé, toujours sur LCI, avec des propos ubuesques sur l'armée allemande, qualifiée de faible, peu fiable, inapte à la chaîne de commandement. Dévaloriser l'armée allemande, la ridiculiser auprès du public français, la consigne a été lancée directement de l’Élysée, Paris et Berlin traversant ces jours une période de froid glacial.
Quel jeu joue Macron ? S'imagine-t-il sérieusement, une seule seconde, en chef de guerre contre la Russie ? On lui conseille de lire les événements de 1812. Ou alors, Guerre et Paix. Dans ce roman d'exception, il pourra se distraire de ses pulsions guerrières, avec une myriade de personnages. Un incendie de Moscou qui relègue celui d'Atlanta, dans Autant en emporte le vent, à celui de brasier local. Des paysages à couper le souffle. Une héroïne, Natacha, dont le lecteur tombe amoureux. Et à la fin, comme plus tard en 1945, juste un infime détail : c'est la Russie qui gagne.
Pascal Décaillet